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Amour, palme d’or anxiogène et bouleversante, questionne la mort

Grand retour de Michael Haneke après son oeuvre Le ruban blanc déjà couronnée d’un fort succès critique en 2009, et quel retour puisque c’est avec une nouvelle Palme d’or qui vient s’imposer sur les écrans en 2012, relançant avec son film le débat sur l’aide en fin de vie.

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Amour, palme d’or anxiogène et bouleversante, questionne la mort

Michael Haneke (doc remis)

BlogOn connaissait le goût d’Haneke pour les huis-clos, Amour ne déroge pas à ses affections en se posant dans l’habitation de deux bourgeois âgés avec une caméra quasi contemplative. L’amour est palpable dans chaque pièce emplie de souvenirs et dont la tendresse s’étale jusque sur les murs ; l’amour est partout, entre les corps, dans le regard, les paroles. Chaque instant qui rythme ce long-métrage de deux heures déborde d’une affection inouïe au point de tirer sur l’émotion à l’aide de simples mouvements ou dialogues. C’est un spectacle intenable, qui ne devrait pas être montré si l’on en croit une réplique du personnage incarné par Jean-Louis Trintignant, et c’est avec une dérision habituelle (on n’oublie pas la télécommande de Funny Games) qu’Haneke nous dévoile, non sans une froideur et une certaine distance afin d’éviter le pathos à tout prix.

Tout est simple, extrêmement beau et grand, mais simple, c’est une histoire qui s’est écrite dans la durée et dont on contemple impuissant la chute, tout en devinant un passé intense entre les protagonistes. D’une tristesse infinie dans tout ce que cela représente, Amour est une ode à la vie, à la joie, à cette union des corps quand bien même l’un se dégrade pour perdre ce que l’enfance a acquit (la parole, le mouvement…). Quand bien même le ciel somme l’un de le rejoindre, c’est un refus qu’il obtient car l’un doit rester envie ne serait-ce que pour l’autre. Haneke ressuscite ainsi l’amour dans ce qu’il a de plus débordant et de pacificateur, de plus originel et passionnel, illustrant avec merveille cette idée que l’amour dépasse jusqu’à la décrépitude de la chair et se passe au delà de toute considération physique.

Un film complet

Amour apparaît donc comme un film complet sur le sujet. Non pas qu’il retrace la vie entière d’une vie partagée à deux, mais qu’il en montre les étincelles finales, rares et précieuses sans pour autant être inédites, le sujet de fin de vie de couple ayant déjà été traité des dizaines de fois mais sûrement jamais avec autant de brio. C’est un film qui résonne particulièrement bien si l’on y va en couple avec la personne de notre vie, mais au delà de ça c’est un film universel. Haneke fixe cet amour au travers de ses cadres et rattache les corps dans ces tableaux virtuoses sur lesquels viennent de temps en temps s’accoler quelques notes de piano. Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva font éclore ces sentiments à l’écran et distillent un suspense sentimental poignant autour duquel navigue de temps à autre la toujours excellente Isabelle Huppert qui avait, rappelons-le, déjà sublimé un film de ce cinéaste en 2001 : La pianiste. Haneke prend alors bien soin de laisser libre cours aux dialogues du couple principal, dialogues s’étalant dans des plans séquences exaltant la fixité de cet amour à la posture semble-t-il éternelle. Tout y est, les plus belles et tristes choses de la vie s’y confondent.

La bande-Annonce

La claque émotionnelle de l’année sans aucun doute, quand bien même le film ne serait pas assez réaliste sur le sujet de la fin de vie d’après les intervenants en fin de séance du vendredi 19 octobre, intervenants d’associations diverses telle l’ADMD. Reste à rappeler que Michael Haneke, tout au long de sa filmographie, n’a eu de cesse de se montrer assez glacial et cadré sur la vie d’un nombre de personnages très réduit, ceci explique donc ce choix de ne pas montrer les vraies aides dont le couple du film aurait normalement pu bénéficier, ni même tout le personnel médical qui devrait normalement être présent pour encadrer le couple et la maladie.

Haneke pourrait alors être accusé de faire le choix de la surenchère du drame psychologique, mais il se montre surtout à des années lumières du traitement d’un film comme Quelques heures de printemps de Stéphane Brizé, bien plus chaleureux, proche du peuple moyen et des réalités. Les intervenants ont alors rappelé la loi Leonetti du 22 avril 2005 relative au droit des malades et de la fin de vie , une loi selon eux « trop méconnue » et qui consiste en une première approche pour une liberté de choix quant au droit de mourir dans la dignité. Tous espèrent qu’on parvienne enfin bientôt à une approche plus complète où la personne âgée pourrait enfin avoir le choix final de la décision. En tout cas, force est de constater que les films sur le sujet se font plutôt nombreux dernièrement et qu’Amour entraîne avec lui toute une série de débats.

Y aller

Sortie nationale le mercredi 24 octobre. À Strasbourg au Star-St Exupéry et à l’UGC Ciné-Cité.


#amour

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