Jeanne Barseghian a choisi d’afficher les couleurs de la Palestine sur l’hôtel de ville de Strasbourg. La maire écologiste s’est ainsi rangée aux côtés des quelques 80 villes qui ont déployé un drapeau palestinien lundi 22 septembre à l’occasion de la reconnaissance par la France d’un État de Palestine devant l’assemblée générale des Nations unies.
Cet affichage symbolique a cependant été condamné par avance par le ministre de l’Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau (Les Républicains) qui a ordonné vendredi à tous les préfets d’attaquer systématiquement devant les tribunaux administratifs toutes les décisions communales en faveur du drapeau palestinien. À Strasbourg, les conseillers municipaux d’opposition, et candidats aux élections municipales, Jean-Philippe Vetter (LR) et Pierre Jakubowicz (Horizons) ont également condamné la décision de la maire.
Lundi, la préfecture du Bas-Rhin a donc demandé en référé la suspension de la décision de la maire dès qu’elle fut connue, soit en fin de matinée après la diffusion d’un communiqué de presse. Le juge des référés du tribunal administratif, Claude Carrier, a entendu les parties en audience vers 17h en regrettant d’avoir été saisi tardivement. Vers 20h, il a prononcé une suspension de la décision mais trop tard, puisque la Ville avait déployé les couleurs palestiniennes depuis 19h30.
Un préfet très impliqué
Le préfet Jacques Witkowski est venu en personne constater l’affichage et l’inapplication de la décision du tribunal administratif (TA). Dans son télégramme aux préfets, Bruno Retailleau avait justifié sa guerre contre les drapeaux palestiniens au nom du principe de neutralité des services publics. Également présente sur place, la députée de la première circonscription du Bas-Rhin, Sandra Regol (Les Écologistes) a estimé qu’il s’agissait d’un détournement de ce principe :
« C’est dangereux d’en appeler à la neutralité du service public quand il s’agit de choix de municipalités. Cela reviendrait à nier aux élus locaux le droit de prendre des positions politiques. Ils l’ont pourtant fait sans que ça pose de problème en affichant le drapeau ukrainien après l’invasion russe en 2022 et le drapeau israélien après l’attaque du Hamas en 2023 par exemple… »
Le juge des référés du TA de Strasbourg a pourtant retenu ce principe de neutralité pour suspendre la décision de la maire de Strasbourg, considérant qu’aucune « consigne n’a été donnée par le Gouvernement aux administrations en vue de donner un écho particulier à la reconnaissance » d’un État de Palestine :
« La Ville de Strasbourg précise dans son communiqué que “cette lumière symbolise notre soutien aux efforts diplomatiques en faveur d’une paix juste et durable où deux États – Israël et la Palestine – pourraient enfin coexister en sécurité”. La maire de Strasbourg y exprime publiquement son opinion politique sur un conflit international en cours. Ainsi, la décision de la commune de Strasbourg d’illuminer l’hôtel de ville de Strasbourg aux couleurs du drapeau palestinien doit être regardée comme symbolisant la revendication d’une opinion politique. (…) La maire de Strasbourg a porté gravement atteinte au principe de neutralité des services publics. Il y a lieu de suspendre la décision de la maire. »
Le juge des référés n’a cependant pas prononcé l’astreinte de 1 000 euros par jour que demandait le préfet. Contacté, le cabinet de Jeanne Barseghian indiquait lundi en début de soirée « étudier la décision du tribunal », tout en précisant que cet éclairage n’était prévu que pour la nuit du lundi au mardi.



Chargement des commentaires…