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Législatives : où vont aller les suffrages des « petits » candidats

Les suffrages des électeurs des candidats éliminés au premier tour vont être courtisés cette semaine, surtout qu’à peine quelques centaines de voix séparent les deux candidats finalistes dans les 2e et 3e circonscriptions. Où pourraient se reporter ces voix ? On a posé la question aux candidats et sorti les calculettes.

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Législatives : où vont aller les suffrages des « petits » candidats

Pêche dans la rivière Taedong à Pyongyang en Corée du Nord (Photo Gr0uch0 / FlickR / CC)

Dès dimanche soir, la calculette a fonctionné dans les états-majors des candidats admis au second tour : il s’agit de faire le compte des voix recueillies par les candidats éliminés. A l’UMP, au Parti socialiste et même chez Europe Ecologie – Les Verts (EELV), qui profite dans la 3ème circonscription de l’alliance avec le PS, l’heure est au calcul des reports de voix… qui n’ont rien de bien mathématiques. Eric Schultz, candidat écologiste dans le 2ème circonscription du Bas-Rhin (Strasbourg-sud), remarque :

« Chez nous, il n’y a pas de mystère. Il y a un accord national entre le PS et EELV, nous appartenons à la même majorité gouvernementale, donc nous appellerons automatiquement à voter pour le candidat socialiste quand c’en est un. Ce qui ne nous empêchera pas d’être vigilant pendant la durée de la mandature… Pour ma part, je suis à la disposition de Philippe Bies pour faire les marchés et assister avec lui aux réunions publiques. »

Pour ce qui est du vote de l’électorat EELV:

« Nous ne sommes pas propriétaires de nos voix, nous suggérons seulement un choix. Je pense que le report se fera assez souplement sur ma circonscription, à part dans certains coins de Neudorf, où l’aménagement urbain ne fait pas l’unanimité [ndlr : Philippe Bies est adjoint au Logement du maire Roland Ries]. Mon pronostic ? Le match va être serré. Si ça passe, ce sera dans un mouchoir de poche. Avec le vote EELV et le Front de gauche – dont on ne sait pas comment il va se déterminer – on a au mieux 48% des voix. Il va falloir travailler d’arrache-pied pour transformer l’essai… »

La consigne de vote du Front de gauche : « Battre la droite »

Dans cette deuxième circonscription, comme dans la 1ère, la 3ème et même la 4ème, en plus du report des voix écologistes, les candidats de gauche pourront compter au moins en partie sur les électeurs du Front de gauche. Julien Ratcliffe, candidat dans la 4ème circonscription, appelle d’ailleurs à voter pour la socialiste Nadine Soccio, candidate contre Sophie Rohfritsch pour l’UMP :

« Dimanche, 1117 électeurs ont porté leur suffrage sur ma candidature (…). Je les remercie chaleureusement de m’avoir accordé leur confiance. Pour la gauche que je représente, cela correspond à une nette progression par rapport à 2007. (…) Dans notre circonscription, c’est l’ensemble de la gauche qui progresse. Je m’en réjouis. A présent, nous devons tout faire pour battre la droite. A cet effet, j’appelle tous ceux qui m’ont accordé leur suffrage à soutenir la candidature de Nadine Soccio, en lui apportant leur voix lors du second tour. »

Josiane Nervi-Gasparini, candidate elle aussi pour le Front de gauche mais dans la 1 (Strasbourg-centre), appelle à « battre la droite »:

« Je tiens à remercier les 2326 électeurs de la première circonscription du Bas-Rhin qui ont porté leur voix sur ma candidature. Ce score de 7% confirme l’implantation du Front de Gauche sur Strasbourg. Avec ce résultat, nous sommes en quatrième position et ce pourcentage nous place légèrement au-dessus de la moyenne nationale du Front de Gauche. (…) Faire obstacle aux politiques d’austérité, c’est d’abord battre la droite au second tour des élections législatives puis changer la gauche dans les cinq années qui viennent. J’appelle les électeurs à se mobiliser dans ce sens dimanche prochain. »

Aucun candidat UMP ne prendra le risque de s’allier au FN

Le message des candidats du Front National, qui comptabilisent entre 9 et 13% des suffrages à Strasbourg, en direction de leurs électeurs est bien différent. Christian Cotelle, secrétaire départemental du FN et candidat aux législatives à Sélestat, confie qu’il ne demandera pas de dérogation à Paris pour soutenir l’un ou l’autre des candidats au second tour. Il s’explique :

« Aucun candidat de l’UMP n’a pris position en faveur de l’une ou l’autre des propositions qui nous tiennent à cœur – dose de protectionnisme, fin du droit du sol au profit du droit du sang, etc. De la même façon, il n’y a aucun candidat qu’on doit faire battre absolument. Il n’y aura donc aucune consigne de vote. Nos électeurs vont soit se reporter sur l’UMP pour barrer la route à la gauche, soit ne pas aller voter. Peut-être quelques-uns voteront-ils pour le PS… A titre personnel, je n’ai pas pris de décision. Peut-être que je vais voter blanc, ou pas. Antoine Herth (député sortant UMP) n’a pas besoin de ma voix et je n’ai rien contre Daniel Ehret (EELV-PS) que j’ai croisé sur les marchés… »

Ce qui est sûr pour Christian Cotelle, c’est que les candidats UMP en difficulté à Strasbourg, Jean-Philippe Maurer et André Schneider, ne l’appelleront pas pour lui demander un soutien. « Même s’ils le voulaient, ils ne prendraient pas le risque que ça se sache et d’être sanctionnés par leur parti… »

Les abstentionnistes détiennent la clé du scrutin dans les 2ème et 3ème circonscriptions

Mais, pour un observateur qui tient à rester discret, les reports de voix ne sont pas les seules clés du scrutin. Dans un contexte de forte abstention (50% environ), ce sont les abstentionnistes qui feront la différence… s’ils se mobilisent. Il explique:

« Les voix écologistes et celles du Front de gauche devraient se reporter sans difficulté sur les candidats de gauche. Alors que celles du FN ne représentent pas un vrai réservoir de voix pour la droite. Dans la 3e circonscription, tout l’enjeu pour André Schneider va être de mobiliser son électorat qui, au vu des bons chiffres d’Andrée Buchmann (EELV-PS), n’est pas allé voté en masse au premier tour. Dans la 2e, le potentiel des abstentionnistes est moins favorable à Jean-Philippe Maurer. En plus, Philippe Bies, qui colle bien à la sociologie de la circonscription, bénéficie de la dynamique politique – c’est lui qui est arrivé en tête. »

Le jeu des pronostics

Alors nous aussi, nous avons sorti nos calculettes et nous nous livrons au jeu, risqué, des pronostics. Nous avons pris comme hypothèses une participation identique au premier tour et un report des voix total des écologistes, du front de gauche et de toute l’extrême gauche (LO, POI, PPLD…) sur le candidat socialiste. Nous avons aussi ajouté 10% des voix du FN. A droite, nous avons crédité le candidat en tête des voix du MoDem, des candidats Divers-Droite et de 40% des voix du Front National.

Avec ces calculs, Armand Jung (PS) l’emporterait dimanche dans la première circonscription avec 62% des voix contre Anne Hulné, qui ne bénéficierait que du report des voix du MoDem et d’une partie des voix du FN.

Si tous ceux qui ont voté à gauche choisissent Armand Jung dimanche, le député socialiste peut arriver jusqu'à 62% des voix dans la première circonscription.

La partie est plus serrée dans la deuxième circonscription, mais là encore, les réserves de voix à gauche pourraient permettre à Philippe Bies (PS) de l’emporter avec 54% des suffrages.

Les réserves de voix à gauche nettement plus importantes qu'à droite.

Dans la troisième circonscription en revanche, l’avance du député sortant André Schneider (UMP) devrait lui permettre d’être reconduit à l’Assemblée nationale par 51% des votants, même si toute la gauche vote Andrée Buchmann dimanche prochain.

La troisième circonscription du Bas-Rhin ne devrait pas basculer dimanche.

#Eric Schultz

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