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Le Tour Alsace, une affaire qui roule

Le Tour de France à peine terminé, une autre course cycliste traverse l’Alsace. Créé en 2004, le Tour Alsace s’est solidement ancré dans le paysage sportif, mais surtout économique de la région. Ses coureurs s’élancent de Strasbourg pour le compte de la deuxième étape ce jeudi 31 juillet.

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Derrière la course, des enjeux économiques importants pour la région Alsace (Capture d’écran page / Tour Alsace sur Facebook)

Derrière la course, des enjeux économiques importants pour la région Alsace (Capture d’écran page / Tour Alsace sur Facebook)
Derrière la course, des enjeux économiques importants pour la région Alsace (Capture d’écran page / Tour Alsace sur Facebook)

Ne dîtes surtout pas Tour d’Alsace, mais bien Tour Alsace, une marque déposée depuis 2004 ! À cette époque, le groupe haut-rhinois d’auto-écoles et de formation d’enseignants de la conduite Larger vient de mettre sur pied une agence de communication (Larger Communication) et cherche un produit qui fasse office de vitrine. Le directeur, Francis Larger, s’intéresse à la Transalsace, une course régionale dédiée aux jeunes espoirs de la petite reine depuis 1997, mais des divergences d’ambitions avec l’organisation en place poussent le chef d’entreprise à travailler sur un nouveau projet.

Francis Larger contacte alors Jean-Pierre Reverdy et lui confie les clés du Tour Alsace (sans « d » apostrophe donc) en le nommant directeur de course. En 2004, année de disparition de la Transalsace, le Tour Alsace naît : une nouvelle compétition ouverte désormais à des cyclistes de tout âge. Le directeur de course depuis 2004, encore aux commandes cette année, se souvient des débuts :

« À l’époque on tournait avec un budget d’environ 150 000 euros, c’était très amateur comme fonctionnement. Maintenant on est plutôt autour de 850 000-900 000 euros. »

Côté sportif, on comptait alors seulement trois étapes et non six comme désormais. Le Tour Alsace est une course UCI Europe Tour de catégorie 2.2, c’est-à-dire une compétition amateur, mais ouverte à certaines équipes professionnelles. Elle est notamment prisée par les jeunes coureurs (voir encadré).

Un vaste tissu de partenaires régionaux

Pour exister, le Tour Alsace s’appuie sur des centaines de partenaires, principalement locaux. Les entreprises privées, sont très attirées par l’identité très régionale de la course. Jacques Humbert, président des caisses du Crédit Mutuel du district de Mulhouse, un sponsor historique et de poids, explique son intérêt pour le projet :

« Le Tour Alsace véhicule des valeurs de proximité, qui correspondent à celles de l’entreprise. L’organisation a su associer la course et l’économie locale, ce qui nous intéresse particulièrement pour le dynamisme de la région. S’associer à ce projet permet de donner une bonne image pour notre groupe. Cette année l’organisation nous a proposé d’être partenaire du maillot jaune, un beau renvoi d’ascenseur. »

Les marques locales à l'honneur au sein de la caravane publicitaire. (Photo Groupe Larger / Flickr / Cc)
Les marques locales à l’honneur au sein de la caravane publicitaire. (Photo Groupe Larger )

Des institutions qui aident, sauf le Bas-Rhin

Les communes traversées et les collectivités territoriales sont aussi au rendez-vous. Pour accueillir le départ d’une étape, il faut débourser 10 000 € et le double pour une arrivée, mais tout n’est pas question d’argent.

« On fonctionne beaucoup au coup de cœur. Pour une commune au budget limité, il est possible d’attirer le Tour en si elle fait des efforts au niveau de l’aide logistique ou surtout en mobilisant du monde. C’est plus facile avec les petites communes, car là-bas c’est la fête au village. Pour une plus grande ville comme Strasbourg, c’est juste un événement comme un autre. Il y aura tout de même 125 bénévoles sur le pont pour le départ de l’étape. »

Cette année, le budget n’est pas tout à fait bouclé. Mais l’essentiel est ailleurs : le Tour Alsace est avant tout une question de notoriété pour le groupe Larger. S’il manque quelques euros dans la comptabilité, pour Jean-Pierre Reverdy, il faut regarder du côté du département 67 :

« Au conseil général du Bas-Rhin, on m’a indiqué que ce n’était pas la vocation de l’institution de subventionner une course professionnelle. Mais le Tour de France, la SIG ou le rallye d’Alsace n’est-ce pas du sport professionnel ? »

« Pour défendre ma région »

Retraité, Jean-Pierre Reverdy consacre la majeure partie de son temps à l’organisation avec une poignée de salariés du groupe Larger. Le reste de l’année est consacré au tracé, mais aussi à fidéliser les partenaires avec des soirées à thèmes ou des déjeuners d’affaires. Au fur et à mesure que la course s’est professionnalisée elle devenu plus… Alsacienne.

« J’ai remplacé Coca-Cola par l’Elsass Cola, des eaux nationales par des eaux régionales, le champagne par du crémant d’Alsace, les vignerons alsaciens sont sollicités etc. Je fais ça pour défendre ma région. L’objectif c’est de montrer la diversité des entreprises alsaciennes et qu’elles peuvent s’en sortir toutes seules. »

Une ambition qui intéresse les sponsors, puisque la portée médiatique de l’événement – privé des plus grands champions de la bicyclette par sa classification -, est avant tout locale. Pour Pierre Schlienger directeur de l’entreprise de travaux publics Urban-Dumez, l’intérêt de s’associer à une manifestation locale est évident :

« Le Tour Alsace a la qualité de mettre en avant notre région. Pour une filiale régionale comme nous (de Vinci Construction, ndlr), un tel événement est plus intéressant que de sponsoriser un événement à vocation nationale. On touche davantage nos cibles, on a le sentiment d’être plus proche du terrain. »

Alors que beaucoup de courses disparaissent le Tour Alsace fait exception

La semaine de course du 29 juillet au dimanche 3 août s’inscrit dans une année faste pour le cyclisme dans l’Est de la France qui a accueilli cette année trois étapes vosgiennes du 101è Tour de France. De quoi en prendre ombrage ? Au contraire, pour Jean-Pierre Reverdy, car les partenaires sollicités ne sont pas les mêmes et la Grande Boucle créé toujours un engouement supplémentaire. Le directeur de course se réjouit avant tout des bons résultats du cyclisme français :

« Lorsque Yannick Noah a remporté Roland Garros, on voyait des gamins taper la balle sur des parkings. Là, avec les bons résultats des Français passés sur nos routes, il y en a qui vont vouloir se mettre au vélo. Sur France Télévisions, on n’a jamais autant parlé de nous ! »

Alors que plusieurs courses à étapes françaises (le Midi Libre, la Classique des Alpes, la Mi-août Bretonne, le Grand-Prix de Rennes, le Trophée des Grimpeurs) ont dû mettre la clé sous la porte ces dernières années, le Tour Alsace n’est, lui, pas prêt de disparaître.


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