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Une amère hausse de charges pour les locataires de Hautepierre

À Hautepierre, le bailleur social CUS Habitat fait désormais appel à un prestataire pour nettoyer les halls d’immeubles. Cette augmentation de quelques dizaines d’euros par an inquiète des locataires dans un climat de défiance.

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Une amère hausse de charges pour les locataires de Hautepierre

Depuis toujours, pour les 2 700 locataires des Habitations à loyer modérés (HLM) de CUS Habitat à Hautepierre, la règle était de s’organiser entre voisins pour entretenir les parties communes, chacun étant co-responsable de la propreté de son palier. Même règle pour les rez-de-chaussée.

Depuis leur ouverture en 1971, les intérieurs des HLM de Hautepierre étaient entièrement entretenus par les habitants. (Photos JF Gérard / Rue89 Strasbourg / cc)

Effet des premières rénovations, la règle a changé depuis juin. Si les étages restent à la discrétion des habitants, c’est désormais un prestataire privé, choisi par CUS Habitat, qui fait le ménage dans les halls de tous ses immeubles. Avec 150 entrées à traiter chaque semaine, le nettoyage des HLM de Hautepierre stabilise un nouveau marché d’ampleur pour le prestataire CRENO, une entreprise adaptée, c’est-à-dire qui emploie des travailleurs handicapés, et installée dans le quartier Cronenbourg.

Une nouvelle dépense pour les locataires

Pour répartir le coût de cette prestation, CUS Habitat a choisi de relever les charges de ses locataires en proportion de la surface de leur logement et selon la taille de leur entrée d’immeuble. Ainsi, il en coûte désormais entre 13,44 euros supplémentaires par an pour le locataire d’un studio et 58 euros pour une famille en 7-pièces.

Une somme non négligeable pour Geneviève Manka, présidente de la section Hautepierre de l’association de défense de locataires CNL :

« Pour des gens qui sont au RSA, c’est une nouvelle dépense qui peut être lourde. »

Si une majorité d’habitants seraient demandeurs d’une amélioration de la propreté des parties communes, Geneviève Manka souligne qu’ils auraient préféré que ce changement inclut aussi l’entretien des sous-sols. Et surtout elle ne comprend pas pourquoi la tarification est appliquée en fonction de la surface des logements. La section Hautepierre de la CNL a lancé cet été une pétition pour réclamer l’abandon de ce principe d’une tarification à la surface. Puis elle s’est ravisée et a lancé une pétition pour un refus total de la hausse de charge pour le nettoyage.

Moment de détente dans un quartier (photo RB / Rue89 Strasbourg)

La goutte d’eau ?

Cette nouvelle augmentation des charges, si minime paraît-elle, serait-elle celle de trop ? Depuis 2008, les locataires de Hautepierre ont déjà dû revoir leurs budgets à plusieurs reprises : les frais d’abonnement à la chaufferie du quartier sont passés à leur entière charge alors qu’ils n’en payaient auparavant que 75 % ; tandis qu’en dix ans, les loyers ont augmenté de 12%.

Où en est cette pétition aujourd’hui ? En période d’élection des représentants des locataires auprès du bailleur, elle semble avoir finalement été mise de côté. Et pour cause, e-mails à l’appui, CUS Habitat assure avoir informé toutes les associations de locataires avant la mise en place du prestataire et avoir reçu leur assentiment. La position n’est donc pas facile à tenir pour la CNL.

CUS Habitat se défend par la voix de Pascal Charpentier, chef d’agence du bailleur pour le secteur Ouest de Strasbourg :

« L’entretien des entrées d’immeubles devenait problématique. En raison des regroupements de jeunes et du passage de tout le monde par l’entrée, les locataires des rez-de-chaussée refusaient de plus en plus de nettoyer ces lieux utilisés par tous. »

Aval des associations ou simple information ?

De fait, « entre 30 et 40 » entrées d’immeubles étaient déjà entretenues chaque semaine par l’entreprise, à la charge de CUS Habitat, explique Pascal Charpentier.

« D’où l’idée de généraliser après en avoir informé les associations de locataires. Elles ont donné leur bénédiction. Si elles n’avaient pas été d’accord, elles l’auraient fait savoir. Nous ne maîtrisons pas la communication interne à la CNL. »

En réalité, les associations n’ont pas vraiment eu à se prononcer sur cette hausse de charges. Le nettoyage des parties communes fait partie des charges dites « récupérables » au regard de la loi, c’est-à-dire qui peuvent être refacturées aux locataires, au même titre que le chauffage, l’eau et les ordures ménagères. Pas de cadeau donc… Et pour ces charges récupérables, pas besoin de l’aval des associations représentantes, une simple information suffit.

Recours au prestataire généralisé dans le neuf

D’ailleurs, si les logements de Hautepierre qui datent des années 1970 ne passent qu’aujourd’hui à cette nouvelle règle, celle-ci s’impose d’office aux logements neufs de CUS Habitat poursuit Pascal Charpentier :

« Dans le neuf, on se met d’accord sur la règle du jeu dès le départ et on sous-traite à une entreprise. S’ils préfèrent s’en occuper eux-mêmes, cela doit alors passer par un accord collectif des locataires. »

L’augmentation de provision pour charges induite par le nouveau nettoyage ne donnera pas lieu à des remboursements en fin d’année :

« Nous essayons toujours d’éviter les rappels de charge en ajustant directement quand il y a une augmentation des frais. Les frais de nettoyage ont été calculés sur la base d’un devis. Il n’y aura donc pas de surprise, ni dans un sens ni dans l’autre. »

Frustration des années Dalkia

La nouvelle augmentation de charge intervient dans un climat de défiance entre CUS Habitat et la CNL. L’association accuse en effet le bailleur d’avoir couvert une surfacturation des frais d’eau chaude par l’entreprise Dalkia, en délégation de service public pour le chauffage du quartier jusqu’en 2016, pendant de nombreuses années. Pour l’association, plusieurs millions d’euros devraient ainsi être remboursés à l’ensemble des locataires.


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