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Aide aux ados gays, Le Refuge débute et cherche un toit à Strasbourg

L’association Le Refuge a ouvert une antenne à Strasbourg le 26 mars. Dans les locaux de La Station, centre de rencontre et d’écoute pour les gays et lesbiens de Strasbourg, une quinzaine de bénévoles accueille et conseille de jeunes homosexuels en rupture avec leur entourage.

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Le Refuge

De gauche à droite, Philippe Marx, Mickaël Weiss et Jimmy Claudel, les bénévoles et le responsable du Refuge à Strasbourg. (Photo MG / Rue89 Strasbourg)
De gauche à droite, Philippe Marx, Mickaël Weiss et Jimmy Claudel, les bénévoles et le responsable du Refuge à Strasbourg. (Photo MG / Rue89 Strasbourg)

Derrière le 7 rue des écrivains et la vitrine au drapeau arc-en-ciel de La Station, il existe une toute nouvelle association. Dans ce lieu spacieux et lumineux, un petit coin cafet’ au mur placardé d’affiches contre l’homophobie sert de QG pour les bénévoles de l’association Le Refuge. Elle a pour but d’accompagner de jeunes homosexuels entre 16 et 26 ans qui rencontrent des difficultés lors de leur coming-out, une étape parfois difficile à réaliser. Selon le Conseil Economique, Social et Environnemental, le taux de tentatives de suicide chez les hommes homosexuels de moins de 25 ans était de 27 à 30% en 2013 et de 25% chez les femmes homosexuelles.

L’antenne strasbourgeoise de l’association nationale d’aide aux personnes homosexuelles a ouvert le 26 mars. Selon le siège national du Refuge, il y avait un réel besoin sur Strasbourg, comme l’explique Jimmy Claudel, responsable bas-rhinois du Refuge :

« Durant la campagne nationale d’appels au dons de 2013 pour Le Refuge, le siège de l’association à Montpellier a pointé une dizaine de jeunes en besoin d’hébergement sur Strasbourg. Ils les avaient contacté grâce à la ligne d’urgence (06 31 59 69 50). »

A 16 ans, Jimmy Claudel s’était lui-même posé des questions à l’annonce de sa sexualité à son entourage. C’est ainsi qu’il avait découvert l’association en cherchant sur internet. Il n’avait pas eu besoin de faire appel à eux, mais il a continué de suivre de près leurs actions. Voilà pourquoi, à 22 ans, il a décidé de lancer la création d’une antenne strasbourgeoise il y a un an :

« Je pensais que les démarches administratives avec Le Refuge ne prendraient que quelques mois, mais il a fallu aller de réunions en réunions et convaincre les dirigeants de l’association du besoin d’une telle structure sur Strasbourg. J’ai mené une véritable enquête de terrain. Tout d’abord, j’ai contacté les associations LGBT qui ont évalué l’utilité du Refuge en Alsace car elles étaient à l’écoute des personnes homosexuelles. Puis, j’ai estimé le nombre de jeunes à accueillir. Ils étaient 7 jeunes à avoir besoin d’un hébergement. Enfin, j’ai trouvé des entreprises partenaires pour permettre l’accueil d’urgence et des repas à bas coût. »

Déjà trois jeunes hébergés

Jimmy Claudel a noué des liens avec L’Étage, association qui accueille des jeunes en voie de désocialisation dans le but de les réinsérer, pour participer au projet en mettant à disposition leur restaurant. Les appartements-hôtels Victoria Garden assurent quant à eux l’hébergement d’urgence.

Affiche de campagne du Refuge (doc remis)
Affiche de campagne du Refuge (doc remis)

L’antenne démarre tout juste mais les bénévoles ont déjà commencé à travailler. Trois jeunes ont ainsi été accueillis et entourés par Jimmy Claudel :

« Nous leur offrons une oreille attentive. Ici, ils peuvent avoir confiance. Ils ne se sentent pas jugés et parlent librement. En plus d’un suivi psychologique, on les aide pour tout ce qui est administratif : recherche d’emploi, écriture de CV…  À leur demande, l’association peut entamer une médiation avec les familles. »

Pour des cas plus graves, notamment lorsque la santé de la personne est en jeu, les hébergements d’urgence sont utilisés. Les appartements-hôtels Victoria Garden permettent l’accueil d’une personne pour 6 mois, renouvelable une fois. En contrepartie, l’association demande une compensation financière en fonction des revenus du jeune accueilli. Pour Mickaël Weiss, 34 ans et bénévole, le but est de les rendre autonomes :

« On veut leur donner des pistes pour qu’ils s’assument et qu’ils acceptent ce qu’ils sont. Mais à l’heure où des dirigeants politiques nous traitent « d’abomination« , c’est extrêmement difficile. »

« Il y a 10 ans, on vivait mieux »

Pour Mickaël, les discours ambiants sont de plus en plus durs à l’encontre de la communauté LGBT. Une montée de la haine et de l’homophobie qui ne favorise pas l’acceptation de soi pour les adolescents :

« Les manifestations contre le mariage pour tous, les actions de Civitas, les « veilleurs de nuit » qui continuent leurs marches le soir à Strasbourg, toute cette atmosphère m’a mis en colère. Le jeune qui découvre qu’il est gay en 2014, il va falloir qu’il s’accroche ! Il y a 10 ans, on vivait mieux ! J’entends de plus en plus régulièrement parler de suicide.  Et, c’est pourquoi j’ai décidé de rejoindre l’association et de devenir bénévole. »

Sur les réseaux sociaux, se propage aussi une déferlante de propos haineux. Le refuge et son action n’ont pas été épargnés :

(Capture d'écran / Twitter)
(Capture d’écran / Twitter)
(Capture d'écran / Twitter)
(Capture d’écran / Twitter)

Selon Yohann Roszévitch, le président de SOS homophobie, les actes homophobes enregistrés par l’association auraient nettement augmenté en 2013 à la suite du débat pour le mariage pour tous. Le bilan définitif de 2013 ne sera communiqué que le 14 mai, mais déjà 3 500 signalements d’actes homophobes ont été enregistrés, contre 1 977 en 2012.

À la recherche de financement

4 000€, c’est le budget estimé de l’association strasbourgeoise. Elle ne reçoit pour le moment aucune subvention, le siège national du Refuge a pris en charge l’hébergement des premiers adolescents. Actuellement basé dans les locaux de La Station, Jimmy Claudel est à la recherche d’un nouveau lieu d’installation :

« Pour préserver l’anonymat des personnes qui viennent nous rencontrer, nous aimerions trouver un emplacement plus discret. Mais, pour cela, il faut attendre que l’association récolte quelques subventions et s’installe un peu plus dans le temps. »

L’heure est donc aux dernières démarches vers les élus de Strasbourg pour présenter le Refuge et espérer un prêt de local de la part de la mairie. Jimmy Claudel doit ainsi rencontrer dans les prochains jours Fabienne Keller, sénatrice UMP, et Mathieu Cahn, adjoint au maire de Strasbourg, en charge de la vie associative. Quant aux subventions, il faudra attendre 2015 pour pouvoir en demander car les dossiers pour celles de 2014 sont déjà clos. Mais un couple gay qui se marie en mai a demandé à ses invités de ne pas offrir de cadeaux pour faire un don au Refuge de Strasbourg à la place.


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