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Alfred Wahl : « tous les Alsaciens ne sont pas favorables au Concordat »

Le maire de Strasbourg, Roland Ries, affirmait en février que la très grande majorité des Alsaciens et Mosellans soutenaient le système concordataire. « Cela reste à prouver », ont répondu des universitaires strasbourgeois, en lançant dans la presse nationale et régionale un appel intitulé Pourquoi nous sommes alsaciens, laïques et contre le concordat. Parmi les signataires, l’historien Alfred Wahl, né à Colmar, auteur d’une Histoire des conflits entre catholiques et protestants en Alsace (1860-1940). Entretien.

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Alfred Wahl : « tous les Alsaciens ne sont pas favorables au Concordat »

L’historien Alfred Wahl (Photo MN)

Les Alsaciens sont-ils en majorité favorables au Concordat ? En cette période de week-end prolongé, peut-être. Mais qu’est-ce qu’un Alsacien ? La définition d’Alfred Wahl est pour le moins concise. Pour lui, être un Alsacien, c’est « habiter en Alsace ». Point final. L’habitat prenant le pas sur les origines, il veut évacuer toute distinction entre ce que d’aucuns appellent les « vrais Alsaciens » et les autres.

« En Europe occidentale, tout est mêlé aujourd’hui. Mais à force de rechercher des identités, on se perd, on se noie. L’identité est une idéologie, elle n’est définie que par ceux qui y croient et par ceux qui s’en servent pour avoir le pouvoir. »

Il réfute aussi toute idée d’identité confessionnelle alsacienne spécifique car, constate-t-il, « les églises et les temples y sont aussi peu fréquentés que dans le reste de la France ».

Reste cette fameuse exception du Concordat, ce droit local napoléonien qui a survécu aux guerres et aux annexions et qui fait de l’Alsace-Moselle un territoire français pas comme les autres. Cette particularité a contribué, selon l’historien, à garder longtemps vivaces les animosités entre Protestants et Catholiques. Une illustration d’époque :

« Juste après la première guerre, la municipalité socialiste de Colmar a proposé de créer des écoles interconfessionnelles pour éviter que certains enfants n’aient à effectuer des trajets trop longs. L’évêque d’alors a considéré que c’était une déclaration de guerre et a décrété la grève scolaire ! »

La laïcité, une garantie de paix

Pour Alfred Wahl, la société a évolué et le droit devrait évoluer avec elle :

« L’ordre du jour, c’est que la religion, de façon générale, devienne une affaire strictement individuelle… La laïcité constitue la meilleure garantie de paix entre les religions ! Dans le système scolaire, le système concordataire apparaît comme une véritable entrave aux droits de l’homme, avec ses cours de religion obligatoires (il faut demander une dérogation pour ne pas y assister) dans les établissements scolaires publics. »

Les effectifs sont en baisse dans les classes de religion, mais rien ne bouge.

« Des militants de la laïcité travaillent sur les textes pour supprimer ce caractère obligatoire, mais cette bataille juridique peut durer encore 100 ans si on ne se décide pas purement et simplement à rejoindre la loi de 1905, comme partout ailleurs en France. »

Alfred Wahl estime qu’avec l’extinction des vocations, la situation va forcément évoluer. « Il n’y a plus guère de candidats, ni chez les prêtres ni chez les pasteurs… » Et si les ministres des cultes concordataires n’étaient plus rémunérés par l’Etat ? « Rien n’empêcherait les communautés religieuses d’être subventionnées, mais selon les critères associatifs, pour l’encadrement des jeunes, pour des activités culturelles ou encore pour l’aide sociale qu’elles apportent… »

Aller plus loin

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