« Eviter tout risque de contamination de la plus grande nappe phréatique d’Europe. » Tel est le mot d’ordre du dernier rapport parlementaire sur Stocamine, présenté le 18 septembre. Le Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) doit s’exprimer sur la faisabilité du projet à la fin du mois d’octobre. Selon les députés alsaciens de cette mission d’information, deux conditions doivent être réunies pour permettre l’extraction des déchets dangereux : trouver une meilleure solution de stockage et s’assurer de la sécurité des travailleurs de la mine. Sur ce dernier point, un médecin du travail et un syndicaliste se veulent rassurants.
Conditions de sécurité draconiennes
Depuis 2015, Luc Jeanmougin est le médecin du travail chargé de l’épineux dossier Stocamine. Sur les trois années de déstockage, entre 2014 et 2017, il n’a observé aucune conséquence sur la santé des mineurs :
« Pour l’instant, on a touché du bois, aucun mineur n’a été contaminé par la dernière opération de déstockage. Aucun pépin majeur ne remet en cause la sortie des toxiques. »
Des dosages de mercure ou d’arsenic ont été réalisés pendant les trois ans de déstockage. Aucun résultat anormal. Mais ce résultat est à mettre aux crédit de mesures de protection importantes, selon le médecin :
« Dans la mine, il y a un système d’aération particulier et des capteurs en temps réel pour les produits chimiques. Les mineurs portent une combinaison étanche et un masque complet (avec un système respiratoire et plusieurs filtres, ndlr). »
Le plus gros problème : la mine
Jean-Pierre Hecht, ancien délégué syndical CFDT, a travaillé sur le site de Stocamine. Il se souvient avoir stocké les déchets avec peu de protection :
« La tenue de travail, c’était une tenue normale à l’époque, sauf cas exceptionnel où on portait un masque à poussière et une combinaison jetable. Quand j’ai vu bosser les gars sur le déstockage, entre 2014 et 2017, j’ai les enviais presque avec toutes ces mesures de sécurité. »
Le risque principal n’est pas chimique, selon l’ancien minier :
« Le plus gros problème, c’est que la mine continue de se refermer sur elle-même. Si on avait commencé à déstocker il y a dix ans, on n’en serait par là. »
La direction de Stocamine contre le déstockage
La direction de Stocamine est opposée au déstockage partiel. Dans sa dernière lettre d’information, en novembre 2017, elle assure : « Le confinement définitif des déchets après déstockage aujourd’hui réalisé de 95 % du mercure est la seule solution responsable. » Les risques sanitaires et géologiques pour les travailleurs font partie des arguments des Mines de Potasse d’Alsace (MDPA) pour ne plus y toucher.
« Le travail peut être mené dans une sérénité totale », assure au contraire le représentant de la CFDT, membre du collectif Destocamine. Le mouvement soutient le déstockage total malgré l’incendie en 2002 du bloc 15. Son porte-parole, Etienne Chamik, a apprécié le rapport parlementaire réalisés par les trois députés alsaciens.
La fiabilité de l’État en question
La mission d’information a livré de sévères conclusions sur le stockage souterrain de déchets à Wittelsheim. La mauvaise gestion financière de Stocamine a coûté 146 millions d’euros en dix ans. La confiance a été rompue entre « entre les habitants et les collectivités concernées d’un côté et l’Etat et l’exploitant de l’autre ». La gouvernance est identifiée comme « un facteur pouvant expliquer l’absence ou le retard de prise de décision. » Les députés préconisent « une culture de l’Etat plus favorable à la reconnaissance de la faillibilité de l’Etat. »
Vincent Thiébaut, député du Bas-Rhin et président de la mission d’information sur Stocamine, résume l’enjeu actuel :
« Aujourd’hui, nous avons pris cette décision dans le respect du principe de précaution. Il n’y a pas de certitude sur la pollution de la nappe phréatique. Mais dans le doute, si l’étude supervisée par le Bureau de recherches géologiques et minières estime que c’est faisable, il faut déstocker. »
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