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Grillages, contrôles et incompréhensions : le retour de la frontière franco-allemande

Depuis le 16 mars, à l’entrée de Kehl, la police allemande contrôle chaque passant, cycliste, automobiliste, camionneur ou passager du train régional. Photoreportage sur le retour de la frontière franco-allemande.

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Grillages, contrôles et incompréhensions : le retour de la frontière franco-allemande

Jeudi 23 avril, 10h51. Un train régional allemand quitte la gare de Strasbourg, direction Offenburg. Trois hommes se trouvent à son bord. Au deuxième arrêt du trajet, le voyage se termine pour eux. Contrôlés par la police allemande, les trois voyageurs n’ont pas d’attestation de domicile ou de travail en Allemagne. Ils sont donc sommés de rentrer en France… à pieds.

Des contrôles en gare de Kehl

« Moi aussi, j’aimerais bien savoir quand ces contrôles prendront fin », affirme l’un des policiers allemands en service dans la matinée du 23 avril à Kehl.

Il y a un jeune professeur, venu de Nancy pour rejoindre sa famille à Mannheim. En anglais, il tente de persuader un policier au crane rasé : « Je ne supporte pas d’être seul et je n’ai plus d’argent. Je vais devenir fou ! » Un autre homme jure en polonais quand il comprend qu’il ne pourra pas rentrer au pays. Le policier tente de se montrer compatissant : « J’aimerais bien savoir quand ces contrôles prendront fin… »

 À Kehl, les policiers allemands contrôlent chaque train en provenance de France.

Devant le poste de contrôle des voitures et autres poids lourd, une policière explique son travail habituel, hors période de pandémie. Il consiste toujours à vérifier des papiers, mais en cherchant plutôt des individus interdits de territoire en Allemagne. Depuis le 16 mars, la consigne est bien plus stricte : « Aujourd’hui, on ne peut être dehors en Allemagne qu’avec des papiers allemands ou une attestation de travail en Allemagne. »

Contrôlés à Kehl, les trois passagers du train régional pour Offenbourg doivent rentrer en France. (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

Un pont fermé depuis le 16 mars

Les commerçants de Kehl vivent mal cette fermeture de la frontière franco-allemande. Pour certains, en particulier les tabacs, les Français représentent la majorité des ventes. Malgré tout, Jordan (le prénom a été modifié) a tenté d’acheter des clopes de l’autre côté du Rhin ce jeudi 23 avril. Après s’être vu interdit l’accès au territoire allemand, le jeune homme s’arrête au milieu du pont : « Il y a du monde coté allemand dans le jardin, mais personne côté français. »

Depuis le 16 mars, la frontière est fermée côté allemand.

Pour plusieurs habitants de Kehl, la fermeture des frontières était une mesure nécessaire pour stopper la propagation du virus. Friedrich (le prénom a été modifié), opticien dans la rue principale de la ville, estime ainsi que si « les autorités avaient tardé, ils auraient confinés Kehl avec la France. J’aurais trouvé ça normal. »

Le tram D ne circule plus jusqu’à Kehl.

Mais nombre d’habitants dénoncent une autre mesure des autorités allemandes à l’égard des travailleurs français. Interrogée sur son espoir concernant le déconfinement à venir en Allemagne, Angelika, éducatrice spécialisée de 42 ans répond : « Je trouve très grave que les Français qui travaillent ici n’ont même pas le droit de faire leurs courses ici. »

Au bout du pont Beatus-Rhenanus, des grillages barrent l’accès pédestre à l’Allemagne.

Ceci est une frontière

Seuls les travailleurs transfrontaliers et les transporteurs de marchandises sont autorisés à entrer sur le territoire allemand.
Direction Strasbourg, la police française a aussi mis des contrôles en place.
Ceci est une frontière.
Pour les travailleurs transfrontaliers, le franchissement de la frontière est toujours autorisé.

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