
Alors que le conseil supérieur des programmes vient de rendre son rapport sur « l’évaluation bienveillante », un lycée de Sélestat expérimente pour la deuxième année une classe de seconde sans notes, remplacées par une évaluation des compétences. Un dossier prioritaire, mais très discuté au sein de l’Éducation Nationale : on ne touche pas aisément aux sacro-saintes notes.
À la rentrée, les élèves de la Seconde 3 du lycée Koeberlé de Sélestat ne se doutaient pas qu’ils débarquaient dans une classe expérimentale dans laquelle ils ne seraient pas évalués par des notes, mais sur leurs compétences. Plus fréquemment expérimentée en collège, une « classe sans note » a été mise en place dans une classe de seconde du Koeberlé depuis la rentrée 2013.
L’idée a germé dans les têtes de quelques professeurs après avoir expérimenté les « enseignements d’explorations » mis en place en classe de seconde depuis 2010 par l’Éducation Nationale. L’adoption de ces cours par les élèves n’est pas mesuré par le biais de notes sur 20, mais par des appréciations. Convaincus par la pertinence de ce système d’évaluation, les enseignants à l’origine du projet ont voulu l’élargir à tous les cours d’une classe de seconde. Ainsi, une année durant, ils ont mûri cette idée et se sont inspirés d’établissements pionniers où ce dispositif était déjà en place, comme dans le lycée Kirschleger de Munster.
Le projet ne fait pas l’unanimité au sein des enseignants, mais, encouragés par leur proviseur, les professeurs à la tête du projet sont parvenus à mettre en oeuvre « l’évaluation par compétences ». Après une validation par le conseil d’administration de l’établissement, il a ensuite fallu constituer un dossier en vue d’obtenir une dérogation du recteur de l’académie de Strasbourg puisque les textes officiels ne mentionnent que les notes pour évaluer les élèves.
Cinq domaines communs à toutes les matières
Depuis septembre, tous les enseignants de la seconde 3 évaluent donc leurs élèves sans notes. Dans ce système d’évaluation, les notes sur 20 ont été décomposées pour dégager cinq domaines de compétences communs à toutes les matières :
- Communiquer
- Connaître
- Analyser
- Raisonner
- Réaliser
Plus précis que les méthodes américaines ou allemandes, qui n’évaluent les élèves que par des lettres (de A à F) ou de 1 à 6, l’évaluation par compétences se différencie se rapproche de ce qui existe à l’école primaire mais sans une litanie de compétences. Les domaines sont appréciés sur quatre niveaux :
- Expert (Bleu)
- Maîtrise satisfaisante (Vert)
- Maîtrise insuffisante (Orange)
- Non maîtrisé (Rouge)
Suivi en direct par les élèves
Les élèves peuvent à tout moment consulter leurs évaluations via Sacoche, un logiciel, choisi par les professeurs en charge du projet et déjà utilisé dans certains collèges, initialement été conçu pour l’évaluation des compétences en mathématiques.
Jean-François Picard, le proviseur du lycée Koeberlé, prévient :
« Les gens se focalisent sur le fait qu’il n’y ait plus de notes, alors que l’important est de repérer l’obstacle dans l’apprentissage, pour construire un objectif d’orientation que d’ailleurs la note ne révèlera pas aussi clairement. »
Nicolas Logel, le professeur principal de la classe, se veut rassurant :
« Même si certains élèves restent attachés aux notes, qu’ils aiment pour leur côté synthétique, et voient comme des points de repères, ils admettent mieux cerner les domaines dans lesquels ils peuvent progresser. Ce système permet une analyse plus précise des points forts et des points faibles de l’élève, ils s’en rendent d’ailleurs compte en première, quand ils retrouvent les notes. Et ça a le mérite de tempérer les mauvais résultats ! ».
Quant aux élèves, leurs sentiments sont partagés. Maud, élève de la seconde 3, regrette : « Dans la cour, on peut pas trop se comparer à nos copains quand ils disent “j’ai eu un 18 en maths ! Et toi ?” ». Solène y trouve plutôt des avantages : « moins de stress, moins de compète ! Et c’est plus valorisant ».
Pour autant, l’évaluation par compétences ne bouleverse pas tout : les trimestres sont maintenus, tout comme les félicitations, les encouragements, les avertissements, et les conseils de classe. Et des difficultés sont apparues dans les cours de langues ou de sport, puisque les élèves de Seconde 3 sont mélangés avec leurs camarades des autres secondes.
Retour aux notes en première et pour le Bac
L’évaluation par compétences n’est pratiquée au lycée Koeberlé que dans cette seule et unique classe de seconde 3, et les élèves retrouvent les notes dès la classe de première. Une exception dans le parcours qui n’a pas manqué d’inquiéter certains parents d’élèves, craignant que l’orientation de leurs enfants n’en souffre. D’autres n’ont pas vu d’intérêt du procédé et malgré des réunions d’informations, certains parents d’élèves restent dubitatifs sur l’évaluation par compétences.

Grâce à une application, chaque élève peut voir quel savoir il maîtrise ou non (Photo TL / Rue89 Strasbourg)
Cette pratique est suivie de près par l’Académie de Strasbourg, qui mène d’autres expériences similaires en Alsace : 27 collèges (sur 171) comptent au moins une classe sans notes mais seulement 5 lycées (sur 93). Outre le lycée Koeberlé de Sélestat, le lycée Kirschleger de Munster, le lycée Freppel d’Obernai, le lycée Jean-Jacques Henner d’Altkirch, et le lycée Marie Curie de Strasbourg se sont lancés.
Même s’ils reconnaissent qu’il est un peu tôt pour tirer des conclusions après seulement deux rentrées pour cette classe expérimentale, les enseignants en charge du projet jugent l’expérience positive et apprécient une meilleure précision dans l’évaluation. Elle serait également moins stressante et plus gratifiante pour les élèves, leur permettant de mieux préparer leur orientation et de choisir plus facilement leur future filière en classe de première. L’expérimentation sera reconduite à la rentrée 2015, pour une troisième et dernière année scolaire, avant d’en faire le bilan.
En France, les discussions autour de l’abandon des notes s’intensifie depuis peu : le 27 novembre, le Conseil Supérieur des Programmes (CSP) a rendu à la ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem un rapport proposant la suppression des notes jusqu’en 3ème. À la mi-décembre, c’est la Conférence Nationale sur l’Évaluation qui remettra ses recommandations sur ce sujet.
Aller plus loin
Sur Le Monde.fr : Vers une révolution de l’évaluation des élèves ?
4 niveaux de notes pour 5 compétences
Les notes vont donc de 0 à 5, de 5 à 10, de 10 à 15 dans cinq champs d'évaluation donnés.
On voit sur le bulletin que l'élève est plutôt nul en français et plutôt bon en sport.
Ce n'est que le mode de l'évaluation qui change. A la précision de la notation sur 20 on préfère le flou artistique où l'élève est peut être rassuré mais sans doute aussi désorienté pour l'avenir.
Enfermer les chères têtes blondes dans un cocon ou les préparer à la vie, c'est un choix qui n'est pas sans conséquences.
Mais il est vrai que ce n'est pas mon domaine.
Ce que je sais, c'est qu'il y a des pays où la situation est telle que les parents sont très regardants sur les notes parce que plus tard cela ne pardonnera pas ...
Vive la société d'idiot
Nous sommes en train de former une génération de moutons de Panurge facilement malléable à souhait, et incapable d'être autre chose que des gens sans culture, sans esprit de compétition, des veaux qu'on va emmener à l'abattoir de la mondialisation effrènée.
Comment peut t'on enlever les notes dans une classe, quand j'écoute les différents débats, je me dit qu'on est tombé bien bas, et que nos profs actuels qui pour la plupart ne sont plus capable d'apprendre aux jeunes le simple fait de lire, d'écrire et d'analyser un texte, et qui pour certains veulent donner des leçons de pédagogie, alors qu'ils sont incapable d'en comprendre le sens.
Il y a encore une bonne quinzaine d'années quand je recevais une candidature, je pouvais sans avoir à contrôler les fautes de Français donner facilement un avis positif, mais les années passant j'ai vu ces lettres devenir de vais chiffons incultes et pleins de fautes non pas d'inattention, mais de lourdes fautes de grammaire.
Alors imaginez vous le casse tête des chefs d'entreprises qui doivent et qui veulent embaucher des jeunes au moment de prendre une décision.
C'est tout simplement devenu une roulette russe avec très peu de chance de tomber sur la perle rare.
Alors messieurs les politiques, et surtout notre nouvelle ministre de l'éducation, qui fêtait mieux de s'imprégner de se qui se passe réellement dans nos écoles que de prôner la théorie du genre en organisant la théorie du zizi.
Rodgers
A ce que je sache, des pays pratiquant l'évaluation de compétences en lieu et place des notes ne sont ps nécessairement plus mauvais au classement PISA...
Par ailleurs, on pourrait se dire qu'avec des mesures de compétences et non des notes, on arrêterait peut être de truquer le thermomètre pour arriver chaque année au reccord d'obtention du bac...
Après y a t il des choses plus efficaces à faire dans l'EN pour augmentez les niveau scolaire, très probablement...
Mais notes, ne rime pas avec bon niveau scolaire...
Enfin, si on veut parler d'illétrisme en France, on rappellera que les chiffres restent très élevés à la sortie du système scolaire, mais que le chiffre bien est plus important encore lorsque l'on s’intéresse aux classes d'ages plus âgées... comme quoi votre exemple n'est pas si représentatif que ça (on pense à Macron sur gad, qui pour une fois n'avait pas dit de connerie)... et globalement, la France s'est toujours distinguée par la faiblesse des niveaux de qualification de sa population en général (hors illettrisme). Sortons donc des postures...
Mais vous avez raison, l'EN ne remplit pas sa mission dans les zones où les besoins sont là:
la promesse d'apprendre à lire, écrire et compter n'est pas tenue
celle d'offrir une perspective d'emploi non plus, celle d'offrir une place dans la république française non plus...
Autant je pense que faire une fixette sur le dossier de l'abcd est une connerie, autant je ne comprends pas pourquoi on s'est déchaîné sur les mères de familles d'Hautepierre... l'educ nat n'offre à leur enfant, aucune maîtrise de l'écrit, du calcul, un statut de chomeur, et de citoyens de seconde zone devant les institutions publiques (police, justice...). Alors les propos rassurant du ministre reste et resteront inaudibles
Quel esprit étriqué, passéiste !
De plus comme mouton de Panurge, en citant une "théorie du genre" qui n'existe que dans l'esprit de cathos rétrogrades, vous êtes bien au cœur du troupeau.
2/10 peut mieux faire. J'espère.
Là, je ne sais pas si votre lettre de candidature serait acceptée...
2) Il faut voir les effets des copies sans note et avec selon les classes et les niveaux, sans oublier le contexte dans lequel se trouve l'établissement afin de dégager des conclusions objectives.
3) Les élèves, profs et parents devront être à la page car les réformes sont nombreuses. Je crains le pire.
et attention, vous venez de mettre le doigt dans la pédagogie de la coopération !