Au café Berlin, place d’Austerlitz, la lumière tamisée fait briller les tables rouges collantes et les banquettes vertes affaissées. Un décor soigneusement choisi par Catherine Trautmann pour sa troisième rencontre avec la presse depuis le début de sa campagne en octobre 2025. L’ancienne maire de Strasbourg, ancienne ministre et désormais candidate socialiste aux élections municipales de 2026, ne laisse rien au hasard. Comme les autres prétendant·es à la mairie, elle tape sur un registre manifestement incontournable : la sécurité. À Strasbourg, quand ce n’est pas le marché de Noël qui nourrit les discours de campagne, c’est l’insécurité, thème déjà largement occupé par Jean-Philippe Vetter (LR), Virginie Joron (RN) ou encore Thibaut Vinci (PRG). Tout le monde joue la même partition et Catherine Trautmann n’y déroge pas.
Installée au fond du bar, elle explique avoir choisi la place d’Austerlitz parce qu’elle concentre, selon elle, plusieurs symptômes d’une ville « qui va mal »: travaux interminables, incivilités, conflits d’usages… Cette place fait partie de ces lieux que « les gens désertent », dit-elle, à cause des « bousculades avec des vélos, trottinettes, c’est ce qu’il y a de plus fréquent mais aussi à cause d’agressions verbales » et de « gens avinés ». Elle aligne les récits : l’homme qui habite rue du 22-Novembre et qui fréquemment ne sort plus de chez lui à cause des incivilités, les riverains qui déménagent hors de Strasbourg, les nuisances quotidiennes liées aux chantiers… « Ces gens qui ont comme réaction de devoir changer de vie, ça me demande de répondre, de changer les choses. »
Brigade dans les transports
Pour rassurer la population, la candidate défend une police municipale plus visible et plus présente. Elle imagine des antennes de police municipale dans les quartiers, des patrouilles régulières, des élus qui se rendent sur le terrain avec les agents. Elle évoque aussi un réseau de bornes d’appel d’urgence dans l’espace public et la création, dans les transports, d’une brigade dédiée à la prévention des incivilités.« Il faut créer une dissuasion pacifique », répète-t-elle.
Comme Jean-Philippe Vetter, elle souhaite la création d’un conseil des droits et des devoirs des familles. Elle s’empresse toutefois de préciser son orientation : un outil de prévention et de soutien social :
« Le but est d’aider les familles à retrouver une autorité, une crédibilité. C’est une démarche sociale. Un appui pour la famille et les jeunes et un espace pour que les élus rappellent le droit. »
Elle veut aussi rallumer l’éclairage public (une proposition aussi formulée par Pierre Jakubowicz, du parti Horizons) pour sécuriser les déplacements des femmes, dénonçant une politique qui, selon elle, fait peser le risque sur celles qui rentrent tard. « Il faut laisser des trajets lumineux. On peut éteindre dans des parcs pour respecter la biodiversité mais il faut des tracés lumineux partout. » Elle promet également de renforcer le dispositif Angela (un dispositif qui sollicite un réseau de commerces identifiés comme lieux-refuges, où toute personne qui se sent en danger peut demander de l’aide), de former tous les policiers municipaux aux violences sexistes et sexuelles et de verbaliser davantage les outrages sexistes.

« Sanitairement, on a un problème »
Après la sécurité, la candidate se lance aussi sur la pauvreté. Place d’Austerlitz, elle pointe un mal : les rats. « On les voit régulièrement », dit-elle, en montrant la place où enfants et rongeurs se croiseraient. « Sanitairement, on a un problème. » Elle promet un « plan d’urgence propreté » quartier par quartier et des pièges photographiques pour traquer les auteurs de dépôts sauvages afin de lutter contre l’insalubrité. Une réponse à un sujet devenu l’un des serpents de mer du conseil municipal et débattu pas plus tard que la veille de son point presse, lundi 8 décembre.
Sur le financement de tous ces projets, elle esquive l’écueil des dépenses supplémentaires en s’attaquant à la gestion interne de la Ville et de l’Eurométropole. Elle évoque, avec un sourire en coin et les yeux levés au ciel, des postes qui seraient aujourd’hui « fléchés pour observer des projets de la majorité ». Pour elle, tout pourrait être réglé par « un travail de répartition des moyens ». Et pour la police municipale, même recette : revoir la cartographie des interventions et augmenter les effectifs quand c’est nécessaire.
En fin de conférence, la stratège aguerrie se prête au jeu des photos entre les palissades de chantier et les vélos qui slaloment. La place d’Austerlitz servant de décor à une candidate qui cherche à reprendre la gouvernance d’une ville qu’elle connaît par cœur et dont elle veut écrire – à nouveau – l’histoire.


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