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Ce qu’ils aiment et ce qu’ils détestent à la Foire européenne

Elle marque la rentrée politico-économique alsacienne depuis 1926. Du 7 au 17 septembre, quelque 200 000 visiteurs devraient se presser dans les allées de la 80e Foire européenne de Strasbourg et un millier d’exposants y faire leurs affaires pour plusieurs mois. Huit commerçants, habitués ou institutionnels, se sont prêtés au jeu du « j’aime / je n’aime pas » et nous livrent un portrait en creux de cet événement incontournable.

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Ce qu’ils aiment et ce qu’ils détestent à la Foire européenne

Laurence P., documentaliste, trentenaire et mère de famille, visiteuse régulière

Ce qu’elle aime : « J’adore les démonstrateurs ! La Foire rassemble ce genre de produits qu’on ne trouve pas ailleurs : des épluche-légumes incroyables et autres accessoires de cuisine révolutionnaires ; des produits d’entretien, des Tupperware, le Thermomix… qu’on ne voit que rarement en magasin. Un autre passage obligé : le hall aménagement de la maison et ses cuisines et canapés design, ces tables qui se plient douze, mais aussi le concours Lépine qui m’amuse beaucoup, ou la mini-ferme avec les animaux, quand je suis accompagnée de l’un de mes enfants. L’entrée est un peu chère pour un endroit où l’on ne vient que pour consommer mais c’est mon petit plaisir de l’année ! »
Ce qu’elle n’aime pas : « Les odeurs de graillon, les stands de nourriture qui présentent toujours la même chose… Et puis le monde. J’essaie d’y aller le dimanche à l’ouverture ou en semaine quand je peux. Je trouve que le pays invité n’apporte pas grand chose, sinon les mêmes babioles made in China qu’on retrouve sur n’importe quel marché. Et le tram qui passe en plein milieu de la Foire… »

Une journaliste, qui reste anonyme et qui a couvert l’événement plusieurs années consécutives

Ce qu’elle aime : « Les organisateurs de Strasbourg Évènement qui se cassent la tête pour faire quelque chose de sympa avec une manifestation old school, voire obsolète. Chaque année, ils jouent la carte de la modernisation, en créant une appli pour smartphone et des jeux, en invitant un pays qui fait rêver… Et ils ne trainent pas la patte, alors qu’en tant que journaliste, c’est rapidement barbant… »
Ce qu’elle n’aime pas : « Il fait 40° dans les halls qui sont vieillots ! Au Jardin des délices, là où tout le monde se concentre, ça pue, toutes les odeurs des restaurations se mélangent et pourtant les gens viennent souvent à la Foire rien que pour ça… Je ne vois vraiment pas l’intérêt de manger dans cette ambiance étouffante ! Ce que je n’aime pas non plus, ce sont les méthodes commerciales agressives des exposants. Et ce n’est pas que chez les démonstrateurs… On ne peut pas faire un pas sans être interpellé, c’est fatiguant. Cette année, je ne le couvrirai pas et donc… je n’irai pas ! »

Robert Grossmann, ex-Président de la communauté urbaine de Strasbourg, conseiller municipal UMP

Ce qu’il aime : « Le hall de l’artisanat, avec ses objets singuliers et traditionnels, et les stands du pays invité, qui sont un espace d’authenticité, avec une ambiance sympathique… J’apprécie aussi beaucoup l’inauguration, mais seulement si les intervenants ne sont pas des seconds couteaux et que leurs annonces sont de qualité. Un ministre qui ne vient que pour flatter les Alsaciens comme il y a 15 ou 20 ans ne m’intéresse pas ! »
Ce qu’il n’aime pas : « Que la Foire, qui remplissait un rôle important de présentation des produits à sa création, ressemble aujourd’hui à un immense supermarché de province, qui n’a pas grand chose d’européen ! Avec Fabienne Keller [maire de Strasbourg de 2001 à 2008], nous avions un grand projet de parc expo à côté du Zénith qui aurait permis de moderniser la Foire. Aujourd’hui, il faut trouver un nouveau concept, en incluant notamment les nouvelles technologies, avec des stands comme Apple ou autre… Car ce qui se passe, c’est que les exposants désertent d’année en année les halls et sont remplacés par des institutionnels dont les espaces sont de plus en plus grands. »

Le clip de la Foire Européenne

Jacques Bigot, président de la CUS, maire PS d’Illkirch-Grafenstaden

Ce qu’il aime : « Les souvenirs de la Foire quand j’étais enfant et dont j’adorais l’ambiance festive. Aujourd’hui, j’apprécie surtout les stands d’artisanat et le concours Lépine, quand mon emploi du temps me permet d’aller y faire un tour. Je trouve que les rencontres institutionnelles ont leur intérêt, que les stands des collectivités font partie de l’attractivité de la Foire, mais qu’il faut maintenir un équilibre avec le côté commercial pour que le public y trouve son compte. La Foire a encore sa raison d’être (ne serait-ce que) parce qu’elle reste une composante importante du chiffre d’affaires de Strasbourg Événement. Avec l’évolution du quartier Wacken, le modèle de la Foire des années 2014-2016, pendant les travaux, reste encore à trouver. »
Ce qu’il n’aime pas : Jacques Bigot aime tout.

Jean-Marie Malaisé, gérant d’Alsace Machines à coudre, exposant à la Foire depuis 30 ans

Ce qu’il aime : « La Foire est une énorme vitrine ! Ce sont les gens qui se déplacent, qui peuvent comparer sur place entre les différents stands, c’est un autre rapport à la clientèle. Ce qui est très intéressant pour nous, c’est que nos boutiques sont proches, à Strasbourg et Colmar, donc les gens qui n’avaient pas prévu de budget pour acheter sur la Foire peuvent revenir quelques mois plus tard. On a des retours tout au long de l’année. Ce j’apprécie aussi, c’est de pouvoir prendre la température des affaires au jour le jour avec les autres exposants, de pouvoir passer d’un stand à l’autre… »
Ce qu’il n’aime pas : « Notre nouvel emplacement ! Depuis quelques années, nous sommes installés à l’arrière du Hall Rhenus, avec les démonstrateurs, les vendeurs de vêtements ou autre. C’est ennuyeux car il y fait très chaud et il y a beaucoup de bruit. Alors que pour faire un bon chiffre d’affaires dans notre branche, il faut que nos clients puissent être au calme pendant une heure, puissent écouter nos explications techniques… Avant, nous étions dans le Hall 5 (l’ancienne patinoire). C’était bien plus lumineux, on pouvait mieux mettre en valeur nos produits. Ce qui m’ennuie aussi, c’est que les affaires sont plus dures d’année en années. Les gens viennent moins pour acheter comme dans le temps et plus pour faire une sortie, pour se divertir. Chaque année avant la foire, on a le stress de savoir si l’on va rentabiliser les 4000€ du stand ! »

Nadia C., commerçante de 39 ans, mère de trois enfants, habituée de la Foire

Ce qu’elle aime : « Découvrir en avant première certains produits, comme la Smart il y a déjà pas mal d’années ! J’aime aussi les inventions et la restauration du pays invité. J’adore me balader dans le hall des démonstrateurs qui sont de vrais acteurs, même si je n’achète jamais rien. J’aimais bien les caravanes et camping cars qu’on pouvaient visiter, mais il n’y en a plus depuis quelques temps. Ce qui nous plait aussi, c’est que c’est une sortie en famille. D’année en année, il y a de plus en plus de propositions pour les enfants et notamment au hall des sports, où ils peuvent faire de l’acrobranche ou essayer des sports inhabituels comme l’escrime.
Ce qu’elle n’aime pas : « Les camionnettes de produits alimentaires bas de gamme qui empestent ! »

Fabienne Keller, ex-maire de Strasbourg et sénatrice du Bas-Rhin

Ce qu’elle aime : « La Foire, c’est une ambiance de rentrée, un rite, un moment de rencontre économique et politique. J’aime aller dans les allées, avant ou après un moment plus officiel – discours d’inauguration, journées dédiées à l’artisanat, aux maires – pour échanger avec les gens de manière informelle, en tant qu’élue et à titre personnel, un peu les deux. Pour l’anecdote, j’adore les démonstrateurs et leurs balais magiques, leurs produits miracles qui ne fonctionnent jamais une fois essayés à la maison. Tout ça fait partie du folklore, de même que le jambon et les knacks à goûter au jardin des délices sur lesquels je ne fais jamais l’impasse… »
Ce qu’elle n’aime pas : « La vétusté des halls. La Foire mériterait d’être mieux accueillie, même s’il s’agit d’une situation provisoire.

Jean-Luc Heimburger, président de la Chambre de commerce et d’industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin, ancien exposant paysagiste à la Foire

Ce qu’il aime : « Historiquement, la Foire est un important moment de découverte de l’activité des artisans, des entreprises, du monde agricole… Quand j’avais 10 ou 12 ans, c’était une grande sortie du dimanche en famille pour voir les engins de travaux publics, les vendeurs de toutes sortes… Ce qui est très bien, c’est que les visiteurs y viennent quand ils ont un besoin : changer une literie, se renseigner sur des panneaux solaires, comparer trois ou quatre propositions. A titre personnel, j’apprécie surtout les stands des entreprises ou le concours Lépine, pour y découvrir des idées et des produits innovants. »
Ce qu’il n’aime pas : « Le sentiment que les camelots, les vendeurs de babioles, soient un peu trop nombreux. Présent au conseil d’administration de Strasbourg Evènements, l’organisateur de la Foire, je suis de ceux qui pensent que la représentativité du monde économique alsacien devrait être renforcée. En 2015 ou 2016, quand le nouveau Parc des expositions sera opérationnel, il faudra donner un nouveau cachet à cette foire, pour quelle ne devienne pas une foire à gadgets avec un petit « f ». Strasbourg a besoin de quelque chose de mieux ! »

Y aller

La Foire européenne de Strasbourg se déroule au Parc des expositions du Wacken à Strasbourg, du 7 au 17 septembre. Accessible en tram B (direction Hoenheim gare) et E (direction Robertsau Boecklin), arrêt Wacken. Site web. Plan interactif de la foire.


#Fabienne Keller

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