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Municipales : Strasbourg passe en zone verte

En tête au premier tour, l’écologiste Jeanne Barseghian a largement remporté le second, en dépit de l’alliance LREM/LR qui aurait pu permettre à Alain Fontanel de combler son retard.

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Municipales : Strasbourg passe en zone verte

Avec 21 592 voix, Jeanne Barseghian devient la nouvelle maire de Strasbourg. À titre de comparaison, Roland Ries (PS) avait été élu avec 36 623 voix en 2014 dans une triangulaire face aux 35 114 suffrages de Fabienne Keller (LR ; ex-UMP) et un Front national loin derrière.

C’est donc avec une certaine prudence et modestie que Jeanne Barseghian, 39 ans, a accueilli ces résultats quelque peu inattendus :

« Aux personnes qui ne se sont pas déplacées ou qui n’ont pas voté pour notre projet, je veux les assurer que je gouvernerai pour et avec toutes les Strasbourgeoises et tous les Strasbourgeois, dans le respect, l’écoute et le dialogue. »

Les écologistes n’étaient pas favoris de l’élection à Strasbourg au début de la campagne à l’automne, ni après l’union LREM/LR face à eux en juin.

Mais entre les deux tours, les écologistes, qui terminent avec 41,7% des suffrages exprimés, ont nettement augmenté leur score (+8 060 voix). C’est cinq fois plus que les réserves « Strasbourg en Commun » (LFI et alliés), qui avaient appelé à voter Jeanne Barseghian. La liste écolo, travaillée depuis plus d’un an, a suscité de grandes attentes. L’exercice du pouvoir, avec une majorité où ils n’auront pas à dépendre d’un allié, sera très observé.

Jeanne Barseghian devant ses soutiens (Vidéo Alice Ferber / Rue89 Strasbourg)

Pour remporter la victoire, les écologistes ont confirmé leurs bons scores dans le quartier Gare ou Neudorf. « Strasbourg écologiste et citoyenne » a percé dans une grande partie de Cronenbourg, un bastion socialiste, mais aussi certains bureaux du Conseil des XV, à l’Est un coin en théorie plus à droite. Son pire résultat (13,48%) est à l’Orangerie, là où Alain Fontanel réalise son meilleur total.

La participation a été légèrement plus forte que le 15 mars. Elle s’élève à 36,66% contre 33,8% trois mois plus tôt.

On retrouve un peu moins de disparités entre les secteurs . Certains quartiers centraux se sont moins « surmobilisés » qu’au premier tour.

Vote Fontanel dans les bastions de droite

Pour « La République en Marche », Alain Fontanel l’emporte comme prévu dans les quartiers du nord, Robertsau-Orangerie-Tivoli-Wacken, les bastions habituels de la droite. Souvent sous les 50%, la droite ne fait pas le plein comme elle devrait. Ainsi, le retard accumulé ailleurs devient rédhibitoire.

Par rapport à mars, le premier adjoint sortant gagne aussi quelques bureaux du sud. Il s’agit du secteur où sont implantés les conseillers départementaux Jean-Philippe Maurer et Pascale Jurdant-Pfeiffer, qui l’ont rejoint via la fusion avec « Les Républicains ». Mais dans ces bureaux là, la participation a baissé, signe que la fusion n’a pas été complètement digérée. Le tandem s’effondre dans beaucoup de quartiers populaires.

Les vaincus devraient placer 11 opposants dans l’hémicycle, soit 6 de la liste LREM et 5 de la liste LR.

L’inconnue des transferts

Dans quelle mesure les transferts d’électeurs se sont-ils opérés ? Avec 18 099 voix, Alain Fontanel recueille moins de voix que l’addition de son score et celui de Jean-Philippe Vetter (18 510). À droite ou au centre, tout le monde n’a donc pas suivi cette union entre ex-majorité et ex-opposition.

Et la liste n’a pas bénéficié d’une dynamique venue des listes éliminées ou des nouveaux votants. « Unis pour Strasbourg » avait pourtant eu le soutien des deux anciennes têtes de listes « citoyennes. »

Chantal Cutajar et Patrick Arbogast. Pour les électeurs du Rassemblement national, plus proche de la droite sur l’échiquier, l’étiquette LREM a dû jouer l’effet d’un repoussoir. Pour le reste, il est plus difficile de savoir comment les électeurs ont migré.

À l’image de ses colistiers éjectés, Alain Fontanel a vraisemblablement perdu des soutiens au centre. Troisième, l’ancienne maire Catherine Trautmann (PS) est loin, mais gagne tout de même plus de 2 000 voix pour arriver à 12 080 suffrages, soit 23,33%. Tout comme il est possible qu’une partie de l’électorat de Catherine Trautmann de premier tour ait opté pour les écologistes en juin, pour faire barrage à la droite.

Comme en mars, les points forts de Catherine Trautmann sont dans les quartiers populaires. Hautepierre, Neuhof, le sud de Koenigshoffen ou la Cité de l’Ill lui fournissent des scores au-dessus de 30%, mais ces secteurs sont restés dans l’abstention massive, ce qui limite les gains. La liste « Faire ensemble Strasbourg » est très distancée dans des bureaux de vote du quartier Gare, point fort des écologistes et la Robertsau, trustée par la droite. Et où plus de citoyens se déplacent.

« S’agissant de l’abstention massive, je perçois de ces dernières semaines sur le terrain une véritable déprime sociale », a commenté la candidate.

Reconstruction socialiste

Catherine Trautmann a annoncé qu’elle comptait siéger dans l’opposition. Une période de reconstruction s’annonce pour le Parti socialiste local. Ni le mandat, ni la campagne n’ont permis de faire émerger de nouvelles personnalités.

Car même en dehors de Strasbourg, les Socialistes ont été battus dans leurs fiefs. À Ostwald, Jean-Marie Beutel ne fera pas de 5e mandat, battu par l’écologiste Fabienne Baas, qui s’était alliée à une liste de centre-droit. À Illkirch-Graffenstaden, le maire sortant mais intronisé en cours de mandat Claude Froehly a été battu par l’opposant Thibaud Philipps (LR, soutenu par LREM et Modem) dans une quadrangulaire. Ainsi se tourne la page Jacques Bigot au sud de Strasbourg.

Le test de l’Eurométropole

Les écologistes n’auront donc pas forcément besoin du Parti socialiste pour gouverner à l’Eurométropole. Ce sera d’ailleurs un premier test pour le mois de juillet. Les Verts strasbourgeois auront quelques soutiens à Schiltigheim et Ostwald, mais cela ne suffira pas pour avoir une majorité. Combien de maires de droite ou « sans étiquette » arriveront-ils à fédérer dans un projet ? Lors de l’échec des négociations avec le PS, Jeanne Barseghian avait insisté son souhait d’élaborer un projet « avec les 32 autres communes ».

Après avoir été traités par leurs adversaires, en vain, de « dogmatiques » et « incapables de s’allier » avec le PS, voici l’occasion de démontrer l’inverse. Certains maires l’ont bien compris et étaient présents sur la terrasse du TNS où les écologistes se réunissaient pour célébrer la victoire.

Jeanne Barseghian sera officiellement élue par ses pairs à Strasbourg, samedi 4 juillet à partir de 18h.

Quelques réactions

Robert Herrmann, président de l’Eurométropole

Alain Fontanel

Jean-Philippe Vetter


#Alain Fontanel

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