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« Bloquons tout » : brefs blocages à Strasbourg, 18 interpellations et une importante manifestation

Le mouvement « Bloquons tout ! » est passé à l’action ce mercredi 10 septembre. À Strasbourg, un groupe a bloqué la M35 pendant quelques dizaines de minutes. Des lycées ont également été bloqués. Une dizaine de personnes ont été interpellées. À Haguenau, une opération de tractage a eu lieu.

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Manifestation du mercredi 10 septembre place Kléber à Strasbourg.

Bonsoir et merci d’avoir suivi ce compte-rendu réalisé en direct. Ce sont au total cinq journalistes qui ont été mobilisées de 7h à 19h pour vous permettre de suivre les blocages et autres manifestations du mercredi 10 septembre à Strasbourg et en Alsace.

Ce travail reste en accès gratuit mais la mobilisation d’une équipe de journalistes coûte cher pour produire des informations fiables, rapides et en toute indépendance. Si vous appréciez cette démarche, optez pour un abonnement ou pour un don.

Les forces de l’ordre finissent par évacuer la place de la bourse et ses environs. Au moins deux personnes ont été interpellées au cours de l’opération pendant laquelle l’usage de gaz lacrymogène a été important.

Magdalena, mère parent d’élève du lycée Fustel. Son fils est ami avec deux des lycéens interpellés :

« Il y en a un que je connais très bien. Ce n’est pas du tout son style de se rebeller contre l’autorité. Je suis très en colère. Je trouve ces gardes à vue disproportionnées. Ce sont des mineurs. Je n’étais pas du tout inquiète que mon fils participe au blocage. Mais maintenant, j’ai la trouille que les flics chargent. Je suis venue sans masque sans rien donc j’ai un peu peur. »

Magdalena, venue en soutien aux lycéens interpellés, des amis de son fils.Photo : Line Baudriller / Rue89 Strasbourg

Les forces de l’ordre empêchent les manifestants et manifestantes d’accéder au commissariat du centre-ville de Strasbourg. Plus d’un millier de personnes entament un sit-in bloquant la circulation des voitures et des trams en scandant : « Libérez nos camarades ». Il durera une heure et demie.

Mobilisation pour les militants et militantes interpellées le mercredi 10 septembre à Strasbourg.Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg

Selon le décompte de notre journaliste sur le terrain, Thibault Vetter, près de 10 500 personnes ont participé à la manifestation du mercredi 10 septembre à Strasbourg. Laurent Feisthauer, secrétaire général du mouvement départemental CGT Bas-Rhin, évoque aussi plus de 10 000 manifestants. La préfecture du Bas-Rhin a estimé à 4 900 le nombre de participants à la mobilisation strasbourgeoise.

Plus de 10 000 manifestants selon la CGT. 4 900 selon la préfecture.Photo : Mathilde Cybulski

Les organisateurs de la manifestation ont demandé à la foule de se disperser, place de la République. Un cortège s’élance en direction du commissariat de la route de l’hôpital.

Plusieurs rendez-vous sont donnés en fin de manifestation. Le premier est celui de la prochaine assemblée générale du mouvement, le jeudi 11 septembre à 18h au parc de la Citadelle. Un second rendez-vous est annoncé le jeudi 11 septembre à 8h place de la gare.

La manifestation se termine place de la République avec des prises de parole, entre rendez-vous pour organiser les prochaines actions et discours appelant à faire perdurer le mouvement.Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

La CGT appelle à se rendre au commissariat de Strasbourg à 17h30 : « Nous nous retrouvons au comico pour essayer de libérer nos camarades étudiants. »

A la fin de la manifestation, la CGT appelle à se rendre au commissariat de Strasbourg.

Le cortège est arrivé place de la République, sa destination.

Des étudiants allument des fumigènes devant l’École doctorale des sciences de la vie et de la santé.

Eglantine Berthet, productrice de fruits et légumes dans le Sundgau et porte-parole de la confédération paysanne en Alsace :

« Le gouvernement n’a jamais répondu à notre colère sur le revenu des agriculteurs. Il a ignoré nos demandes sur le soutien aux installations, sur la sécurité sociale de l’alimentation et sur les prix planchers. Il a aussi fait preuve d’hypocrisie, que ce soit sur l’accord du Mercosur, sur l’abattage d’animaux en lien avec la dermatose ou sur la loi Duplomb. Les élus doivent prendre en considération le terrain et les demandes des paysans. »

Eglantine Berthet, porte-parole de la confédération paysanne. Photo : Thibault Vetter / Rue89 strasbourg

« À bas l’Etat, les flics et les fachos ». En tête de manifestation, un cortège étudiant scande des slogans anticapitalistes et antifascistes.

Bâtons de marche à la main, gilet jaune, foulard de la CGT et pancarte accrochée dans le dos, Gilbert, 88 ans, suit le cortège, à son rythme. Ses luttes portent sur la retraite et les Ehpad : « La gestion des Ehpad, c’est une catastrophe. Le personnel n’y est pas suffisamment nombreux. Et les salariés des maisons de retraite ne peuvent pas se révolter. »

Gilbert, 88 ans, suit le cortège, à son rythmePhoto : Line Baudriller / Rue89 Strasbourg

« Lecornu est un enfoiré, il ne fait que nous mépriser ! », scande le speaker de la remorque de la CGT. Sur un rythme de djembé, le slogan est repris par la foule.

Un drone survole la manifestation. En début d’après-midi, le tribunal administratif a validé l’utilisation de cet outil de surveillance malgré la procédure en référé liberté initiée par le Syndicat des Avocats de France.

Un drone survole la manifestation du mercredi 10 septembre.Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

Roseline, retraitée et Gilet jaune à Strasbourg, se souvient de sa première mobilisation à partir de la fin 2019 :

« Ce qui m’a mobilisée à l’époque, c’est la politique d’Emmanuel Macron : fort avec les faibles et faible avec les forts. Il a fait une politique antisociale en même temps qu’il a favorisé les riches, par exemple en enlevant l’impôt sur la fortune. Et maintenant on nous demande encore de nous serrer la ceinture. Moi, je vais perdre un abattement forfaitaire de 10% sur ma retraite. C’est inacceptable. Je suis pour une destitution de Macron et qu’il nous rende l’argent. »

Roseline, retraitée et Gilet jaune à Strasbourg, veut la destitution d’Emmanuel Macron.Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg

Vers 14h30, le cortège se dirige vers la place corbeau.

Laurent Feisthauer, secrétaire général de l’Union Départementale de la CGT, est satisfait face à l’ampleur de la mobilisation. Il appelle à poursuivre le mouvement :

« On a déclaré une manifestation pour que les gens puissent avoir un gros rendez-vous dans l’après-midi. C’est un succès. Et ce n’est pas la nomination de Sébastien Lecornu qui va calmer la colère. On va construire un mouvement de grève pour imposer la question sociale et la justice fiscale. Les gens nous le demandent. On doit imposer un tempo social. On ira jusqu’à faire tomber le gouvernement s’il nous ignore. »

Laurent Feistauer, secrétaire général de la CGT 67.Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg

« Je comprends la colère qui s’exprime. » La maire de Strasbourg (Les Écologistes) s’est rendue place Kléber pour exprimer sa solidarité avec la mobilisation du mercredi 10 septembre :

« Il me paraît important d’être présente aujourd’hui et je comprends la colère qui s’exprime, ce sentiment d’être méprisé par le Président de la République et par les gouvernements successifs dans un contexte de baisse du pouvoir d’achat. Ce sont des politiques budgétaires profondément injustes qui ont été proposés ces dernières années. La demande très forte de changement de cap politique qui avait été exprimée dans les urnes après la dissolution de 2024 n’a pas été entendue. Evidemment, la nomination de Sébastien Lecornu hier est un très mauvais signal voire presque une provocation. »

La maire de Strasbourg Jeanne Barseghian (Les Écologistes) s’est rendue place Kléber pour dire sa compréhension de la colère populaire.Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

Jeanne Barseghian appelle ainsi à un changement de cap qui se traduirait par « la mise en place de la taxe Zucman, le renforcement des services publics et une meilleure prise en compte des questions environnementales qui ont connu des reculs terribles du fait du dernier gouvernement. »

La place Kléber se remplit peu à peu.

Du campus universitaire, le cortège étudiant est en route pour la place Kléber.

Le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la requête du Syndicat des Avocat de France (SAF) concernant l’arrêté préfectoral autorisant le recours au drone dans la journée du mercredi 10 septembre à Strasbourg :

« Eu égard à l’importance et au caractère avéré des risques encourus ainsi qu’à la finalité poursuivie consistant en la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les mesures de surveillance contestées présenteraient un caractère manifestement disproportionné ou méconnaîtraient les exigences du droit au respect de la vie privée. »

Ce compte-rendu en direct est en pause jusqu’au départ de la manifestation de Strasbourg, dont le départ est prévu à 14h place Kléber.

À la mi-journée, voici les informations à retenir de cette première journée de mobilisation du mouvement Bloquons tout :

  • La M35 a été bloquée vers 8h pendant quelques dizaines de minutes, par environ 150 personnes qui s’étaient mobilisées dès 7h du matin,
  • Au moins trois lycées de Strasbourg (Pontonniers, Marie Curie et Fustel de Coulanges) ont été brièvement bloqués à l’ouverture des cours ce matin.
  • 11 personnes ont été interpellées par les forces de l’ordre pour des actes qualifiés de « rébellion », six dans le cadre de l’action visant à bloquer la M35, cinq lors des blocages des lycées Pontonniers et Fustel-de-Coulanges,
  • À Haguenau, une opération de tractage à destination des automobilistes a eu lieu dans le calme au rond point vers Schweighouse-sur-Moder, une manifestation festive a suivi entre la gare et le centre-ville,
  • Dans le Haut-Rhin, des manifestations se sont déroulées dans le calme à Colmar et Mulhouse.

Ce compte-rendu réalisé en direct est laissé en accès gratuit mais la mobilisation d’une équipe de journalistes coûte cher pour produire des informations fiables, rapides et en toute indépendance. Si vous appréciez cette démarche, optez pour un abonnement ou pour un don.

L’assemblée générale des étudiants, qui se tient depuis midi dans un amphi du bâtiment Le Patio, a voté contre la présence des journalistes. Il n’y aura donc pas de compte-rendu de la mobilisation des étudiant·es.

Selon les DNA, plus de 500 personnes se sont réunies en cortège à Colmar et se dirigent vers la mairie. À Moosch, dans la vallée de la Thur, un barrage filtrant a été mis en place au niveau du rond-point vers Thann.

Morgane (à gauche) et Lilit (à droite).Photo : Nicolas Thomas / Rue89 Strasbourg

Dans le cortège à Haguenau, Morgane, 16 ans, et Lilit, 17 ans, sont les seules lycéennes à avoir rejoint le rassemblement ce matin. « Lundi, les députés ont prouvé que le gouvernement Bayrou n’était pas légitime, affirme Morgane. Et hier soir, Macron a nommé un Premier ministre de son bord. Il continue à faire ce qu’il veut sans se préoccuper de l’avis des gens. On ne nous écoute pas. »

« Le gouvernement n’écoute pas sa jeunesse », abonde Lilit :

« Pourtant c’est nous l’avenir de ce pays, nous, les lycéens, les étudiants. Mais l’argent, il y en a de moins en moins pour l’éducation. On voit aussi nos enseignants qui souffrent de ces réformes. D’ailleurs, il y en a plusieurs devant nous, dans le cortège. »

Maxime Kieffer, secrétaire général du syndicat CGT cheminots de Strasbourg, détaille en marge de l’assemblée générale des cheminots :

« On a emmagasiné une colère contre le gouvernement et on apporte notre soutien au mouvement Bloquons tout. On veut faire entendre la voix des cheminots parmi celle des autres citoyens. Le P-DG de la SNCF est choisi par le gouvernement, donc il se fait porte voix des décisions gouvernementales. Le transport ferroviaire est ouvert à la concurrence qui bénéficie aux grands industriels au dépend des besoins des salariés et de la population en matière de transport, du service public qu’on défend ardemment. La grève et la mobilisation sont nos dernier recours mais nous sommes face a un mur, un gouvernement qui refuse d’entendre parce qu’il défend l’idée du capitalisme. »

À Haguenau, une manifestation se rend de la gare au centre-ville, sous escorte policière.

À l’usine d’incinération des déchets au Port-du-Rhin, une vingtaine de salariés sont en grève à l’appel de la CGT. Photo : CGT Sénerval

La maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian (Les Écologistes), sera présente à la manifestation prévue au départ de la place Kléber à 14h. Elle s’était félicitée de la démission du gouvernement de François Bayrou hier :

« Un gouvernement formé avec les perdants de la dissolution à hauts risques. Les citoyens comme les partis de gauche avaient pourtant pris leurs responsabilités en empêchant l’extrême droite de rafler la mise. Et ce gouvernement irresponsable n’a eu de cesse d’affaiblir le barrage républicain que nous avons bâti collectivement. Son budget de l’injustice qui privilégie les privilégiés, son budget d’étranglement des territoires, de rogne des services publics, de privation de soins, de repos, de culture ; son budget de mépris aura été son dernier. »

Une quarantaine de personnes sont réunies sur le premier quai de la gare de Strasbourg pour l’assemblée générale des cheminots. Certains arborent le chasuble de la CGT, d’autres celui de SUD Rail. Certaines personnes présentes ne sont pas cheminotes. « Aux chemins de fer, la seule façon qu’on a de bloquer, c’est de faire grève. C’est la seule manière de toucher le porte monnaie des plus riches », assure Louise, contrôleuse en gare de Strasbourg.

À la gare de Strasbourg, une assemblée générale s’organise à l’initiative de syndicats de cheminots. Photo : Line Baudriller / Rue89 Strasbourg

Une petite centaine de manifestants s’est rassemblée sur le parvis de la gare de Haguenau. Une quinzaine de policiers restent à distance. Les syndicalistes de la CGT présents au tractage du rond-point vers Schweighouse-sur-Moder sont présents. La plupart attendent de se rendre à la manifestation prévue à 14h à Strasbourg.

Sandra Regol, députée (Les Écologistes) de la première circonscription de Strasbourg, était présente avec les lycéens de Pontonniers ce matin. Elle réagit aux événements de ce matin.

Échauffourées au lycée des Pontonniers, alors que la police intervient pour débloquer à nouveau l’entrée du lycée situé dans la Neustadt de Strasbourg.

Selon les DNA, sept manifestants ont été interpellés ce mercredi 10 septembre. Un chiffre confirmé par la direction bas-rhinoise de la police nationale. Six parmi les manifestants qui ont bloqué la M35 alors qu’ils se trouvaient sur les Ponts-Couverts à la Petite France pour « refus de contrôle, rébellion » et « entrave à la circulation ». Une septième personne a été interpellée lors du blocage du lycée Fustel-de-Coulanges, pour un refus de contrôle.

Quelques dizaines de lycéens sont regroupés devant le lycée des Pontonniers à Strasbourg. Photo : Mathilde Cybulski / Rue89 Strasbourg

L’accès au lycée a brièvement été bloqué mais les cours ont pu se dérouler.

Paul est lycéen à Fustel de Coulanges :

« En tant que lycéens, ont ressent le besoin de se mobiliser. Les élites n’écoutent pas les gens, on ne se sent pas considéré. Le projet de budget, les livraisons d’armes à Gaza, ça nous dégoûte, c’est indécent et personne n’est d’accord avec ça chez nous. Et hier soir, Macron a encore mis un Premier ministre de son camp, alors que le gens ne veulent plus de cette politique. On a l’impression que c’est la fin de la démocratie. En tant que jeune ça fait peur, c’est notre avenir. Si on se mobilise pas maintenant, personne ne le fera, on a peur d’un basculement autoritaire encore plus important. Macron fait sa politique pour les riches. La démocratie ne fonctionne que si le peuple peut choisir. »

Une intermittente a participé aux actions de ce matin :

« Je suis maman, donc ça me fait peur de participer à une action, il ne faut pas qu’il m’arrive quelque chose, j’ai un enfant qui a besoin de moi. Mais aujourd’hui je suis présente, c’est aussi mon enfant qui me pousse à me mobiliser. Ce système de domination est insupportable. À un moment, il faut qu’il se passe quelque chose. Je crois profondément que les blocages peuvent avoir un impact positif. Mais pour que ça soit efficace, il faudrait que la population s’en saisisse et rentre en résistance. »

Fin de l’action de tractage au rond point entre Haguenau et Schweighouse-sur-Moder. Photo : Nicolas Antoine / Rue89 Strasbourg

Les militants de Bloquons tout de Haguenau se retrouvent désormais à 11h, place de la Gare dans le centre-ville de Haguenau. Selon notre journaliste sur place, une majorité d’entre eux compte se rendre à Strasbourg pour rejoindre la manifestation à partir de 14h.

Des manifestants de Bloquons tout et de la CGT tentent de mobiliser les automobilistes entre Haguenau et Schweighouse-sur-Moder.Photo : Nicolas Antoine / Rue89 Strasbourg

Léa, 46 ans, est professeure. Elle est présente parmi les manifestants sur le rond point entre Haguenau et Schweighouse-sur-Moder :

« On s’est chauffé à 18 degrés tout l’hiver dernier. On a des salaires corrects mais avec deux filles en études supérieures, c’est très difficile. Tous les ans on rogne de nouvelles choses : jus de fruits, biscuits, les sorties au restau, je fais mon pain moi même… J’en ai marre, parce que pour mes enfants je veux un monde plus juste. J’en ai marre, parce que je bosse, je dors. Ces mesures d’austérité, elles font mal à tout le monde : les enfants à l’école, les vieux dans les Ehpad, les malades dans les hôpitaux… Tout ça créé de la tension dans notre société, de la violence entre les gens. »

L’une des personnes interpellées ce matin a été relâchée. « Je suis venue voir si ça allait pour les personnes interpellées », témoigne-t-elle auprès de Rue89 Strasbourg :

« On était deux il y avait rien du tout, aucun danger, on leur disait que c’était pour prendre des nouvelles. Un policier m’a demandé de me présenter mon identité, j’ai dit non, que je ne l’avais pas sur moi. Il m’a bloqué le bras, je lui ai dit que ça me faisait mal, il réagissait pas. Il ont fouillé mon sac. »

Plusieurs cantines solidaires se sont réunies pour créer une « inter-cantine » afin de soutenir les manifestants de Bloquons tout à Strasbourg. Elle vient de passer ravitailler en café et en fruits les mobilisé·es au lycée Marie Curie. « Le soin c’est une manière de lutter, explique l’un des militants derrière les deux vélos-cargos, c’est une manière de faire durer le blocage. Parce qu’on sait que pour que le gouvernement accède à nos revendications, il va falloir qu’on tienne. »

Frédéric et Sandrine se sont mobilisés sur le rond point entre Haguenau et Schweighouse-sur-Moder.Photo : Nicolas Thomas / Rue89 Strasbourg

Frédéric, 34 ans, de l’union locale CGT Haguenau depuis 2016 :

« Les injustices sociales et fiscales et cette violence du gouvernement a créé un ras-le-bol général dans la population. En tant que syndicaliste, on le ressent énormément depuis quelque temps. Nôtre rôle à la CGT c’est de mobiliser ces gens pour créer un rapport de force avec le gouvernement. Et aussi avec les grands patrons qui applaudissent des deux mains la politique de Macron. Dans le secteur, c’est Indignons Nous Alsace Nord qui a lancé ce mouvement de citoyens. Nous on vient en soutien. C’est important de montrer qu’on est aussi dans les villes moyennes comme Haguenau. Que c’est pas qu’à Strasbourg ou Mulhouse. »

Sandrine, 54 ans, professeure et militante chez Sud Éducation :

« On est là parce que le gouvernement propose uniquement des politiques d’austérité en faisant croire qu’il n’y a plus d’argent en France. Pendant ce temps il fait des cadeaux fiscaux aux plus riches. Non seulement on ne redistribue pas mais on demande aux plus modestes de se serrer la ceinture, en exemptant les riches de cette participation. On dirait qu’on se rapproche de plus en plus de l’époque des seigneurs et des serfs. En tant que prof, je vois chez mes élèves une vraie angoisse permanente du futur. Ils sont constamment sous pression et pensent que leur avenir se joue à chaque note à cause de Parcoursup. Même ceux qui font des grandes études, je les retrouve quelques années plus tard, travaillant pour des entreprises qui participent à la destruction de la planète. Certains me disent que leur travail n’a aucun sens. »

Au moins cinq manifestants de Bloquons tout ont été interpellés à la Petite France, alors qu’ils sont poursuivis par la police depuis l’action de blocage de la M35 tôt ce matin.

Retrouvez ici les prévisions des actions publiques pour cette journée :

La distribution de tracts se poursuit sur le rond point entre Haguenau et Schweighouse-sur-Moder, toujours dans le calme par une vingtaine de militants. La police reste présente et surveille.
Photo : Nicolas Thomas / Rue89 Strasbourg

En terminale au lycée Marie Curie, Elliot n’en est pas à son premier blocage. Ses dernières années, il s’est mobilisé contre Parcoursup et pour la Palestine. Ce qui le met particulièrement en colère aujourd’hui, c’est le sentiment que la France « devient un paradis fiscal pour les ultrariches pendant que les pauvres s’appauvrissent ».

À ses côtés, deux camarades décrivent la pression à faire des études et le sentiment « que seuls les gosses de riches qui font des écoles prestigieuses et payantes trouveront du travail à la sortie ». « On revendique simplement un monde plus humain. Et un 10 septembre, jour de mobilisation nationale, la police est envoyée à peine le blocage commence. Tout ça au lieu d’écouter ce qu’on a à dire », conclut Elliot.

Les manifestants à Strasbourg se déplacent désormais entre la plaine des Bouchers et l’Elsau.

Nouveau gazage des manifestants par les forces de l’ordre, sur des voies de sortie de la M35.

Un groupe bloque la circulation entre le quartier de l’Elsau et de la Montagne Verte.

La police a été déployée au lycée Marie Curie de Strasbourg.Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg

Quelques klaxons et des « On vous soutient » s’échappent des fenêtres des voitures au rond-point D1062 / chemin de la Sandlach / rue du Clausenhof à Haguenau. Il n’y a pas de blocage mais une distribution de tracts par une quinzaine de personnes. Ce sont surtout des syndicalistes CGT puisque c’est l’union locale de la CGT qui est à l’initiative. Ils font une distribution de tracts mais pas de blocage. La police est déjà présente sur place avec 4 véhicules et une quinzaine d’agents.

Frédéric de la CGT de Haguenau :

« Les retours des automobilistes sont plutôt bons. Mais j’ai quand même l’impression qu’il n’y a pas encore de prise de conscience du mouvement. On remarque qu’il y a beaucoup moins de circulation que d’habitude, les gens ont sûrement pris leurs dispositions pour éviter se circuler ou alors ils ne travaillent pas. L’action sur le rond-point est à l’initiative de l’UL de la CGT mais des membres du collectif Indignons Nous Alsace Nord nous ont rejoint. Eux ils sont à l’initiative du rassemblement de 11h, place de la Gare à Haguenau. On ira les rejoindre tout à l’heure. »

Devant le lycée Marie-Curie, une lycéenne 16 ans, en première au lycée Kléber : « Je participe pour la première fois à un blocage. Je le fais pour les lycéens qui se sont retrouvés sans professeur à la rentrée. Pour celles et ceux de région parisienne qui étudient dans des locaux insalubres. Je le fais pour les étudiants précaires qui n’ont aucun soutien du gouvernement. »Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg
La M35 est désormais également bloquée dans le sens sud – nord à Strasbourg. Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg

Le trafic reste bloqué sur une partie de la M35, dans le sens nord-sud.

La police est rapidement intervenue pour rétablir la circulation.

Près de l’arrêt de tram de la Montagne Verte, des personnes mobilisées ont débuté un blocage routier.Photo : Thibault Vetter / Rue89 Strasbourg

À l’arrêt de tram de la Montagne Verte à Strasbourg, Lisa, étudiante, est présente pour participer au mouvement :

« C’est très important de se mobiliser aujourd’hui. Les gens ont tendance à se reposer sur nos acquis sociaux alors qu’on n’en a plus vraiment, ils tombent les uns après les autres. La mobilisation sociale va exploser à un moment ou à un autre, mais elle ne sera jamais équivalente à la violence systémique qu’on subit depuis des années. »

À l’arrêt de tram de la Montagne Verte, le député de la 2e circonscription du Bas-Rhin, Emmanuel Fernandes (LFI), est présent. Il réagit à la nomination de Sébastien Lecornu hier soir.

La nomination comme Premier ministre hier soir de Sébastien Lecornu, un fidèle d’Emmanuel Macron, qui dialogue avec l’extrême droite, pourrait être perçu comme une provocation par les manifestants de « Bloquons tout », qui avaient comme première revendication la démission de François Bayrou et la fin des mesures d’austérité imposées au plus grand nombre de Français.

Un autre arrêté pris par la préfecture du Bas-Rhin interdit les manifestations aux alentours des péages de Schwindratzheim (autoroute A4) et d’Ittenheim (autoroute A355, le GCO). La préfecture invoque des « risques sérieux pour la sécurité des personnes » étant donné que « le nombre de forces de l’ordre disponibles ne permet pas de mettre en place des dispositifs de sécurité suffisants ».

La préfecture du Bas-Rhin a pris un arrêté autorisant l’utilisation de drones de surveillance, à Strasbourg à partir de 13 heures. Selon nos informations, cet arrêté sera contesté devant le tribunal des référés dès 9h.

Bonjour et merci de rejoindre ce compte-rendu réalisé en direct. Les premières actions sont prévues à 7h du matin, notamment à Strasbourg et à Haguenau. Nos journalistes seront présents sur quelques unes d’entre elles.

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