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Désordres à l’AS Pierrots Vauban, parents exaspérés, direction fatiguée

Alors que des changements abrupts de présidence plombent le club de foot amateur Pierrots Vauban, des adhérents pointent un matériel défaillant, un encadrement insuffisant et des tarifs excessifs.

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Désordres à l’AS Pierrots Vauban, parents exaspérés, direction fatiguée

Sous une pluie fine, une poignée de supporters en capuche conversent en regardant leurs enfants finir leur match de foot. Régulièrement, l’entraîneur lance un cri en l’air en direction de ses petits joueurs, parfois un encouragement, parfois une consigne. Parfois juste un cri, indéchiffrable. Malgré les efforts du coach pour animer le stade Émile Stahl au quartier Vauban, ce samedi 25 novembre reste une journée morose, au camp d’entraînement de l’AS Pierrots Vauban (ASPV). Et la pluie n’explique pas tout : depuis plusieurs semaines, le club est plombé par des remous au sein de sa direction et une colère sourde des adhérents.

Quelques jours plus tôt, un article de Rue89 Strasbourg révélait que l’ancien directeur du club de foot amateur, Philippe Weiss avait porté plainte pour « menace de crime contre les personnes avec ordre de remplir une condition » contre deux adhérents de l’ASPV. Concrètement, il les accuse de l’avoir forcé à démissionner sous la contrainte, le mardi 7 novembre. La semaine suivante, il quittera de lui-même son poste avec plusieurs membres du comité de direction.

Addition de déceptions

« Les problèmes au sein du club ? Les gamins ne s’en rendent pas compte heureusement… » Dans les couloirs du club-house, Guillaume fait tout de suite la moue quand on le questionne sur les répercussions de la crise au sein de la direction. Père d’un enfant de neuf ans inscrit à l’ASPV, il raille le discours du club :

« On m’a dit qu’ici, c’était l’élite du foot amateur. Mais pour la saison dernière, on a eu un entraîneur des jeunes, qui était retraité et un peu perdu. Il était très gentil mais ce n’était pas vraiment le coach qu’on espérait. Et l’année d’avant, c’était le flou artistique, avec plusieurs coachs qui ne restaient pas en poste. »

Avant que son fils ne rentre du vestiaire, Guillaume précise, avec un sourire :

« Écoutez, je n’ai pas de “projet Mbappé” avec mon fils, s’il n’est pas vraiment bon, c’est pas vraiment grave. Mais j’attends quand même qu’on lui apprenne à faire un contrôle ou une passe correcte, dans de bonnes conditions… »

Ihab et son fils, Iyed. Photo : Roni Gocer / Rue89 Strasbourg

Derrière lui, Ihab descend de la cafétéria avec son fils Iyed, déjà changé. En nous observant avec les yeux grand ouvert, ce dernier essaye de comprendre : « Le président il faisait pas ses devoirs, papa ? » Ihab lui répond avec un sourire, avant de partager son sentiment sur la situation du club :

« Ça fait un an qu’on demande plus de moyens. Il aurait fallu plus de ballons pour les enfants, plus d’encadrants aussi, moins de turn-over parmi les coachs… Et derrière, on nous demande de payer beaucoup d’argent. 290€ pour mon gamin, ce n’est pas rien. »

La question de la cotisation revient fréquemment chez les parents interrogés. Zuhal, qui a aussi un garçon dans le club, détaille :

« Mon fils a débuté en U8 en 2018. À l’époque, les frais d’inscriptions étaient de 190€. Aujourd’hui, c’est 100€ de plus, c’est trop. Cette différence de tarifs, on ne la comprend pas en tant que parent. »

Critiques sur la gestion financière

En plus des soucis de matériel et de finances, les parents rencontrés ne digèrent pas les accusations de l’ancien président, Philippe Weiss, qui assure avoir été contraint à la démission. « J’étais présent le soir où il aurait été retenu, et ce n’était pas de la séquestration », assure un parent de joueur, également en charge d’administrer l’une des sections de jeunes : « C’est clair que c’était tendu, puisqu’il avait tout le club à dos, mais on voulait simplement qu’il prenne la parole, qu’il nous donne des explications sur la situation financière, sans esquiver. »

Avec 375 licenciés, le club n’est pas dénué de ressources nettes. Mais le club a dû baisser ses dépenses, en raison d’une rétrogradation de National 3 en Régional 2.

Selon les comptes fournies par Philippe Weiss, le budget prévisionnel du club s’élèverait à 220 000€ pour l’année 2023-2024. Les recettes obtenues par les cotisations des licenciés représentent 48 000€. Mais surtout, le club doit composer avec une dette de 92 000€ à rembourser, une situation décriée par les parents rencontrés.

L’ancien président de l’AS Pierrots Vauban, Philippe Weiss. Photo : Roni Gocer / Rue89 Strasbourg

Contacté par Rue89 Strasbourg, l’ancien directeur Philippe Weiss précise :

« Pour un club comme le notre, 92 000 euros d’emprunts, ce n’est pas colossal. Comme dans une entreprise, on doit gérer des avoirs, des créances, des dettes… L’un des problèmes que les mécontents ne mentionnent pas, c’est les cotisations impayées. Ça représente 18 000€ pour l’année 2021-2022, rien que pour les 14-17 ans. En 2022-2023, 25 000€ de cotisations ne sont pas rentrées. Avant, les subventions de la Ville pouvaient cacher ces trous mais avec la diminution de ces dernières années et la baisse des revenus liés au sponsoring, ça compte. »

Philippe Weiss raille ses détracteurs qui « râlent sur les montants des cotisations » tout en « réclamant de l’équipement supplémentaire ». Son successeur par intérim, Ziad Fajr El Idrissi, assure que les problèmes d’équipement vont cesser mais il prévient :

« Moi je ne fais que la transition. Une assemblée générale sera bientôt organisée qui élira le futur président et je ne me présenterai pas. »


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