

La verrière de la gare de Strasbourg, côté centre-ville (Photo Renzo Stanley / Flickr / Cc)
Sur Strasbourg 2028, les Strasbourgeois plébiscitent l’ouverture de la gare de Strasbourg à 360°. La création d’une sortie côté rue des Remparts et l’urbanisation de la gare basse sont des projets dans les cartons depuis une vingtaine d’années, mais bloqués par des contraintes techniques, budgétaires et politiques. On fait le point.
La proposition est datée du 28 août 2013, jour de lancement de Strasbourg 2028, notre application de démocratie participative. Elle est signée Paul Joachim et expliquée comme suit :
« La création d’un accès piétons à la gare depuis la rue des Remparts permettrait d’y délocaliser toute la dépose automobile des passagers. Ceci désengorgerait le boulevard Wilson et apaiserait la circulation tendue du quartier gare. Un projet d’une plus grande ampleur permettrait la desserte des quartiers ouest pour les piétons et cyclistes, déjà nombreux sur l’axe Cronenbourg-centre-ville. »
Un nouveau quartier d’ici 2030, mais avec le GCO
Les 13 commentateurs de cette proposition, qui existe dans les projets d’urbanisme depuis les années 1990, valident son intérêt. L’un précise que le prolongement de la ligne C, qui se termine en cul-de-sac à la gare devant l’ancienne Poste, aurait permis, passant sous les installations ferroviaires, de soulager les boulevards embouteillés un peu plus depuis la mise en service du BHNS – ligne G vers Cronenbourg et l’Espace européen de l’entreprise.
Un autre évoque le scénario de gare basse urbanisée imaginé par Eiffage-Phosphore d’ici 2030, accompagnant la réalisation du Grand contournement ouest (GCO) et la requalification de l’A35 en boulevard urbain. Un troisième contributeur soulève le problème du coût et du nécessaire déménagement des infrastructures logistiques de la SNCF et de RFF (Réseau ferré de France) pour envisager la mise en œuvre d’un tel projet.
D’abord la verrière, puis plus rien
Mais de quel projet parle-t-on ? D’un tunnel sous la gare pour faire passer des trams et un hypothétique tram-train ? De la création d’une passerelle piétonne sur les voies vers des parkings situés à l’ouest de la gare ? D’un nouveau quartier ? De tout cela et plus encore. Alors que la première municipalité socialiste (1989-2001) a engagé l’acquisition des terrains militaires aux abords de la gare en février 2000 (délibération à lire ici) auprès du ministère de la Défense, l’équipe de Fabienne Keller a continué sur cette lancée dès sa première année de mandat en signant l’acte de vente en octobre 2001.
La sénatrice du Bas-Rhin, devenue depuis « Madame gare » après la publication d’un rapport commandé par le Premier ministre François Fillon sur les « grandes gares contemporaines » en mars 2009 (PDF), se souvient :
« En 2001, avec l’arrivée du TGV prévue en 2007, l’enjeu était d’agrandir la gare – construite en 1880 – pour pouvoir accueillir plus de passagers. Le comité de pilotage qui réunissait tous les acteurs, les collectivités, mais aussi RFF et la SNCF, a décidé de poser ce grand geste architectural qu’est la verrière, mais aussi de rouvrir le troisième souterrain [d’accès aux quais], de doubler le parking Sainte-Aurélie, créer le parking Wilson et réaménager la place.
Mais nous avions aussi une vision qui englobait l’arrière de la gare, avec un phasage. J’ai acquis auprès de l’armée de vastes terrains à l’arrière de la gare [ndlr, une surface de 15 hectares, achat initié par la délibération de 2000], aménagé la rue des Remparts et rouvert la porte militaire, dans l’objectif d’y créer un vrai quartier à terme. On étudiait alors plusieurs hypothèses et notamment celle d’une passerelle partant d’un étage du bâtiment actuellement occupé par la SNCF et passant sur les voies. »
Un os : 75 millions à trouver pour le tunnel
Rien ne sort finalement des cartons avant 2008 et le départ de Fabienne Keller. En 2009 et 2010, le comité de pilotage continue à se réunir, mais le cœur n’y est plus. La SNCF n’est pas trop pressée de déménager ses activités logistiques (nettoyage des wagons, stockage des trains…), la verrière et les nouveaux aménagements suffisant à absorber l’augmentation du trafic passagers engendrée par l’arrivée du TGV.
Quant à la Région Alsace et l’État, ils ne sont plus si sûr de pouvoir (ou de vouloir) financer le tunnel sous la gare et les quelques centaines de mètres de voies vers la porte Blanche, chiffrés par des études préliminaires à 75 millions d’euros, explique Jonathan Naas, conseiller technique en charge des transports au cabinet du maire Roland Ries. Il revient sur l’enterrement du projet :
« En 2010, le comité de pilotage a arrêté d’aborder cette question, puisque plus personne n’était prêt à payer le tunnel. Il s’est encore réuni quelques fois, à propos des aménagements vélos autour de la gare. Du coup, de notre côté, nous avons trouvé un plan B pour desservir les quartiers ouest, en faisant passer le tram [ndlr, prévu sur pneus, qui se fera finalement sur fer] par les boulevards et la porte Blanche. Si le tram était ressorti par la gare basse, il aurait été – comme pour le tram D vers Kehl – un moteur d’urbanisation de la zone… »
Mais de fait aujourd’hui, la décision – collégiale, assure Jonathan Naas – est de maintenir le projet au point mort.
« Une réflexion à long terme »
La SNCF, qui n’a pas souhaité s’étendre auprès de nous sur le sujet, précise qu’elle n’est pas décisionnaire dans ce dossier. Une partie de ses activités en gare de Strasbourg serait néanmoins progressivement déportée sur d’autres sites, à Oberhausbergen, Neudorf ou Mulhouse.
Le projet d’ouverture de la gare de Strasbourg à 360° pourrait néanmoins s’imposer d’ici quelques années, afin d’installer des parkings de stockage de voitures ou profiter des 20 hectares (selon Fabienne Keller) de foncier disponible et créer des activités tertiaires (locaux associatifs, bureaux, ateliers d’artistes) et du logement. « La réflexion sur l’utilisation de ces délaissés se fera mais sur long terme, précise-t-on à la Région Alsace, car elle est extrêmement lourde et complexe. » Elle nécessitera une réanimation du comité de pilotage collectivités-SNCF-RFF, une bonne dose de volonté politique et surtout, des montagnes de crédits publics.
Aller plus loin
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- Aménager l'arrière de la gare pour les usages urbains,
ou
- Permettre les développements futurs du transport ferroviaire (Transport de personnes, mais aussi fret) et en conséquence allouer prioritaire l'espace à proximité des gares à cet usage.
Pas certain que les intérêts et les vues d'une municipalité soient toujours pleinement compatibles avec les intérêts de l'ensemble du territoire de la région et du pays.
Par contre, ce qui est insupportable, c'est l'amateurisme du Comité de Pilotage qui avait venir le TramC (ex TramTrain, paix à son âme) sur la place de la Gare en ne se souciant aucunement des aspects techniques et financiers du passage sous les voies ferrées. Je fais référence au "tunnel de la Poste", donc.
A l'époque de la réalisation cette ligne C, il n'y avait aucune étude sérieuse sur ce tunnel. Aujourd'hui, seulement, on connait le coût de l'ouvrage : 75 millions d'euros. Oui, cela est coûteux, mais ce n'est pas surprenant. Aménager avant d'étudier, c'est comme placer la charrue avant les bœufs. Un peu de bon sens ne ferait pas de mal à tout nos décideurs.
Résultat des courses : nous avons un tram C qui ne sert à presque à rien (puisque il existait déjà un arrêt "gare centrale" pour les lignes A et D). Un secteur gare complètement encombré par les transports en commun. Un comble. Un carrefour Wilson / Wodli au bord de l'explosion avec des remontées impressionnantes de files de voitures dans toutes les rues adjacentes. De plus, les dommages collatéraux sont importants pour les riverains puisque la pollution engendrée par les gaz d’échappements est exacerbée, sans compter les coups de klaxons inadmissibles des auto-solistes qui s’évertuent encore à s'aventurer dans le centre-ville/quartier gare.
La gabegie et amateurisme, cela suffit. A quand, une vision globale, synthétique et ambitieuse pour ce secteur à enjeux ?
En tous les cas sur le papier ça avait de la gueule et du sens ... ils ont préféré faire dans le cliquant ...
Il aurait suffit de la faire continuer tout droit au carrefour Wilson et de la faire passer sous les lignes ferroviaires par la rue Wodli. On aurait ainsi eu deux avantages évidents:
1) Plus besoin de tunnel à 75M, le tram passait simplement sous un pont et rejoignais les lignes de RFF de l'autre côté de la gare. Avec une station tram sur les quais de la gare, le Tram-Train existerait aujourd'hui et on pourrait le qualifier d'embryon de RER.
2) On amenait le tram dans une zone qui est appelée tôt ou tard à un développement extrêmement important et deviendra un jour ou l'autre une extension du centre-ville et la couture urbaine manquante entre l'hypercentre et les faubourgs de l'ouest Strasbourgeois.
Quoi qu'il arrive, un tram sera nécessaire à cet endroit là, tout comme il l'est à Koenigshoffen.
Il existe déjà une réserve dans le tunnel de Rotonde pour y aménager une future station souterraine supplémentaire, mais le Tram C en surface passant par là pour desservir Koenigshoffen aurait été tout naturel aussi.
Quand on y réfléchit, cet avorton de ligne C qui va dans un mur, plus le tracé aberrant de tram au Neudorf qui évite soigneusement les zones de chalandise et de vie du centre du Neudorf, on se dit que l'équipe municipale précédente a vraiment eu tout faux avec ses extensions de tram ! Et ces décisions vont coûter très cher le jour où on sera obligé de revenir dessus !
En attendant, si quelqu'un peut m'expliquer la logique qui a aboutit à décider d'amener le tram sur le parvis de la gare en attente du creusement d'un hypothétique tunnel au coût tellement faramineux qu'il n'existera jamais, plutôt que de simplement le faire passer par la rue Wodli sous le pont ferroviaire, je serais très intéressé de savoir ce qui a conduit à une si mauvaise décision et surtout qui en sont les responsables. C'est une info qui me sera utile au moment de glisser mon bulletin dans l'urne au mois de mars.
Oui, ce "mur de la place de la gare" est une hérésie urbanistique.
Voici la petite et rapide histoire du TramC, pour la partie comprise entre Homme de Fer et Place de la Gare. Initialement, il s'agissait de réaliser la partie urbaine du TramTrain du Piémont des Vosges. Ce projet était intéressant sur le papier mais à cette époque, aucune étude n'était réalisée sur le tunnel sous la gare. En 2006, la municipalité sous Keller-Grossmann a profité d'une subvention dans le cadre du plan triennal "Strasbourg, Capitale européenne" pour l'allouer à la création de la partie urbaine du TramTrain dans sa partie comprise entre Homme de Fer et Place de la Gare. Le gros mensonge pour obtenir ces crédits était que le TramC devait faciliter la vie des eurodéputés puisque le tram aurait dû relier directement la gare au secteur des institutions européennes. Bien sûr, ce n'est pas du tout le cas aujourd'hui.
L'alternative politique est survenue en 2008. L'équipe de Roland Ries ne pouvait plus revenir en arrière puisque le projet était lancé en phase opérationnelle et les travaux allaient être lancés. L'étude sur le coût du tunnel n'a été réalisée que bien après la construction du tronçon urbain. Face au cout pharamineux de l'ouvrage, le TramTrain strasbourgeois a été enterré en catimini (en fait, il restait aussi à trouver 180 M€ pour électrifier les lignes SNCF de la section entre Strasbourg et Obernai. Voilà pourquoi on se retrouve avec un tram qui s'arrête Place de la Gare. Par opportunisme, absence de vision et négligence. De l'urbanisme "à la petite semaine", quoi.
Le tracé actuel n'est pas une erreur. Il permet de déposer les voyageurs à côté des entrées principales de la gare et permet de desservir la place de la gare et ses commerces.
"Il aurait suffit de la faire continuer tout droit au carrefour Wilson et de la faire passer sous les lignes ferroviaires par la rue Wodli. On aurait ainsi eu deux avantages évidents:
1) Plus besoin de tunnel à 75M, le tram passait simplement sous un pont et rejoignais les lignes de RFF de l’autre côté de la gare. Avec une station tram sur les quais de la gare, le Tram-Train existerait aujourd’hui et on pourrait le qualifier d’embryon de RER."
Le trafic ferroviaire est en augmentation et la gare de Strasbourg approche de la saturation. Il serait absurde d'y rajouter une ligne de tram avec une fréquence de 4 minutes. Il n'y a pas la place pour des quais de trams sur les quais de la gare.
" 2) On amenait le tram dans une zone qui est appelée tôt ou tard à un développement extrêmement important et deviendra un jour ou l’autre une extension du centre-ville et la couture urbaine manquante entre l’hypercentre et les faubourgs de l’ouest Strasbourgeois."
Le réaménagement de la gare basse ne commencera pas avant 2020 ou 2025. Un tracé passant derrière la gare aurait été plus coûteux, moins pratique pour les usagers et aurait desservit moins de monde.
"Il existe déjà une réserve dans le tunnel de Rotonde pour y aménager une future station souterraine supplémentaire".
N'importe quoi.
"Face au cout pharamineux de l’ouvrage, le TramTrain strasbourgeois a été enterré en catimini (en fait, il restait aussi à trouver 180 M€ pour électrifier les lignes SNCF de la section entre Strasbourg et Obernai.)"
Il fallait 75 M€ pour le tunnel. L'électrification de la ligne n'était pas obligatoire. Il y a des modèles de trams-trains bimodes.