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Le « magasin des suicides », une cacophonie convenue

Patrice Leconte nous revient le temps d’une parenthèse avec un film d’animation fantaisiste inspiré d’un roman de Jean Teulé. S’inscrivant directement dans cette mode actuelle de faire de l’animation avec des sujets adultes et plus pessimistes qu’habituellement, l’adaptation de ce roman à succès opte pour le choix artistique de l’animation, un genre que Leconte apprécie pour la liberté de création qu’il permet.

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Le « magasin des suicides », une cacophonie convenue

La famille Tuvache (DR)

BlogLe résultat est donc visuellement réussi, la 3D apporte même un léger bénéfice dans chaque plans usant d’une profondeur de champ assez remarquable en plus de receler d’une foule de détails aux seconds plans. Le film possède sa propre identité visuelle, sans citer ses mentors comme Tim Burton.

On peut toutefois rester circonspect quant au choix d’en faire un film musical tant cela frôle parfois l’inaudible ou le risible (la scène chez le psy, épuisante au possible). Mais certaines chansons, comme celle des nouveaux amants, kitschissime et rocambolesque dans le rendu encombré de coeurs et de papillons; ou bien encore celle des enfants dans le bus, restent très charmantes et harmonieuses.

La bande-annonce

Le problème qui se pose alors est un souci d’atmosphère générale où cohabitent des personnages plus cafardeux et altruistes les uns que les autres dans un univers terriblement mélancolique qui perd trop en saveur en s’égarant dans des chants suicidaires ou amusés. Cela dit, les personnages sont pour la plupart une réussite et Patrice Leconte a opté pour le choix judicieux de prendre des acteurs moins connus du grand public pour les doublages, tel Kacey Mottet Klein que l’on connaît pour sa présence dans le cinéma d’Ursula Meier (l’enfant d’en haut, sorti récemment).

Le long-métrage se révèle donc d’une efficacité inégale, en cause : la cacophonie éreintante par sa bande son ou les beuglements interminables (le passage avec la techno est le sommet des deux réunis). Pourtant, le film ne manque pas d’audace en tuant dès le début un personnage que l’on suivait depuis quelques minutes, puis tente maladroitement la subversion avec nibards dans la pénombre et clope dans la bouche d’un enfant, mais rien qui ne l’amène véritablement à dépasser son statut de film trop léger. Quelques touches d’humour (dont une autocitation bienvenue) viennent alors ponctuer cette histoire trop prévisible, mais ça ne suffit plus.

Ceci d’autant plus que le sujet assez noir consistant à inverser tout le système sociétal et le vocabulaire employé lasse vite, faute à une sur-exploitation de la carte de la dérision et les oppositions faciles type « Y’a de la joie » de Trenet en générique pendant que les corps tombent du ciel. C’est évidemment bien fait, mais ça reste trop évident voire enfantin (surtout l’idée du garçon qui sourit à contrario des autres dans ce monde lugubre). Ainsi, dans leur société, tout dès là naissance n’a pour but que la mort, mais tout se conclut dans un climax édulcoré avec dernière danse macabre où les morts reviennent pour célébrer la vie…

Attention délicate mais demeure l’impression finale d’avoir assisté à une oeuvre convenue.  Et si l’on pourrait au départ déconseiller le film aux plus jeunes, son hymne final à l’optimisme prenant à contrepied le livre peut faire revaloir cette idée. Un film d’animation plaisant en somme, mais sans surprise.

Y aller

Sortie nationale française le 26 septembre. Avant première le dimanche 26 août à l’UGC Ciné-Cité en présence de l’équipe du film


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