
Des exercices de confinement à l’école, une réponse adéquate aux menaces actuelles ?
Depuis la rentrée, dans les écoles françaises, des exercices d’un type nouveau sont apparus. Pour faire face à la menace terroriste, les écoliers vont découvrir le « confinement » avec leur enseignant. Est-ce une façon de rassurer parents et associations de parents d’élèves ou un pas vers une « culture commune de la sécurité » comme l’Éducation Nationale nous l’explique ? Dans les salles de maîtres, on s’interroge.
C’est une habitude depuis des années dans toutes les écoles : trois fois par an, nous sortions en courant avec les élèves, s’entraînant à vider le bâtiment en un temps record, moins de trois minutes, dès que retentissait l’alarme incendie. Mais à partir de cette rentrée, changement de programme ! Au lieu de sortir, il faudra nous enfermer, baisser les volets, se glisser sous les tables… lorsque retentira la corne de brume, une à deux fois pas an nous dit-on.
Il nous faudra bien expliquer aux petits pourquoi l’on se cache. Et je souhaite bonne chance à mes collègues qui vont devoir détailler à un groupe d’écoliers qu’est-ce que le risque « attentat, intrusions »… Il n’est pas envisageable d’organiser ce genre d’exercice sans répondre à leurs questions. Après les attentats de novembre, c’est plus de deux heures qu’il avait fallu attribuer, entre questionnements et les émotions qui s’exprimaient.
Climat anxiogène, l’importance de la relation de confiance
Chaque matin, depuis des années, j’accueille une classe… plus ou moins rangée. Je salue le groupe, lance le grand bonjour qui appelle une réponse, je cherche le contact du regard de chaque enfant, j’observe les uns et les autres. Avoir le sourire me semble important, même si parfois on se force un peu.
Ce rendez-vous matinal ouvre la journée nouvelle avant le démarrage des tâches scolaires. Se rendre disponible pour écouter, pour regarder chaque enfant, plaisanter éventuellement, permet au fil des jours de construire la relation de confiance nécessaire entre la classe et la maîtresse.
Ras-su-rer, être présente et attentive, accueillir le groupe, est notre job chaque matin. C’est notre cœur de métier d’enseignant, depuis fort longtemps, tous ces petits gestes là et bien d’autres encore. Les parents ne le perçoivent pas forcément lorsqu’ils quittent leur enfant à la grille de l’école.

Une école ouverte depuis toujours. (Photo MC)
Une école ouverte sur le monde
Ces nouvelles instructions suffiront-elles à protéger des élèves en cas de menace avérée, dans une école qui historiquement est « ouverte sur le monde » ? Il n’y a ni portier, ni concierge, ni secrétaire dans les écoles élémentaires françaises. Il n’y a que le directeur qui puisse assurer un rôle d’accueil et encore, deux jours par semaine car dans les écoles de taille moyenne, il est chargé de classe à mi-temps.
Chaque jour, il y a la livraison des repas destinés à la cantine, ce qui implique l’intrusion d’un camion garé dans la cour, suivie de celle du boulanger . Il faut aussi compter avec les arrivées de colis postaux, les allées et venues de parents, qui peuvent chercher leur enfant en pleine journée pour un rendez-vous médical par exemple, mais également des visites de « tuteurs » enseignants venant évaluer le travail de jeunes collègues en formation…
Surveiller une école, mission impossible
Autrement dit, une école aujourd’hui , c’est un ballet quotidien d’entrées et de sorties qu’il est impossible à un enseignant de contrôler, en situation de cours .
Dans une période de diminution du personnel comme celle que nous traversons, qui verra quelque chose d’anormal si cela devait se produire ? Dans mon établissement, l’employée de vie scolaire qui secondait le directeur n’a pas été reconduite, c’est encore un emploi en moins par rapport aux années précédentes.
Installer des systèmes de sécurité tels qu’un visiophone ou de la vidéosurveillance ne pourrait avoir une utilité que si quelqu’un était chargé de surveiller l’ensemble de ces systèmes. Qui actionnera l’alarme en cas de nécessité ? A cette question, je ne trouve pas de réponse à donner actuellement.
En attendant, je crois que le sentiment d’être en sécurité que nous pouvons donner à nos élèves est primordial pour qu’ils puissent oser, tâtonner, expérimenter, se tromper, corriger et finalement apprendre. Mais qu’on ne se trompe pas sur nos capacités à l’assurer effectivement.
Dans le Haut-Rhin où enseigne ma fille, les enfants et les parents ont été traumatisés par l'exercice anti-attentat trop réaliste (intervention des pompiers, des policiers et d'un faux terroriste cagoulé )!
Mais dans la majorité des établissements français, les bâtiments ( des salles de classes avec des côtés de portes en verre par exemple) ne sont pas construits comme des bunkers.
La question dès lors est double.
1/D'abord voulons-nous éduquer nos enfants en France comme des des êtres qui doivent se méfier de tout. Avec des exercices et des précautions dont l'EN française n'a aucune expérience? Et si oui comment le faire sans transformer nos enfants en des sortes de robots paranos ?
2/ Pensons-nous que cette "guerre" ( aussi loin que je me souvienne il y a toujours eu en France des attentats terroristes : Rue des Rosiers, Metro Saint Michel, etc) est une guerre qui va durer ? Et comment faire pour sauvegarder les valeurs de la République dans ce contexte ?
Je dois dire que je suis très content d'avoir appris que des officiels français sont allés en Israël pour apprendre comment un pays en guerre se défend contre le terrorisme.
Mais je ne pense pas que pour autant une seule politique sécuritaire est à même de régler les problèmes.
Veuillez m'excuser, mais ce qui me sidère c'est que des enfants de 15 ans en arrive à vouloir tuer des gens !!! Je dois dire que c'est pour moi proprement hallucinant et révèle d'un mal être sans pareil. Si des enfants de cet âge devienne à ce point fanatisés c'est même pendant un entrainement qu'il peuvent faire exploser une bombe.
La seule question que je me pose naïvement, mais cela fait des siècle qu'on se la pose, d'où vient tant de haine ?
Qu'on tente d'éviter que les cours d'écoles soient ouvertes à tous les vents c'est plutôt pas mal. Il aura fallu attendre les attentats pour se rendre compte que tous les adultes qui gravitent autour d'une cour d'école ne sont pas bienveillants…Pour les attentats, si le risque est réel il me parait nécessaire de faire appel à force républicaine comme cela se fait d'ailleurs autour de certains sites en ville ou d'écoles confessionnelles. Si nous sommes uniquement dans des phases de mesures généralisées alors il faut aussi le dire pour éviter les phantasmes parentaux.
Après il y a ces fameux exercices dont celui dit "d'intrusion". Il ont déjà eu lieu l'année passée et les résultats sur certains gamins ont été pour le moins "marquant". "Quand la maitresse le dit il faut se cacher sous la table, elle ferme à clé la porte et on doit pas parler, même si quelqu'un tape à la porte. Mais alors il y a des terroristes qui peuvent venir dans mon école ?" Voilà comment créer de l'angoisse, comment faire que dès le plus jeune âge je pose un regard suspicieux sur mon voisin, comment je ne flâne plus dans la ville mais je vais le plus vite possible d'un point A à une point B (que j'espère sécurisé…), comment on tue l'insouciance des enfants pourtant tellement nécessaire.
Enfin, il y a l'exercice "séisme" ("car nous sommes sur une faille sismique en Alsace"). Là encore on est bien d'accord sur le fait de donner aux enfants les bons réflexes mais perso je préfèrerais qu'on ferme vite la centrale de Fessenheim ……ça protègerait plus les gamins que d'apprendre à se cacher sous une table !