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Deux présidents et deux sièges : conseil unique vous dites ?

Unir les compétences, rationaliser et mutualiser les moyens, etc. Les objectifs du conseil unique d’Alsace ou « collectivité territoriale d’Alsace » sont clairs pour qui se plaint du millefeuille institutionnel actuel. Mais à lire le projet de résolution que les élus de la Région et des deux conseils généraux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin sont appelés à voter samedi 24 novembre, on s’interroge franchement.

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Deux présidents et deux sièges : conseil unique vous dites ?

L'hôtel de Région, futur siège de l'Assemblée d'Alsace ? (Photo Patrick Müller / FlickR / CC)

Vendredi 16 novembre, les trois présidents de collectivités alsaciennes ont rendu public le projet de résolution qui sera soumis au vote du congrès d’Alsace samedi 24 novembre. Ce projet de résolution est une nouvelle étape dans le long processus institutionnel qui mènera -peut-être- le conseil régional et les deux départements alsaciens à fusionner en une seule collectivité en 2015. Après le vote du 24 novembre, il restera une étape majeure, celle du référendum, prévu le 7 avril, qui entérinera ou non la création de cette nouvelle collectivité territoriale d’Alsace.

Trop de compromis, zéro lisibilité

Le hic, c’est que cette nouvelle entité a pour but de rendre plus simple le millefeuille institutionnel alsacien. Or, à lire ce projet de résolution, rien n’est moins sûr. Deux sièges, deux présidents, une assemblée délibérante et un conseil exécutif, deux « conférences départementales » et une dizaine de conseils de territoires… Les compromis faits pour contenter tout le monde semblent avoir eu raison de la lisibilité du projet. Extrait :

« Une collectivité territoriale nouvelle remplacera le Conseil régional d’Alsace, le Conseil général du Bas-Rhin et le Conseil général du Haut-Rhin. Elle disposera d’une compétence générale pour les affaires de l’Alsace. Son siège sera fixé à Strasbourg.

Cette nouvelle collectivité sera administrée par une Assemblée délibérante (Assemblée d’Alsace qui siège à Strasbourg) et par un conseil exécutif (Conseil exécutif d’Alsace qui siège à Colmar), élu par l’Assemblée d’Alsace et responsable devant elle. Pouvoir délibératif et pouvoir exécutif sont distincts.

Dotée de la personnalité morale, la nouvelle collectivité exercera les compétences actuellement dévolues à la Région Alsace et aux deux Départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, complétées par de nouvelles compétences transférées par l’Etat, dont des compétences spécifiques. »

Sur la question du siège, qui énervait sacrément ces derniers mois le maire de Strasbourg engagé par ailleurs dans la bataille du siège du Parlement européen, elle n’est pas vraiment tranchée. Ou en tout cas, semble-t-il, pas dans le sens voulu par Roland Ries. Si le siège est « symboliquement » strasbourgeois, c’est à Colmar que devrait se réunir l’exécutif. C’est à dire que c’est là-bas que seront prises les décisions opérationnelles. « Inacceptable », selon Pernelle Richardot, conseillère régionale socialiste, pourtant pas hostile à la fusion des collectivités. « Pas gravé dans le marbre », souligne Jacques Fernique, tête de file des conseillers régionaux écologistes et 100% pro-conseil unique d’Alsace. Il ajoute :

« Ce que dit le texte, c’est que le siège, c’est Strasbourg, et c’est ça qui est important. Les réunions de l’exécutif, une quinzaine de personnes, n’occasionnent aujourd’hui ni convocation ni compte-rendu. Ce sera ingérable de tenir des comptes d’apothicaires là-dessus. Le président et les vice-présidents se réuniront où ils voudront et Roland Ries le sait bien. Que le PS régional dise que ça manque de clarté, c’est de bonne guerre… »

Verts et UMP pour la double présidence

Concernant le caractère bicéphale de la collectivité unique, il apparaît comme le fruit d’un compromis avec Charles Buttner, président du conseil général du Haut-Rhin, longtemps réticent à fondre son département dans une collectivité plus grande. On imagine aisément que les deux têtes de l’exécutif, même si ce n’est inscrit nul part, seront pour l’une haut-rhinoise, pour l’autre bas-rhinoise. Si le PS argue que ces deux présidences brouillent le message pour les Alsaciens, une fois encore, les écolos sont pour. Jacques Fernique lâche encore :

« C’est ce qui se fait partout ailleurs en Europe ! La présidence d’une assemblée est un vrai boulot, même si c’est le chef de l’exécutif qui décide de la politique menée. Cette séparation de l’exécutif et du délibératif est une bonne chose ! »

André Reichardt (UMP), premier vice-président du conseil régional, va dans le même sens :

« Au début de son mandat, alors qu’il était ministre, Philippe Richert était souvent sollicité pendant qu’il présidait les commissions plénières. Je reprenais le flambeau et nous avons vu tous les deux que les débats étaient alors plus sereins. Les opposants se lâchent moins quand le président de séance n’est pas celui qui dirige la politique régionale. C’est d’ailleurs comme ça que cela fonctionne en Allemagne. Je suis donc pour à titre personnel, même si je suis intimement persuadé que c’est un des éléments qui ont permis de faire sauter des verrous chez nos amis haut-rhinois… »

« Gravé un peu moins gras »

Les conférences départementales et les « conseils de territoires de vie » (sic), ce n’est pas un peu de trop, en sus des communes, intercommunalités, pays, etc. ? De simples assemblées « consultatives », défend toujours Fernique, meilleur ambassadeur de la fusion après Philippe Richert (UMP). Il développe :

« On mène encore la bataille, mais ce qu’il faut c’est bien sûr supprimer l’échelon départemental ! On discute encore pour que ces conférences ne se réunissent qu’une fois par an et n’ait pas vocation à prendre des décisions. »

A l’UMP, tous les sons de cloche sont audibles, des plus départementalistes aux régionalistes, en passant par les « fantassins de l’intercommunalité » comme se décrit lui-même Alfred Becker, maire de Saint-Pierre, président de la communauté de communes du Piémont de Barr et conseiller général UMP du Bas-Rhin. Il remarque :

« Le plus important pour moi, c’est que l’échelon des territoires soit représenté. Je suis très favorable à ces conseils de territoires de vie, qui doivent être prioritaires par rapport à l’échelon départemental. Je ne nie pas son utilité, mais il doit être gravé dans le marbre en un peu moins gras que les territoires… Après, je sais qu’il faut faire des compromis et j’imagine qu’il y aura encore des retouches à ce texte. Je le voterai donc samedi. »

« Morcellement budgétaire » et « tripatouillage électoral » pour le PS

Des conférences départementales uniquement garante de l’équité financière, sans pouvoir décisionnel ? Un vœu pieu selon Alain Fontanel, élu socialiste à Strasbourg et à la Région. Il craint au contraire que ces entités, même sans personnalité juridique, bénéficient de « délégations de gestion ». Un « morcellement budgétaire » qui rendrait caduc la fusion.

Toutes ces subtilités seront-elles comprises des Alsaciens ? « Ce sera un travail à faire lors de la campagne du référendum », rappellent les élus. Pas grave si c’est trop compliqué pour eux de toute façon, un « tripatouillage électoral au milieu du gué » selon Pernelle Richardot est en cours : il visera à abaisser le seuil de votants nécessaire à la validité du référendum à venir. Alors pourquoi s’embêter…

Des amendements vont encore être déposés par les socialistes avant samedi. Ils ne seront vraisemblablement pas acceptés par l’exécutif UMP régional. L’ambiance s’annonce tendue au congrès.

Le texte complet de la résolution


#Conseil d'Alsace

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