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Grève à l’usine d’incinération : pas de pollution selon la direction

Le conflit social qui oppose les salariés de Sénerval à leur direction perdure depuis maintenant plus d’un mois sans réelle évolution. Après les accusations de pollution de l’atmosphère par les syndicats, la direction répond finalement qu’il n’en est rien, et accuse les syndicats d’utiliser l’aspect sanitaire dans une négociation salariale.

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L'usine d'incinération de Strasbourg, située au Rohrschollen, au sud de Strasbourg (Photo TT / Rue89 Strasbourg)

L'usine d'incinération de Strasbourg, située au Rohrschollen, au sud de Strasbourg (Photo TT / Rue89 Strasbourg)
L’usine d’incinération du Rohrschollen, toujours inactive après plus d’un moins de grève. (Photo TT / Rue89 Strasbourg)

Voilà plus d’un mois que les déchets de Strasbourg sont envoyés dans les autres usines d’incinération du groupe Séché Environnement. Car à l’usine du Rorschollen, gérée par Sénerval, une filiale du groupe Séché, c’est toujours le piquet de grève. Entrées et sorties bloquées, fours d’incinération éteints… et dialogue inexistant. Il y a deux semaines, les syndicats ont publié une vidéo montrant que des poussières toxiques se dégagent régulièrement, selon eux, de l’usine lors d’opérations de maintenance, devenues très fréquentes à cause d’un matériel vieillissant.

Injoignable ou indisponible, la direction de Sénerval n’avait pas répondu à ces accusations. Aujourd’hui, Henri Petitgand, directeur de la communication du groupe Séché Environnement, produit enfin quelques réponses. En préambule, il rappelle :

« Nous tenons à souligner que nous reconnaissons que les conditions de travail qu’ont connu les salariés ont été difficiles, nous ne le nions pas. De plus, les travaux sur les chaudières (une revendication des salariés, ndlr) commenceront en mai et devraient être terminés d’ici octobre. »

Mais chaque jour, les salariés consignent dans les « cahiers de quart » les anomalies ou incidents qui se sont déroulés dans l’usine. Bien qu’un bon nombre d’alertes aient été lancées concernant les conditions de travail, la case à remplir par la direction reste très souvent vide (vu). Sur ce point, Henri Petitgand, qui n’est pas à Strasbourg, n’a aucune réponse.

Selon Séché : « Pas de pollution atmosphérique »

Henri Petitgrand réfute les accusations d’atteinte à l’environnement. Suite à un incident dans un silo qui s’est déroulé dans la nuit du 8 au 9 janvier, Sénerval a révélé le rapport d’une étude menée par Aair Lichens, « experts spécialistes de la détection de la pollution de l’air par les lichens ». Sur leur site, on peut lire :

« Cette méthode exclusive, reconnue et brevetée utilise les lichens dans le cadre du suivi environnemental de l’industrie, en particulier des usines d’incinération, notamment les UIOM ( usines d’incinérations ménagères ). Elle permet l’analyse précise du taux de dioxine. Les dioxines sont un point-clé de la pollution de l’air. »

L’étude commandée par la direction de Sénerval

Le rapport répète à plusieurs reprises que grâce à différents facteurs (vent faible et structure de l’usine), « une très grande proportion des retombées liées à cet incident concerne […] principalement le site de l’usine même et l’environnement immédiat de l’installation ».

Le communiqué assure que :

« Il n’y a pas de chance que les zones habitables du Neuhof situées à un peu plus de 2 km au nord-nord ouest, ou la zone du Stockfeld située à 2 km au nord ouest, soient effectivement concernées dans la mesure où la forêt du Neuhof fait obstacle. De même à l’Est, toute habitation est protégée par le Rhin et par le canal d’Alsace, et par la forêt du Rohrschollen. »

La santé des salariés, enjeu d’un bras de fer

En novembre, la direction a proposé aux salariés une plombémie, un examen biologique calculant la proportion de plomb présente dans l’organisme, pour mesurer l’impact des poussières sur leur santé. Les résultats se sont avérés négatifs pour tous les salariés qui se sont présentés : la proportion de plomb dans le corps était normale. Mais dans son rapport, le médecin en charge des examens se dit étonné du faible nombre de salariés présents à la visite médicale : 22 sur 57 seulement.

Atef Labben, salarié de Sénerval et délégué syndical, explique :

« Effectivement, nous n’étions pas plus intéressés que ça par le dépistage. Pourquoi ? Parce que l’examen consistait seulement en une plombémie. Or, les Refiom (résidus d’épuration des fumées d’incinération des ordures ménagères, ndlr) contiennent toutes sortes d’autres matières cancérigènes (CMR) comme la dioxine, le furane et autres métaux lourds toxiques comme le nickel, le beryllium ou le cadmium. »

Le médecin n’a pas jugé nécessaire d’aller au-delà de la plombémie, au vu des résultats obtenus. Cependant, une étude publiée par l’Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS) montre que les matières citées plus haut sont celles qui auraient le plus de chance d’être présentes dans les Refiom, bien que le plomb reste apparemment le polluant de référence à surveiller.

Le rapport du médecin du travail

Priorité aux salaires ou aux conditions de travail ?

Henri Petitgand assure que la première préoccupation des salariés serait la question salariale. À ce titre, la direction promet une prime de 1 600 euros, mais celle-ci ne satisfait pas les salariés qui arguent que leurs collègues faisant le même travail sur d’autres sites du groupe Séché recevraient une prime frôlant les 2 000 euros. Une information que Henri Petitgand réfute catégoriquement :

« Les primes distribuées par le groupe Séché font parties des plus élevées dans la profession. Dans d’autres grands groupes comme Suez ou Véolia, les primes touchées par les salariés sont bien plus faibles. »

De son côté, Atef Labben objecte que certes, le salaire est un élément de friction, mais que ce n’est pas la priorité des salariés :

« Depuis le début du conflit, à chaque réunion, la direction élude volontairement la question des conditions de travail et ne se concentre que sur celle des salaires. Quand j’ai plusieurs fois abordé les questions de santé, sécurité et d’impact environnemental, on m’a répondu : “on est pas là pour parler de ça”. »

Le conflit s’enlisant, les syndicats ont alerté les services de l’État. Le préfet du Bas-Rhin a diligenté une enquête de la Dreal et effectué un signalement au procureur de la République.


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