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Deux mois après les émeutes, une rentrée scolaire très politique à Cronenbourg

Deux mois après les émeutes qui ont suivi la mort du jeune Nahel à Nanterre, le quartier Cronenbourg a fait l’objet de toutes les attentions de la classe politique alsacienne pour la rentrée des classes, ce lundi 4 septembre.

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Deux mois après les émeutes, une rentrée scolaire très politique à Cronenbourg

À l’école Paul Langevin, dans le quartier de Cronenbourg, deux faunes distinctes se partagent la cour de récréation, ce lundi 4 septembre. L’une paraît studieuse, concentrée, prête pour l’année qui démarre. L’autre est plus dissipée. C’est le groupe d’élus et d’agents de la Ville, de l’Académie ou de la préfecture. Tous accompagnent la visite de leurs « chefs », la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian (EELV), la préfète du Grand-Est, Josiane Chevalier, et le recteur Olivier Faron.

Cette année, tous les trois se sont accordés pour démarrer leur tournée des visites d’établissements scolaires à Cronenbourg. Deux mois plus tôt, le 27 juin, le quartier avait été particulièrement touché par les émeutes ayant suivi la mort du jeune Nahel à Nanterre. Le collège Sophie Germain et l’école Marguerite Perey ont été la cible d’incendies ; ce dernier établissement restera d’ailleurs fermé pour la rentrée. Les enfants sont notamment redirigés vers l’école Langevin.

Une partie des élèves de l’école Marguerite Perey ira à l’école Langevin, jusqu’aux vacances de la Toussaint (Photo RG / Rue89 Strasbourg / cc).

Après l’incendie, rassurer les parents

« Quels retours avez-vous sur la manière dont les choses évoluent ? » interroge Jeanne Barseghian, dès les premières minutes de la visite. En face, une psychologue scolaire se veut rassurante : « On a terminé l’année assez sereinement. On a vu l’équipe enseignante être très mobilisée, grâce à eux les enfants s’adaptent très bien. Ce sont les parents qui ont peut être le plus besoin d’être rassurés. » Une présence accrue des psychologues scolaires sera assurée au sein de l’établissement.

De gauche à droite, la préfète du Grand Est Josiane Chevalier, la maire de Strasbourg Jeanne Barseghian et l’adjointe chargée de la démocratie locale, Carole Zielinski. Photo : RG / Rue89 Strasbourg / cc

Après un premier échange avec les directrices des écoles Langevin et Perey, le cortège d’officiels monte vers les classes. Bouches ouvertes, les enfants de 7 à 8 ans regardent éberlués la maire et la préfète devant leur tableau. Même briefés en amont par la maîtresse, pas sûr qu’ils saisissent tous la situation. Autour d’eux, des élues municipales – Carole Zielinski, Christelle Wieder et Hülliya Turan – le député de la 3e circonscription Bruno Studer (Renaissance) et des dizaines d’agents se pressent, en plus des journalistes. « Je sais pas c’est quoi la politique, moi j’ai envie de travailler », répond le petit Léandro, en se tordant les doigts dans la bouche.

« On a œuvré pour que les enfants soient sereins »

Une heure plus tard, l’inspection s’achève déjà. Alors que la municipalité avait prévu en parallèle cinq autres déplacements dans autant d’écoles différentes, Jeanne Barseghian résume en aparté la raison de sa présence à Cronenbourg :

« C’était indispensable de venir ici ce matin. La rentrée des élèves de l’école Marguerite Perey faisait l’objet de toutes les préoccupations. On a œuvré durant l’été pour que les enfants soient sereins. C’est l’esprit du dispositif renforcé d’aide psychologique, à disposition des enfants comme des parents. […] L’autre intérêt de cette visite, c’était d’assurer la suite des travaux de végétalisation, en constatant qu’ils avancent ici. »

Dans la cour de l’école Langevin, tous les travaux devraient être terminés d’ici la fin des vacances de la Toussaint.

Chez les parents d’élèves interrogés, l’appréciation de la visite est partagée. Pour Betül, mère d’un enfant scolarisé à Langevin, la venue de la maire et de la préfète « est une bonne chose, pour l’attention qu’ils donnent aux problèmes ». Lætitia est beaucoup plus critique :

« Franchement ? On vient pour quoi, un défilé en costard-cravate ? Il n’y a même pas un petit déjeuner de présentation, avec des cafés et un petit discours. D’habitude, on avait au moins un petit speech de la directrice. »

Le recteur de l’Académie de Strasbourg, Olivier Faron, assure que les quartiers de la politique de la ville (QPV) comme Cronenbourg, bénéficient « d’une attention toute particulière. » Photo : RG / Rue89Strasbourg / cc

L’adjointe en charge de l’Éducation, Hülliya Turan, tempère cette critique : « L’objectif, ce n’était pas forcément de déranger les familles pendant la rentrée. C’est un temps important qu’on voulait leur laisser, il y aura d’autres rencontres prévues avec eux au cours de l’année. »

 « C’était important d’envoyer un signal fort »

Quelques mètres plus loin, de l’autre côté du quartier, une nouvelle visite se prépare. Devant les grilles du collège Sophie Germain, le président de la Collectivité européenne d’Alsace, Frédéric Bierry, arrive pour visiter l’entrée rénovée du collège. Avec lui, les mêmes figures reviennent : l’élue référente de quartier Christelle Wieder, le recteur Olivier Faron, le député Bruno Studer (ancien professeur d’EPS dans l’établissement) et la préfète Josiane Chevalier.

Cette dernière justifie sa deuxième visite d’un établissement du quartier dans la même matinée :

« C’était important, pour cette rentrée scolaire, d’envoyer un signal fort. On était déjà là au moment de la crise, quand les deux établissements étaient pris pour cible. On a voulu revenir. À travers notre présence, on voulait montrer notre solidarité avec eux. »

En substance, les mêmes personnes étaient effectivement venues pour inspecter les lieux en juillet. Les visages étaient fermés, le ton de la visite, sévère. Deux mois plus tard, l’ambiance est beaucoup plus légère. « L’entrée avait été très abimée suite aux émeutes, on a réussi dans un délai très court à tout remettre en forme », se félicite Frédéric Bierry. « Si on revient, c’est pour marquer notre soutien à l’ensemble du personnel. Ils ont été exemplaires face aux émeutes. »

Au centre, le président de la Collectivité européenne d’Alsace, Frédéric Bierry. Photo : RG / Rue89Strasbourg / cc

La visite se poursuit alors que les estomacs se creusent. Lorsque l’heure de la pause sonne, des collégiens sortent en petits groupes du bâtiment. Loin du raout médiatique de cette rentrée 2023, deux enseignants s’organisent pour manger devant les grilles du collège. Interrogé sur la visite des politiques, l’un d’eux hausse les épaules. « On est dans un quartier de plus en plus difficile, je crois que les parents d’élèves, comme la population du quartier, attendent des annonces. Moi aussi j’en voudrais, pour qu’on soit à la hauteur de nos ambitions de service public. »


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