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« Chasse aux supporters strasbourgeois » à Lyon : on fait le point

Des supporters du Racing ont été agressés en marge du match contre l’Olympique lyonnais samedi 5 août. Plusieurs ont porté plainte contre X pour « coups et blessures ». Retour sur les incidents.

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« Chasse aux supporters strasbourgeois » à Lyon : on fait le point

Le match du samedi 5 août contre Lyon devait être une fête pour les Strasbourgeois, qui retrouvaient la Ligue 1 après neuf saisons d’absence. Dans les tribunes, malgré la lourde défaite du Racing (4-0), l’ambiance était au beau fixe, pour plus de 2 000 supporters strasbourgeois, affrétés dans des bus de supporters.

Aux abords du stade cependant, des agressions ont gâché la fête d’une cinquantaine de supporters, venus par leurs propres moyens. Les faits ont été révélés lundi dans une lettre ouverte publiée par un supporter et très partagée sur Facebook. Intitulée « Vous n’aurez pas notre passion : une chasse aux supporters strasbourgeois organisée à Lyon », Gauthier y raconte les violences vécues par lui et quelques uns de ses amis au Groupama Stadium à l’issue du match OL-Racing.

À la fin de la rencontre, Gauthier et ses amis sont pris à partie physiquement par vingt-cinq « Bad Gones » (un groupe de supporters de l’OL), à quelques mètres de leur voiture. Le groupe d’amis raconte qu’il avait déjà été accueilli par des insultes et des menaces sur le parking P7 du stade, avant le coup d’envoi. L’auteur du billet Facebook affirme :

« Ce qui aurait dû être une grande fête s’est rapidement transformé en calvaire lié à des agressions verbales et surtout physiques. »

Un supporter finit à l’hôpital

Depuis, d’autres supporters ont témoigné, notamment dans la presse. Tous ont comme point commun d’être des fans « indépendants », c’est-à-dire venus indépendamment du déplacement officiel des supporters du club et qui ne bénéficiaient donc pas de mesures de sécurité particulières.

Ces violences ont même empêché à deux supporters de voir le match. Nicolas et son père, venus avec des proches depuis Strasbourg pour assister à cette rencontre, auraient dû se trouver dans le parcage visiteurs. Mais alors qu’ils se rendent aux toilettes, ils sont violemment agressés.

Thomas, qui accompagnait Nicolas raconte aux DNA :

« Il était 17h40 à peu près. Un supporteur lyonnais est venu nous parler, c’était bon enfant, mais ensuite deux Bad Gones éméchés sont arrivés et nous ont pris à partie ».

Un des supporter lyonnais tente de voler une écharpe « Ultra Boys » (le plus grand kop du Racing) aux Alsaciens. Une bagarre éclate. « On s’extirpe comme on peut et là, on voit vingt Lyonnais qui arrivent sur nous. On part en courant mais Nicolas voulait aider son père. Il s’est arrêté et les Lyonnais l’ont plaqué violemment au sol, sans cesser de lui donner des coups », poursuit Thomas. Victime d’une triple fracture de la clavicule, Nicolas a passé sa soirée à l’hôpital, sans avoir vu une minute du match.

Des dizaines de supporters du Racing ont été agressés aux abords du Groupama Stadium de Lyon samedi 5 août. (Photo Noixdecoco99 / Wikimedia commons /cc)

« À la base nous venions profiter d’une soirée en famille »

Une supportrice et sa famille ont également fait les frais de leur passion pour le Racing dans le bloc M. Installés à côté d’ultras lyonnais (réprimandés d’ailleurs par un stadier pour avoir des places à côté de supporters réputés pour leur comportement violent), ils subissent bousculades, tirages de maillots et insultes. Juliette (prénom modifié à sa demande) nous raconte :

« Un supporter de l’OL me tirait l’écharpe et nous disait qu’il fallait ôter tout signe distinctif du RCSA afin d’éviter, je cite, de « ne pas se faire casser la gueule ». Nous avons finalement été escortés par plusieurs agents de sécurité d’un endroit à un autre pendant environ 1h15 dans le stade comme des parias, après avoir été rejoints par d’autres Strasbourgeois. »

Si cette famille pro-Racing relocalisée dans le stade profite sereinement du match, elle préfère partir quelques minutes avant la fin (ratant d’ailleurs le quatrième but lyonnais) pour éviter la foule et les agressions. Pour la supportrice du club alsacien, c’est la déception :

« À la base nous venions profiter d’une soirée en famille, c’était l’occasion de se voir. Finalement la soirée a été gâchée en partie. »

Agressé à plusieurs reprises autour du stade lyonnais, un autre supporter du Racing, aussi sous couvert d’anonymat, raconte son « expérience regrettable ». Crachats, bousculades, insultes… qu’importe si un membre de sa famille l’accompagne avec un maillot de l’OL sur le dos, des « gestes violents » sont réalisés à son égard. Il dénonce par ailleurs le manque d’action « inadmissible » des stadiers :

« Lorsque j’ai voulu demander de l’aide aux agents de sécurité, ils m’ont clairement ri au nez en me disant que ce n’était absolument pas leur problème s’il m’arrivait cela. J’ai payé mon billet comme tout le monde ce qui me donne le droit à la sécurité. Je trouve cela dommage de faire de la communication sur la sécurité et sur le confort que leur nouveau stade propose, alors qu’en réalité il n’en est rien. »

« Aucun incident de ce type » relevé pour l’OL lundi…

La publication le lundi 7 août avait vite fait le tour des réseaux sociaux. Dans la journée, le club lyonnais répondait via un texte publié sur Facebook. Au départ, le staff de l’OL balaie donc d’un revers de main les accusations, reconnaissant des « accrochages » mais préférant insister sur « le comportement exemplaire des milliers de supporters ».

communiqué OL balaie agressions
Le club lyonnais dément les accusations d’agressions dans son communiqué du 7 août. (Page Facebook de l’Olympique Lyonnais)

Néanmoins, le club condamne d’emblée « ces actes individuels » et promet de se porter partie civile aux côtés des Strasbourgeois si des plaintes sont déposées.

Un peu un côté de la plaque, il ajoute que tout s’est bien passé dans le loges, où le président du RCSA, Marc Keller et le premier adjoint au maire de Strasbourg Alain Fontanel (LREM) étaient conviés avec Jean-Michel Aulas, le président de l’OL. Ouf, il ne manquait plus qu’une baston entre dirigeants !

… « Des faits intolérables » déplorés par le club lyonnais mercredi

Cette réponse n’a pas suffit pour éteindre la polémique. Les jours passent et les témoignages de supporters strasbourgeois, similaires à ceux de cet article se multiplient. Des images circulent dans plusieurs médias : visage tuméfié, cheville foulée, clavicule cassée, les blessures sont importantes.

Le club diligente une enquête interne pour identifier les agresseurs. Mercredi 9 août, Xavier Pierrot, responsable de la sécurité du stade lyonnais, semblait prendre le sujet un peu plus au sérieux dans le journal l’Équipe. Il dénonce « des faits intolérables, inadmissibles, des faits que l’on veut éradiquer totalement » et parle d’une « tolérance zéro pour ces individus. »

Depuis lundi plusieurs plaintes contre X ont été déposées par des Strasbourgeois pour « coups et blessures ». La Fédération des supporters du Racing a par ailleurs recueilli des témoignages par mail pour les faire remonter au club strasbourgeois.

Comme un air de déjà-vu

Ces violences ne sont pas sans rappeler les incidents survenus la saison dernière à Lyon, lorsque le Groupama Stadium s’appelait encore au Parc OL. En marge du quart de finale aller de Ligue Europa entre Lyon et le Besiktas Istanbul, des incidents étaient survenus retardant le match de trois quart d’heure.

Suite à cette rencontre, le club lyonnais avait été condamnée avec sursis par l’UEFA pour son « organisation insuffisante ». Si de tels faits devaient se reproduire en compétition européenne lors des deux prochaines années, le club se verrait suspendu dans ces compétitions. Au match de samedi, 750 stadiers étaient présents en plus des forces de l’ordre.

Les fans strasbourgeois tiennent toutefois à souligner que les agresseurs ne sont pas représentatifs du club de Lyon. « 99 % des supporteurs lyonnais se sont bien comportés. C’est une toute petite minorité qui devrait être interdite de stade », déclare une des victimes de samedi aux DNA.

Même constat pour Juliette, venue en famille ce soir-là :

« Ces ultras fans, ce ne sont pas de vrais supporters. Ils donnent une mauvaise image du football. D’autres Lyonnais étaient choqués de leur comportement. Heureusement, tous ne sont pas pareils. »


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