D’ordinaire, les arrêtés d’interdiction des raves et autres « free-parties » ne ciblent que quelques jours d’un week-end prolongé. Ils sont aussi récurrents pour les fins de semaine au printemps ou en été. Mais jeudi 25 septembre, la préfecture du Bas-Rhin a sorti l’artillerie lourde. Cette fois,-ci l’arrêté « portant interdiction de rassemblements festifs à caractère musical » sur l’ensemble du Bas-Rhin est valable du mercredi 1er octobre 2025 au mercredi 30 septembre 2026 inclus.
Dégradations, usage de stupéfiants…
Pour fonder cette interdiction d’un an, la sous-préfète Cécile Rackette cite d’abord une dizaine d’exemples de free-parties en France et diverses formes d’infractions et de troubles à l’ordre public associés. En Indre, en mai 2023, un rassemblement non déclaré a suscité 293 verbalisations pour détention de stupéfiants et 47 personnes ont été verbalisées pour conduite sous l’emprise de stupéfiants. L’arrêté préfectoral évoque aussi « 450 personnes prises en charge par les secours » dont huit en urgence absolue et 91 en urgence relative… sans préciser que ce teknival avait rassemblé plus de 30 000 personnes. Et si le maire de la commune concernée se dit favorable à l’interdiction de ces fêtes non-déclarées, il estime malgré tout que l’événement s’est bien passé. Le terrain rendu était « nickel », comme il l’avait indiqué à l’AFP.
L’arrêté se fonde aussi sur des exemples plus récents. Dans le Lot, une « rave-party illégale » dans la nuit du 7 mai 2025 a causé de nombreux dégâts dont le préjudice a été estimé à 150 000 euros pour la commune concernée. En Lozère, du 11 au 13 juillet, une autre free-party a réuni 12 000 personnes. « Au cours de cet événement, les secours ont réalisé près de trente interventions, dont celle relative à l’accident mortel d’une jeune femme de 25 ans, décédée alors que son camion s’est renversé sur une piste menant au site », peut-on lire dans le document.
« Ça ne va rien changer »
Cofondateur et président du collectif Implak’ab, Dan milite pour « changer le regard sur les free parties ». Informé de la publication de l’interdiction préfectorale d’un an dans le Bas-Rhin, le cuisinier de profession n’est pas surpris :
« Dans plusieurs régions dans le sud, les préfectures produisent des interdictions sur plusieurs mois. C’est déjà un classique. Mais ça ne va rien changer pour nous. Fin octobre, nous avons un événement prévu dans l’Est de la France. Et le 18 octobre, on montera tous à Paris pour la techno-parade. »
« Oui des gens se droguent, parfois chez eux, parfois en free ou à la fête de la choucroute.
Dan, cofondateur et président du collectif Implak’ab
Face au sombre tableau dressé par l’arrêté préfectoral au sujet des raves et autres free parties, Dan réagit :
« Ce sont des stéréotypes classiques sur le monde de la teuf. On a fait un événement il y a un an et demi. La protection civile était présente. Il n’y a eu aucun blessé. Pour ce qui est de l’usage de stupéfiants, oui des gens se droguent, parfois chez eux, parfois en free ou à la fête de la choucroute… Et parfois ils meurent parce qu’ils prennent la dose de trop. Ça n’arrive pas qu’en free party. Et pour la propreté des terrains : lors de la techno+ mi-mai, on était plus de 13 000. Le site a été rendu complètement propre à son propriétaire. »
Pour Dan, l’argumentaire préfectoral n’a d’autre objectif que de « flatter un électorat réactionnaire ». Le cuisinier tient à contredire le cliché de teufeurs qui n’auraient d’autres buts que la consommation de stupéfiants :
« Le monde de la teuf, ce sont plein de passionnés de musique, des artistes, des ingés sons. Moi je suis dans l’organisation, je passe mes journées à parler avec des artistes pour organiser des fêtes. Et je fais ça en plus de mes 48 heures par semaine… »
Cet arrêté préfectoral peut être contesté devant le tribunal administratif dans les deux mois qui suivent sa publication. A l’heure d’écrire ces lignes, aucune organisation n’avait manifesté son intention d’introduire un recours contre cette interdiction préfectorale.
Chargement des commentaires…