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Un certain fatalisme au pique-nique de soutien aux Coop à Strasbourg

Une cinquantaine de personnes a participé au « Coopieux pique-nique » organisé ce dimanche midi place Kléber à Strasbourg à l’invitation de l’association de soutien aux Coop d’Alsace. Grands absents de cette mobilisation: les salariés, représentés par un représentant de l’intersyndicale, signe que l’ambiance s’est tendue à l’intérieur de la Coop. Dans l’après-midi, le président du Conseil général du Bas-Rhin a décidé de demander des explications aux dirigeants de la Coop.

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Un certain fatalisme au pique-nique de soutien aux Coop à Strasbourg

Une cinquantaine de personnes a participé (Photo PF)

Philippe Spitz et Dominique Bézu, les deux animateurs sans relâche de la campagne de soutien aux Coop d’Alsace, avaient revêtu le chapeau de paille campagnard pour la circonstance. C’est que l’enjeu était d’importance avec ce pique-nique: montrer aux décideurs politiques et économiques que de nombreux Alsaciens sont mobilisés pour que soit maintenu le réseau de distribution des magasins Coop. En l’espèce, c’est plutôt raté. Une cinquantaine de personnes seulement s’est installée place Kléber pour déboucher l’edelswicker. Philippe Spitz et Dominique Bézu étaient un peu déçus mais qu’importe ! Ils gardent leur cap: s’opposer à la réorganisation en cours par la direction qui prévoit notamment d’adosser le réseau de proximité à Casino. Un plan que Philippe Spitz et Dominique Bézu qualifient de « démantèlement »,  ils donnent rendez-vous en mai, lors des assemblées générales.

Philippe Spitz et Dominique Bézu (Photo PF)

Outre quelques élus locaux, ainsi que les députés Jean-Louis Christ (UMP) et Armand Jung (PS), peu de salariés de la Coop ont fait le déplacement. Ce qui n’est guère surprenant, l’association ayant clairement pris position contre la direction. Le climat interne dans la Coop s’est tendu ces dernières semaines, depuis que le « plan de sauvetage » a été annoncé, il prévoit plus de 400 « départs volontaires ». Et tout récemment, la direction a détaillé la liste des dix magasins qui seront fermés, dont trois à Strasbourg.

Pour Xavier (prénom changé), gérant d’un magasin du nord de l’Alsace, tout le monde se ment dans ce groupe :

« Je suis gérant depuis quelques années, mais quand je pense à ceux qui y ont consacré leur vie, aux dépens de leur vie de couple et de leur famille, ça me fait mal au coeur. Parce que notre boulot, c’est 60 heures par semaines à tout faire, du changement d’étiquettes au ménage. Alors quand on voit que notre avenir en tant que gérant indépendant chez Casino, ce sera de retourner au magasin le dimanche matin, et gagner autour de 1000€ par mois, ça fait peur.  Je suis allé voir sur le site des gérants, ils se foutent sur la gueule en permanence chez eux ! Cette situation de la Coop est d’autant plus frustrante que tout vient d’un problème de gestion, l’argent a été jeté par les fenêtres. On a appris la semaine dernière qu’un ancien dirigeant aurait bénéficié de 80 000€ de bons d’achats ! Et nous, on nous demande des sacrifices : on était à dix dans mon magasin, on n’est plus que quatre, mais le boulot est le même, voire pire, puisqu’il faut qu’on se batte contre la concurrence. Et là encore, on est mal armés, quand on voit les prix de nos achats à la centrale. »

Parmi les présents au pique-nique, une famille de Strasbourg, venue pour défendre le commerce de proximité, comme l’explique Roland Voegelin:

« La grande distribution, comme Leclerc ou Casino, ne devrait pas intervenir dans ce débat. Je ne suis pas un nostalgique et j’avoue que je vais moins souvent à la Coop que je ne devrais, c’est pour moi une épicerie de dépannage, mais c’est l’aspect social des Coops qui m’intéresse. Ces lieux de proximité sont importants et c’est ce qu’on devrait défendre, dans la lignée du mouvement des Indignés. »

Pour Anny Bertrand de Wangenbourg, le magasin Coop qu’elle choisit pour ses courses, c’est surtout pour l’ambiance:

« A la Coop, les salariés prennent le temps pour discuter. C’est plus détendu. A la Coop de Wasselonne, j’ai vu des chariots alignés… En fait, c’était le gérant qui préparait les courses pour les personnes âgées qui ne pouvaient se déplacer, et qu’il allait livrer lui-même. Bon, ben, ce genre de service personnalisé, où est-ce qu’on voit ça ailleurs ? »

Mais ce côté « détendu » n’a-t-il pas porté atteinte à la Coop justement ? Xavier, le gérant du nord de l’Alsace, a expliqué que lorsqu’il a pris les commandes de son magasin, il n’y avait eu aucune réfection des locaux depuis 21 ans et qu’il a dû insister pour l’obtenir ! Puisqu’aucune prime ne vient récompenser les efforts des plus motivés, certains se sont endormis. Malheureusement, le réveil concerne l’ensemble des 3000 salariés.

Guy-Dominique Kennel s’implique

Dans un communiqué envoyé dans l’après-midi, le président du Conseil général du Bas-Rhin rompt avec l’attentisme affiché par les élus alsaciens aux responsabilités. Guy-Dominique Kennel indique qu’il soutenait le plan du président de la Coop Christian Duvillet car il avait le mérite d’éviter la disparition du groupe. Mais maintenant, indique le communiqué:

« Guy-Dominique Kennel veut rencontrer la direction de la Coop pour connaître plus précisément le projet que déploie Coop avec Casino dans les territoires. Il souhaite également que soient pris en compte les circuits d’approvisionnement envisagés qui devront impérativement respecter les producteurs locaux. »

Le président du Conseil général indique en outre qu’il proposera une réunion avec les autres collectivités locales et les dirigeants de la Coop pour « aborder ces questions et lever les interrogations ».

Le communiqué précise également que l’Adira (agence de développement économique) est chargée de trouver un repreneur à la plate-forme logistique de Reichstett. Ce qui est étonnant car jusqu’à présent, le groupe Coop avait toujours nié vouloir vendre cette plate-forme.

 

Pour aller plus loin

Sur Rue89 Strasbourg : les fournisseurs de la Coop inquiets

Sur Rue89 Strasbourg : les gérants Coop pas emballés par Casino


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