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En été, quels sont les coins frais et les coins chauds de Strasbourg

Coup de chaud Strasbourg ? Où se réfugier ? À quelques centaines de mètres près, la température en ville en été peut varier de plus de 10 degrés. Une étude a répertorié les écarts. Alors suivez le guide à l’heure où les épisodes de chaleur alsaciens seront de plus en plus long.

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En été, quels sont les coins frais et les coins chauds de Strasbourg

Ilots fraicheur Strasbourg 1
En quelques centaines de mètres à Strasbourg, les températures peuvent changer de plus de 10 degrés. Cliquer sur la carte pour l’agrandir (document ADEUS)

L’été, il fait chaud, ça d’accord. Mais la nouveauté, c’est qu’avec le changement climatique, les périodes de canicule en Alsace seront de plus en plus longues. En revanche elles ne seront pas plus chaudes que ce que l’on connait déjà.

À plus long terme, entre 2050 et 2100, le continent européen dans son ensemble pourrait se refroidir, car le Gulf stream, ce courant marin de l’Atlantique qui ramène de l’air chaud depuis le golfe du Mexique est menacé par la fonte des glaces. Ces projections sont encore débattues par les scientifiques, mais le terme de « réchauffement » climatique est bien mal choisi.

La température précise sur les toits

L’Agence de développement et d’urbanisme de Strasbourg (ADEUS) s’est penché sur la question des écarts de températures à Strasbourg. L’association de droit privé financée par les collectivités alsaciennes a profité de la mise en ligne gratuite de données de la NASA de ses images satellitaires. La bande thermique infrarouge permet de savoir quelle température il fait à la surface de chaque bâtiment et au sol, ce qui permet de ne pas être perturbé par d’autres facteurs comme le vent ou le gaz. Un peu de traitement avec une carte et le tour est joué.

Ensuite, place à l’expertise de la soixantaine de salariés pour analyser les informations et guider les politiques futures. Valentine Ruff, chef de l’étude, reprend les premières indications :

« Nous avons appelé cette enquête ilôts de fraîcheur et pas de chaleur, car nous pouvons mieux comprendre ce qui rafraîchit l’air ambiant. Pour les coins les plus chauds, il s’agit souvent de zones industrielles – le marché gare ou le port autonome – ce sont sûrement les matériaux et les toitures qui provoquent cela, mais nous devons affiner nos travaux sur ce point. »

Un parc produit de la fraîcheur sur 100 mètres à la ronde

Le jour des relevés, le 14 juillet 2013, la température à Strasbourg était de 22 degrés. Pourtant, les écarts sur la carte (cliquez dessus pour l’agrandir) sont souvent d’une dizaine de degrés, voire du simple au double à un kilomètre d’écart !

Sans grande surprise, il fait plus frais dans les parcs et idéalement près des forêts (Robertsau et Neuhof). Plus précisément, un parc peut baisser la température de 2,5 à 4 degrés. Il fait profiter des ses vertus jusqu’à 100 mètres à la ronde. Mieux, les cours d’eau participent au refroidissement de l’air. Combinés, un parc et un ruisseau peuvent rafraîchir les alentours jusqu’à 6 degrés.

De quoi dégager aussi des mesures de bons sens pour Valentine Ruff :

« Avec le plan canicule on recommande de passer deux à trois heures dans une salle climatisée. Mais pour des pensionnaires de l’Ephad (c’est-à-dire la maison de retraite ndlr) Bethesda, ils peuvent se rendre au parc du Contades où il fera tout aussi frais et où il y a de la vie. À l’avenir ce serait plus économe de placer ces établissements près des parcs plutôt que de consommer de l’énergie en climatiseur. Il y a aussi une école à proximité et on sait que les enfants sont aussi des populations sensibles. »

La maison de retraite de Bethesda est à quelques mètres du parc des Contades, l'un des endroits les plus frais de Strasbourg. (document ADEUS)
La maison de retraite de Bethesda est à quelques mètres du parc des Contades, l’un des endroits les plus frais de Strasbourg. (document ADEUS)

10 degrés d’écart entre le skatepark et le parc de Koenigshoffen.

Et selon les matériaux, le grand écart est vite fait. Le skatepark de la Rotonde est l’un des endroits les plus chauds à cause de l’importance du béton des rampes métalliques. Du coup, les as de la glisse laissent la planche à roulette au garage l’été. À quelques mètres, le parc des Remparts, derrière la gare, autre point chaud de la capitale alsacienne, est presque aussi frais que l’Orangerie.

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Autre constat, l’importance d’avoir de la terre à l’air libre pour absorber l’eau de pluie et restituer la chaleur. Des arbres seuls, sans pelouse autour comme le long de l’allée de la Robertsau, ne suffisent pas à rafraîchir significativement un endroit. À Schiltigheim, les jardins potagers ont peu d’arbres, mais ces terrains permettent de climatiser un peu l’entrée de la ville. En revanche l’ancienne brasserie Fischer, qu’Heineken souhaite revendre à des promoteurs immobiliers accuse de grosses chaleurs. Si les opérateurs veulent vendre des logements agréables, un peu de verdure devra accompagner les aménagements. Idem dans le centre-ville, la place de la République est agréable, là où ça chauffe place Kléber.

Accompagner l’urbanisation de la ville.

Ces résultats prennent tout leur sens à l’heure où le programme est « densifier » la ville, c’est-à-dire construire dans les espaces libres plutôt que de s’agrandir en dehors de Strasbourg. Guider et accompagner les politiques bas-rhinoises est justement l’une des missions de l’ADEUS.

L’importance des trames bleus et trames vertes dont on vous parlait lors de notre article sur la biodiversité est ainsi affirmée pour combattre les canicules à venir. De plus, la végétation permet aussi d’améliorer la qualité de l’air, un gros défaut de Strasbourg, en partie à cause de sa situation entre les Vosges et la Forêt noire, mais aussi son autoroute A35 qui traverse la ville, le chauffage de particuliers peu économe en énergie et un manque de volontarisme.

« 20% d’espace libre pour chaque construction »

Pour Valentine Ruff, augmentation et préservation de la qualité de vie ne s’excluent pas :

« Les nouvelles lois d’urbanisme prévoient que pour toute construction, il doit y avoir 20% d’espace libre avec un accès direct à la terre. Certains cabinets d’architectes ont compris que c’était un plus pour la qualité de vie, mais pour d’autres c’est plus difficile. Dans le secteur des Deux Rives, le nombre de places de parking a été abaissé pour cette raison et il y a des transports en commun. »

D’après une autre étude de l’ADEUS, l’accès à des espaces verts serait le deuxième critère lors d’un choix d’appartement, après la tranquillité, mais devant le prix.

En revanche il est plus compliqué d’ajouter de la verdure sur les espaces déjà construits, comme l’ancienne ville allemande (la Neustadt), à l’Esplanade ou encore autour des grands ensembles d’Hautepierre. Peut-être qu’en 2050, des jardins ou des fermes comme à New York naîtront sur les toits strasbourgeois, le poids de la terre demandera des aménagements.

Mais l’hiver ?

Mais cette fraîcheur bienvenue en été, n’entraînerait-elle pas des surcoûts de chauffage lors des rudes hivers alsaciens ? Pas si simple répond Valentine Ruff :

« Les températures sont plus homogènes puisque les arbres n’ont plus de feuilles. La surface de l’eau est plus froide, mais elle aurait tendance à se refroidir moins vite. Nous allons travailler sur ce point dans nos futures études, mais nous voulons d’abord approfondir ceux sur l’été. Voire si selon les étages la température change, croiser ces résultats avec d’autres facteurs comme le niveau de vie. »

Aller plus loin

Sur Adeus.org : l’étude complète de l’ADEUS


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