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Ce qu’il faut savoir avant la dernière réunion sur les Bains

Avant la dernière réunion publique sur l’avenir des Bains municipaux ce vendredi en présence du maire, plusieurs questions restent en suspens concernant le nouveau projet de rénovation.

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Ce qu’il faut savoir avant la dernière réunion sur les Bains

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La réunion publique du 30 octobre peut lever des doutes sur la rénovation des Bains municipaux (Dessin Guillaume Decaux)

La Ville reste propriétaire des Bains municipaux, boulevard de la Victoire à Strasbourg, mais tout ce qui s’y passe sera géré par un prestataire. En échange de cette chance de disposer d’un bâtiment historique à l’architecture exceptionnelle, le même prestataire devra payer la rénovation, évaluée aux dires des élus à 30 millions d’euros. Le bail sera très long et à prix symbolique.

Dans une charte, le maire a fixé comme garanties que les piscines et douches seront conservées, au même tarif qu’ailleurs dans l’agglomération. L’adjoint au maire en charge du dossier, Olivier Bitz (PS), a aussi affirmé que bains et sauna continueront d’exister, même si le prix d’entrée reste à définir.

Tout le monde n’est pas d’accord avec ces changements, mais c’est le « cadre » qu’avait fixé la municipalité en juin, qui cherche à réduire ses effectifs et n’aura plus une trentaine d’agents sur le site. La consultation doit porter sur que faire dans ces espaces. Avant la dernière réunion publique, censée influencer les études en cours de rédaction sur l’utilisation future de l’équipement de prestige, plusieurs points restent à trancher. Les participants au débat auront-ils leur mot à dire ?

Qui ?

Il semble acquis que le lieu sera confié à un prestataire unique. Olivier Bitz s’est toujours déclaré ouvert à toute possibilité. La question serait de savoir quelles entreprises la Société publique locale des Deux-Rives démarche actuellement. Des établissements de luxe ou des entreprises issues de l’économie sociale et solidaire, ou encore des mutuelles, comme évoqué ? Impossible d’en savoir plus auprès d’Olivier Bitz sur les contacts noués à ce stade. L’étude de la SPL est attendue pour la fin de l’année.

Quoi ?

C’est – officiellement – le but de la consultation. Que faire des parties actuellement inutilisées ou non accessibles au public, notamment le parking dans la cour arrière, mais aussi des bureaux, qui représentent 5 000 m², soit la moitié de la surface ? Les deux premières réunions se sont assez peu portées sur ces questions, mais plutôt sur l’accessibilité future ou non des bains romains et du sauna. Olivier Bitz reçoit aussi des contributions sur la page dédiée du site de la Ville de Strasbourg, qui ne sont pas publiées pour le moment.

Parmi les pistes déjà entendues : un restaurant dans l’actuelle chaufferie, un centre de formation pour les intervenants de Sport sur ordonnance, mais aucune n’est définitive…

Option présentée le 16 octobre, la municipalité prévoit davantage de créneaux pour les activités du sport sur ordonnance. Pour Liane Zoppas, membre du collectif citoyen La Victoire pour tous, qui suit de très près les débats, c’est le signe que les militants pèsent sur la décision :

« L’idée d’y mettre le sport sur ordonnance, nous l’avions évoqué dans notre tribune, publiée sur Rue89 Strasbourg le 16 février 2015, avant les annonces de la municipalité. Peut-être vont-ils aussi reprendre l’idée de la “bière des Bains” et nous trouver un brasseur mécène ? »

En revanche, l’idée d’une piscine extérieure (de natation ou de loisir) évoquée dans une étude du cabinet Ingeniérie Sportive et Culturelle en 2009 n’a jamais été mentionnée en 2015. Mais Olivier Bitz explique qu’elle n’est pas définitivement exclue et que tous les travaux, quand bien même ils n’avaient pas été validés par le maire et son premier adjoint en 2009, sont étudiés.

Le « coût constant pour la collectivité » ?

La Charte de rénovation des Bains évoque des travaux « à coût constant » pour la collectivité. En 2014, le budget de fonctionnement était de 2,9 millions d’euros. Un montant qui étonne les membres du collectif, qui se rappellent d’un coût annoncé entre 1,2 et 1,8 million d’euros vers 2010. À cela, on peut déduire des recettes de 405 000 euros en 2014.

Voilà qui rappelle les investissements privés conseillés dans le cadre du partenariat public-privé proposé en 2011. Dans ces conditions, certes la rénovation ne justifie pas de nouvelles dépenses, mais ne permet pas d’économies, alors qu’il n’y aura plus d’agents de la collectivité sur place. Olivier Bitz explique :

« Cela veut-il dire que la municipalité continuera à prendre en charge l’exploitation du site comme on le fait quand un service public est géré par un association. »

La tentation de l’hôtel de luxe

La crainte d’un établissement haut de gamme, qui rendrait les parties réhabilitées inaccessibles, a été maintes fois évoqué. Il n’a été ni rejeté ni confirmé dans le nouveau projet. Une telle option fait aussi redouter de grands bouleversement à la Krutenau, qui reste un des rares quartiers près du centre-ville encore mixte socialement. Des établissements comme la Maison Mimir et l’hébergement d’urgence pour SDF rue Fritz-Kiener survivraient-ils à l’arrivée d’un hôtel de luxe ?

La question des nouvelles activités pose celle du futur rapport de force pour Bernard Aghina, membre du collectif La Victoire pour tous :

« Si le prestataire doit prendre en charge une piscine déficitaire et en plus payer des millions d’euros de travaux, quelles seront les marges de manœuvre pour la municipalité ? En Allemagne, comme à Darmstadt, les municipalités ont pris en charge elles-même les travaux, ce qui permet de pouvoir mettre le prestataire dehors très facilement si cela ne convient plus. Ici, ce ne sera pas le cas, un bail emphytéotique est très long. Le prix des bains et sauna ne peuvent pas être augmentés à 30 ou 50 euros, car personne ne pourrait y aller. Donc pour compenser, il faudra des activités très rentables. C’est pour cela que l’on peut craindre un hôtel de luxe dans la cour arrière. »

Dans l’opposition municipale, Jean-Philippe Vetter (LR) se mobilise contre l’installation d’un prestataire privé dans les lieux. Toute sa famille politique ne partage pas cette position, mais il s’explique :

« Comme quand Leclerc a racheté la Coop, on a l’impression que la situation des Bains est un échec planifié. On a laissé l’établissement se dégrader, on a supprimé en 2010 la possibilité d’acheter des tickets pour les comités d’entreprises qui amenaient du monde, et puis l’année dernière, on a supprimé les abonnements de 10 entrées.

Toutes les piscines ont été rénovées dans le plan piscines sauf celle-là, la seule qui peut attirer des intérêts privés. Et dans l’engagement 41 de Roland Ries en 2014, la piscine de la Victoire devait y être. Qu’on privatise une partie de la Manufacture de tabacs, qui n’est pas une merveille architecturale, ça ne me choque pas. Pour la SIG, pareil. Mais pour les Bains, le secteur public se justifie, car un acteur privé changerait forcément la configuration du lieu. En investissant quelques millions d’euros, la Ville pourrait baisser le coût de fonctionnement et rendre le lieu plus attractif. Ce serait justement un motif d’attractivité de Strasbourg d’être la seule ville à avoir conservé des bains publics. L’abandonner serait une erreur incroyable. Parmi les élus de l’exécutif municipal, les opposants de 2011 semblent accepter un projet très similaire en 2015. Ceux qui ont pris du poids ont perdu leur voix. »

La rénovation de la piscine de la Victoire n'a jamais figuré dans le plan piscine de l'Eurométropole, mais était dans le programme de Roland Ries, candidat en 2014.
La rénovation de la piscine de la Victoire n’a jamais figuré dans le plan piscine de l’Eurométropole, mais était dans le programme de Roland Ries, candidat en 2014.

Les études ?

Enfin, le dossier des bains ne susciterait pas des craintes sans des études jamais publiées qui alimentent rumeurs et fantasmes sur leur contenu. Avec cette consultation, certains documents du passé ont enfin été rendus accessibles et soulèvent des questions. Pourquoi l’étude de 2009 n’a pas satisfait la municipalité, qui se base sur d’autres travaux réalisés par un proche de l’adjoint de l’époque, Robert Herrmann ? Pourquoi l’étude de 2010 attribuée à 348 000 euros, finalement facturée 101 892 euros n’est toujours pas publiée ? Olivier Bitz explique que les lois ont changé et que des montages de l’époque ne seraient plus possible ou qu’un partenariat public-privé comme envisagé à l’époque n’est plus souhaitable. Peut-être que « la synthèse actualisée » promise sera présentée lors du dernier débat…

Y Aller

Réunion publique sur l’avenir des Bains municipaux en présence du maire, vendredi 30 octobre à 19h, au Palais Universitaire place Brandt, salle Louis Pasteur, à Strasbourg.

 

Aller plus loin

Sur Rue89 Strasbourg : Etudes et copinages, les dessous troubles des Bains

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#Bains municipaux

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