

La taxe allemande s’applique à tous les poids-lourds de plus de 12 tonnes, au kilomètre parcouru (Photo Toll Collect)
L’écotaxe existe depuis 2005 en Allemagne, sans poser aucun problème ni aux entreprises, ni aux transporteurs… De 0,14€ à 0,28€ par kilomètre, la « LKW Maut » n’a pas asphyxié le transport routier, bien au contraire. L’autoroute A5 qui traverse le Baden-Würtemberg est élargie à deux fois trois voies, grâce aux recettes de cette écotaxe.
Depuis 2005, les poids-lourds circulant sur les autoroutes et sur certaines routes fédérales allemandes doivent s’acquitter de la « Lastkraftwagen-Maut », ou LKW-Maut. Une taxe de 0,14€ à 0,28€ du kilomètre, selon le gabarit du camion, dont la charge est supérieure ou égale à 12 tonnes. Il aura fallu de nombreux ratés au démarrage avant que cette taxe ne s’impose, mais en 2012, elle a rapporté à l’État allemand plus de 4,4 milliards d’euros.
Environ la moitié de cet argent est directement réinvesti dans les infrastructures routières, via l’agence fédérale de financement VIFG (Verkehrs Infrastruktur Finanzierungs Gesellschaft). Un afflux de capitaux qui a notamment permis dans le land voisin du Bade-Wurtemberg d’élargir l’A5 de 4 à 6 voies, un chantier colossal mené depuis trois ans par Vinci. Le bétonneur français peut dire merci aux routiers allemands… L’autre moitié du produit des redevances est investi dans le développement des infrastructures ferroviaires (35%) et dans le transport fluvial (15%). Pour les écologistes, cette taxe au kilomètre a tout bon, puisqu’elle pénalise le transport routier et favorise en retour les transports doux.
Finies les autoroutes gratuites
Lorsque la taxe a été votée par le Bundestag en avril 2002, elle a surtout été présentée comme un moyen de faire payer les routiers étrangers, qui empruntaient jusqu’alors gratuitement le réseau autoroutier allemand. Du coup, le pays n’a pas vu ses routes se hérisser de barrages aux pneus enflammés. Les transporteurs routiers ont bien protesté mais ils se sont vite ravisés devant l’ampleur des aménagements routiers réalisés.
Comme pour le projet d’écotaxe en France, c’est une société semi-privée (dont le français Cofiroute détient 10%), Toll-Collect, qui est chargée de maintenir les installations de mesure et de collecter les péages. Les transporteurs s’acquittent d’un abonnement payé à l’avance ou au passage. Le contrôle des camions est effectué au moyen d’un dispositif d’identification installé dans les véhicules, appelé On-Board Unit (OBU) et que les quelque 300 portiques disséminés sur tout le territoire détectent automatiquement. Toll-Collect est rémunéré 600 millions d’euros chaque année pour la maintenance du système et la perception de la taxe.
Contrairement aux craintes exprimées par les transporteurs, l’instauration de la LKW-Maut, dont les taux ont été relevés plusieurs fois, n’a pas eu d’effet sensible sur le volume du transport routier. Et sa part modale est restée aux alentours de 65% (contre plus de 80% en France). En revanche, une partie du trafic s’est reporté sur le réseau secondaire et sur les régions périphériques, comme en Alsace où l’A35 accueille 2 000 camions supplémentaires par jour depuis 2005.
Des camions plus petits
Point positif : la modulation du prix en fonction de la taille du véhicule a modifié le parc de poids lourds circulant en Allemagne. Le pourcentage de poids lourds de type Euro 5, les moins polluants, est passé de 1% en 2005 à 49% en 2009. À l’inverse, le pourcentage de poids lourds Euro 2, plus polluants, est passé de 30% à 4% durant la même période, selon le rapport publié en 2011 du député (UMP) Hervé Mariton sur la mise en œuvre de l’écotaxe.
A la suite de ce succès fiscal, la coalition au gouvernement allemand envisage désormais d’abaisser le seuil de la LKW-Maut aux poids lourds de plus de 3,5 tonnes et d’en étendre le périmètre d’application. Et toujours dans l’objectif de faire payer les étrangers, il est question d’instaurer une vignette pour les voitures circulant sur les autoroutes, comme en Suisse.
Du coup, les élus alsaciens craignent un nouveau report sur l’autoroute A35 et vivent mal le recul du gouvernement français sur l’écotaxe, et ce d’autant que l’Alsace a bien failli être une région pilote. Pour Philippe Richert, président (UMP) du conseil régional d’Alsace :
« L’écotaxe rétablit un équilibre entre les transporteurs et les contribuables. Les collectivités n’ont pas les moyens de compenser la dégradation des infrastructures causée par les poids lourds. C’est donc tout à fait normalement aux transporteurs de payer. Quand on voit l’ampleur des travaux outre-Rhin, et quand on pense qu’il va nous falloir quatre ans pour boucler le financement de la rocade de Sélestat, on a l’impression d’être des apprentis-nains en France. »
Quant à la Suisse, qui a mis en place une taxe au kilomètre similaire en 2001 (appelée RPLP), elle a pu financer avec l’apport de ces redevances deux nouveaux tunnels ferroviaires, ceux du Gothard et du Lötchberg. La France s’attendait à recevoir un milliard de recettes annuelles avec l’écotaxe.
Aller plus loin
Sur l’Assemblée Nationale : rapport d’Hervé Mariton sur la mise en place de l’écotaxe et sur l’exemple allemand
Sur Libération : «Quand les Alsaciens manifestent, ils sont moins entendus»
Sur Rue89 Strasbourg : Report de l’écotaxe : valse politique des élus alsaciens
Sur Rue89 : Bretagne : pourquoi Hollande doit tenir bon sur l’écotaxe
Vous parlez de l’Allemagne qui a établi cette écotaxe depuis 2005 ; mais DITES NOUS TOUT SVP ! Les allemands n’ont pas utilisé un centime d’Euro de ces taxes pour l’environnement mais pour rénover les autoroutes.
Quel est le montant du péage des autoroutes en Allemagne ? 0 Euro du km comme dans tous les pays du nord de l’Europe. On pourrait citer la Suisse : vignette forfait de 32.5€/an c'est-à-dire un kilométrage illimité, l’Autriche 8€/10 jours … Dites nous combien de kilomètres peut on faire avec 32.5€ dans le pays des droits de l’homme ? Lille –Le Mans :425 km c’est tout et c’est un prix moyen ! Et ça ne choque personne cette limitation par l’argent du droit de circulation ? Elle a un SENS cette taxe dans ces pays pour faire participer les plus destructeurs de routes. De plus elle impacte peu sur la facture du client final le petit consommateur de produits agricoles contrairement à la France hyper chargée en péages autoroutiers…
Contrairement au discours simpliste et individualiste à l’usage des nigauds du café du commerce, « faire payer les utilisateurs des autoroutes plutôt que le contribuable », les prix des péages transports se répercutent sur tous ceux qui mangent, boivent, s’habillent, besoins incontournables. Ainsi notre Smicard de toute façon exempté d’impôts sur le revenu qui ne peut se permettre de prendre l’autoroute paye quand même cette autoroute par le biais de sa consommation !
Or l’esprit de l’ex candidat Hollande élu sur la « justice sociale » n’était-il pas de limiter les taxations en tous genres et de privilégier les augmentations d’impôt sur le revenu plus justes s’en prenant même au candidat Sarkozy qui voulait augmenter la TVA.
Le 24 avril dernier EELV et PS votent comme un seul homme une taxe de plus initiée par les soi disant vilains taxeurs sarkozistes qui va frapper les consommateurs les plus pauvres après les taxes sur les voyages SNCF et l’augmentation de la TVA sur les plus défavorisés…
Après 2008, manifestement non convaincus par des solutions techniques collectives pour faire face à leur présupposée gravité du réchauffement climatique, le CONSENSUS du Grenelle, écolos compris, se reporte sur des taxes et remettent aux calendes grecques les mesures techniques les seules efficaces. Comme chacun sait les français ne payaient pas d’impôts (ironique) permettant des investissements pour de grands travaux augmentant la capacité des voies ferrées et des canaux. Pourtant il y en a des milliards d’aides aux entreprises privées sous divers lignes comptables (entre 65 et 110 Milliards d’Euros voir le FIGARO http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2013/06/18/20002-20130618ARTFIG00473-aides-aux-entreprises-les-principaux-coups-de-rabot-envisages.php). Mais on attendait l’arrivée de la magique écotaxe …
Pas davantage qu’il n’y ait de calendrier technique d’atteinte des objectifs de ce basculement vers des moyens de transport plus propres…socialement il n’y a aucune préparation de reconversion, aucun calendrier préparant les hommes …
Autre question : si on prélève sur presque toutes les routes en fonction de la pollution générée, pourquoi ne pas taxer le carburant, ou plus précisément, diminuer les allègements de taxes dont bénéficient les poids lourds par rapport aux véhicules légers, mesure vraisemblablement beaucoup moins coûteuse à mettre en oeuvre.
Enfin, il est clair que cette taxe n'a pas pour vocation de permettre des transports plus écologiques des marchandises, depuis 4 ans, rien n'a été prévu pour ça et ce que l'on entend, c'est que la suspension va retarder le plan de lignes TGV.
Les Français et les Belges n'ont aucune visibilité.
Il y a eu un couac, j'ai fait une réponse qui s'est retrouvée ci-dessus
Le passage des PL vers la qualité euro 5 puis 6 est de toute façon +- un impératif.
L'Allemagne n'a ni plus ni moins qu'instauré un péage autoroutier aux PL, et d'après ce qu'en donne l'article, à peu près au même prix qu'en France (A6 paris lyon : 25c/km 5 essieux). Cette taxe était avant tout destinée à financer la rénovation de leurs autoroutes.
Pour l'anecdote et comme le dit l'article, immédiatement après l'instauration de la taxe, les PL allemands frontaliers se sont détournés sur l’autoroute gratuite alsacienne.
Le fond de l'affaire est de re-internalisé les couts de transport PL activité qui "externalise" vraiment beaucoup. On part de loin. Les taxes carburant sont insuffisantes et du reste beaucoup de PL en transit n'en paient même pas.
Faire payer pour l'état des routes est un début. Il faut savoir que ce sont les PL qui dégradent les routes, les VL ont un effet négligeable (charge à l'essieu). ce sont aussi les PL qui imposent leur dimensionnement, le calcul de résistance, etc.
Bref le PL coute cher à la collectivité et ce cout n'est pas suffisamment répercuté.
Je demandais surtout ce qui pouvait justifier le préfixe "éco" utilisé dans l'article et dans le discours des promoteurs de la taxe.Vous y avez répondu : sans doute pas grand chose.
En réalité le volume absolu du transport routier augmente comme le reste, mais comme on lui a grignoté un petit pourcentage de part modale sur le volume total de marchandises on prétend que c'est une "victoire pour l'environnement".
Voici quelques chiffres à mettre en regard de ceux que vous mentionnez pour l’Allemagne... On sait qu'en France, la mise en œuvre de l'écotaxe a été confiée, via un appel d'offres lancé en 2009, à un groupe privé, en partenariat avec l'Etat. Le 20 octobre 2011, le marché a été attribué à un consortium privé, Ecomouv, filiale du groupe italien Autostrade (majoritaire avec 70 % des parts), associé à plusieurs grandes entreprises françaises : SFR, SNCF, Steria et Thales. Sur le rendement annuel de cette taxe, estimé à 1,2 milliard d'euros en année pleine, 230 millions d'euros [250 moins 20 millions d'euros de TVA] iront financer la société Ecomouv, soit près de 20 %. Au terme des quatorze ans prévus par le partenariat, Ecomouv doit récupérer 3,2 milliards d'euros, pour un investissement de départ de 650 millions. Soit un rendement total, hors coûts pour la société, de 2,5 milliards d'euros ! Sur 1,2 milliard de collecte attendue, ne resterait à l'Agence de financement des infrastructures de France (Afitf), une fois prélevée la part d'Ecomouv et celle des collectivités locales, que 760 millions d'euros, soit 63 % des taxes prélevées.
Le Rhin est bien plus qu’un fleuve, c’est un océan qui sépare des façons de penser (et donc d'agir) différentes. Et puis... Quant à payer une taxe, si votre entreprise marche bien, bon, pourquoi pas, hein ?
1) Avoir en France, privatisé les autoroutes est un SCANDALE ABSOLU, d'autant plus que ces sociétes privées ont augmenté beaucoup les tronçons forts fréquentés et ont augmenté moins ceux peu fréquentés, ce qui leur a permis d'accroître considérablement leur bénéfices (qu'on peut qualifier de rente!) tout en affirmant avoir respecté l'augmentation "moyenne" demandée...
http://www.humanite.fr/social-eco/autoroutes-le-double-scandale-de-la-privatisation-547222
2) Car de fait, cet argent pompé par ces entreprises sert à engraisser ces sociétés et leur actionnaires et non à développer des réseaux alternatifs plus vertueux (et notamment le rail/route ou le ferroutage des marchandises, ou encore le transport fluvial, bien plus économe sur le plan écologique).
3) Il faut savoir que ce que paient les camions pour utiliser les autoroutes n'est quasiment rien au regard de ce que paient les automobilistes, le tout rapporté au poids relatif (poids au sens de masse en tonnes) de ces deux types de véhicules. Entre un "38 tonnes" (de 40 tonnes en fait voire 44 tonnes pour certaines marchandises, et peut-être à terme 60 tonnes pour les "mégacamions" en projet!) et une voiture d'une tonne (ou deux, car oui il n'y a plus beaucoup de voitures d'une tonne actuellement... mais c'est pour simplifier), le rapport est de 38 par exemple, mais un camion est loin de payer 38 fois plus que la voiture,
http://www.monde-diplomatique.fr/2012/07/DESCAMPS/47973 (excellent article par ailleurs).
4) Tous ces points étant rappelés en préambule, il est invraisemblable que cette écotaxe poids lourds ne soit toujours pas mise en place en France (maintenant que NOUS contribuables avons payé pour tous ces portiques!) et que les alsaciens supportent en particulier depuis 2005, comme rappelé dans l'article, 2000 camions de plus par jour sur l'autoroute, avec les dégâts aux infrastructures, les accidents, la pollution et les embouteillages aux heures de pointe qui vont avec!
Pas comparable
Pour es 3 pas fait par les français les allemands font 3 pas en avant. Pas étonnant qu'on reste sur le banc de touche.