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J’ai testé pour vous : lire des livres de psy pour psy

Sélection des rencontres littéraires du mois avec la présentation de trois ouvrages spécialisés portés au niveau local : Clinique de la déshumanisation – Le trauma, l’horreur, le réel sous la direction de Jean-Richard Freymann, Trois délires chroniques, de Jean-Marie Jadin et Désirs et sexualités – D’une culture à l’autre, d’une langue à l’autre dirigé par Bertrand Piret et Jalil Benanni. Les trois paraissent chez Erès. Et m’ont donné plus de fil à retordre que je ne le pensais.

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J’ai testé pour vous : lire des livres de psy pour psy

Jean-Richard Freymann, psychiatre et psychanalyste, dirige la collection Hypothèses chez Arcanes. (Photo A.S)

Des thèmes prometteurs, des auteurs strasbourgeois et mulhousien, une coédition entre une maison locale (Arcanes) et une nationale (Erès), dont le partenariat permet notamment une plus large diffusion. De plus, les trois auteurs débattront ensemble à la librairie Kléber le 14 avril.

Face aux mastodontes invités ce mois-ci, comme Anne Sinclair, j’avais envie de donner leur chance à ces auteurs. J’avais commandé les livres avant de partir en vacances et pensais les entamer après mes journées de ski. Ils ne sont pas arrivés à temps. C’est donc à mon retour, les idées fraîches et la mine halée, que je les découvre. L’entreprise semble plus laborieuse que prévue, mais, forte de ma nouvelle énergie, je décide de m’y atteler avec conviction. J‘ai quatre jours pour tout compulser.

Clinique de la déshumanisation, chez Arcanes Erès.

 Jargon contre courage

Histoire de m’échauffer les neurones, je prends le moins épais quand même : Trois délires chroniques, du psychiatre et psychanalyste mulhousien Jean-Marie Jadin. Second paragraphe de la quatrième de couverture :

 « Chacun des délires est scruté avec un outil théorique différent mais toujours issu de l’enseignement de J. Lacan. On y verra ainsi un dysfonctionnement du jeu métaphoro-métonymique des signifiants, des illustrations de la notion de « forclusion du Nom-du-Père », des défaillances dans l’enchaînement borroméen des registres imaginaire, symbolique et réel du langage. Une relecture après coup en propose une synthèse. »

Aoutch. C’est costaud pour une mise en jambes. Effrayée, j’en reste là. Un de moins ! Je le repose donc et me lance à l’assaut de Clinique de la déshumanisation – Le trauma, l’horreur, le réel, ouvrage collectif dirigé par Jean-Richard Freymann, psychiatre, psychanalyste, professeur, directeur de la collection Hypothèses chez Acranes et président de la Fedepsy à Strasbourg.

> Ecoutez Jean-Richard Freymann présenter ce volume ambitieux, issu d’un congrès qui a eu lieu à Strasbourg.

Mais de quoi parle-t-on?

Palpitant : la promesse d’analyser les contextes politiques contemporains et leurs influences sur la psyché. Mais, honnêtement, je rame un peu à la lecture. Malgré le premier article qui tente de définir la déshumanisation, j’ai toujours un peu de mal à savoir de quoi on parle précisément. Je pose donc directement la question au Docteur Freymann.

> Ecoutez sa définition de la déshumanisation.

Ah, vous avez compris ? Pas moi. Je ne suis pas plus avancée sur la déshumanisation. Entre les textes sur la Shoah ou encore l’Algérie, quelques belles contributions, notamment un article édifiant « L’homme est-il rentable ? » de Daniel Lemler. J’aurais aimé en avoir plus et interroge donc le directeur de l’ouvrage sur les symptômes contemporains du phénomène, aujourd’hui même, à la veille des élections présidentielles.

>Ecoutez son analyse en deux temps de déshumanisation actuelle: une « désidéalisation » des candidats et l’immédiateté de l’information.

Je reste sur ma faim. Je n’oserais accuser aucun contributeur de verbiage, le contenu est certainement érudit, mais destiné à des gens qui se comprennent entre eux, et là, je m’en sens exclue. Pas qu’à la lecture d’ailleurs. Pendant les entretiens, j’ai du mal à suivre, à voir où tous ces mots conceptuels veulent en venir. Le premier était avec Bertrand Piret, qui dirige avec Jalil Benanni, Désirs et sexualités – D’une culture à l’autre, d’une langue à l’autre.

Bertrand Piret, ici dans son cabinet, a dirigé avec Jannil Bennani l'ouvrage collectif Désirs et sexualités. (Photo A.S.)
Bertrand Piret a dirigé avec Jannil Bennani l'ouvrage collectif Désirs et sexualités. (Photo A.S.)

Là encore, les promesses intellectuelles sont enchanteresses. La lecture inégale.

> Ecoutez Bertand Piret :  au lecteur de  faire sa conclusion du livre.

 Trouver son public

Tant qu’il parlait à mon micro, je m’accusai intérieurement d’être absente, encore en vacances, de ne pas comprendre ses propos et à force de reformuler mes questions pour obtenir un peu de concret, je sentais que j’allais finir par passer pour une abrutie. Je me dis qu’en réécoutant, tout ira mieux, les mots feront sens. En fait, non, pas du tout. C’est même pire. Comme dans l’entretien avec Jean-Richard Freymann, j’entends d’innombrables fois le mot « question » : elles sont bonnes, parfois ravissantes même. Mais les réponses, on les devine à peine. Et parfois, elles enferment l’universalisme auquel elles prétendent dans un quasi-sectarisme analytique (oups, je commence à parler comme eux). Exemple :

> Ecoutez pourquoi la domination des hommes sur les femmes est omniprésente dans les différentes cultures et comment y répond la psychanalyse.

Les public avertis, passionnés de Freud, Lacan and Co, ou tout simplement plus malins ou plus cultivés que moi seront certainement ravis. Pour les autres, ne soyez pas tristes, je nous ai concocté un petit cocktail de programmes pour nous remonter un peu.

Références:

CLINIQUE DE LA DESHUMANISATION, Le trauma, l’horreur, le réel, par Jean-Richard Freymann (ed). Co-Auteurs : Bernard Baas – Moise Benadiba – Cristina Burckas – Alice Cherki – Cristian Damsa – Marisa Decat De Moura – Olivier Douveille – Claude Escande – Charlotte Herfray – Francoise Hurstel – Pierre Jamet – Karima Lazali – Daniel Lemler- Robert Levy – Daniel Lysek – Jeferson Machado Pinto – Sophie Marinopoulos – Guilherme Massara Rorcha – Andre Michels – Jean-Raymond Milley – Jean-jacques Moscovitz- Israel Nisand – Freddy Raphael – Roland Ries – Robert Steegmann – Catherine Trautmann- Nicolas Velut.  2011, Hypothèses, 280 pages, 25.50 €

DESIRS ET SEXUALITES, D’une culture à l’autre, d’une langue à l’autre, par Jalil Bennani (ed) – Bertrand Piret (ed). Co-Auteurs : Houria Abdelouahed – Aude Bayed – Raja Ben Slama – Fethi Benslama – Abdesselam Cheddadi – Alice Cherki – Abdeslam Dachmi – Mohammed Ennaji – Jean-Richard Freymann- Mohammed Ham – Anne-marie Hamad- Nazir Hamad – Souad Hamandi – Christian Hoffmann – Adnan Houbballah  – Hager Karray – Karima Lazali – Jean-jacques Moscovitz – Moustapha Safouan – Colette Soler – Rajaa Stitou – Georges Zimra. 2012, Hypothèses, 256 pages, 23.50 €.

Les rendez-vous littéraires en avril

Au programme de la libraire Kléber, le 11 avril, dialogue avec Alain Mabanckou , écrivain franco-congolais vivant en Californie et Gaston-Paul Effa à la plume précieuse, d’origine camerounaise et vivant en Lorraine après des études à Strasbourg. A découvrir aussi : une démonstration de papiers découpés le 21 avril avec Michèle Wagner, une conversation le 24 avril avec l’académicien, Goncourt et Renaudot François Weyergans pour son dernier livre Royal Romance (Julliard), ou encore le poète russe Ossip Mandelstam à travers la voie de son biographe Ralph Dulti le 27 avril…

Au programme de la librairie Quai des brumes, vous pourrez rencontrer le 11 avril Myriam Congoste, qui, à travers son essai Le vol et la morale (Ed. Anacharsis) rentre dans l’univers d’un voleur. Le 17 avril, le philosophe Thierry Hoquet, auteur de Darwin contre Darwin, y tiendra une conférence sur ce thème dans le cadre du Printemps des philosophes de Ribeauvillé.

Et dans les médiathèques , dans le cadre de la semaine Lusofonia, une rencontre avec des auteurs lusophones : António de Sousa, écrivain franco-portugais, Lucineide Pinheiro, professeur – auteur brésilien et Miguel Manuel Zola, poète franco-angolais. C’est le 12 avril à 17h30 à la médiathèque Malraux.


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