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La Sécu encore trop riche, l’affaire PIP le prouve

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La Sécu encore trop riche, l’affaire PIP le prouve

Fallait-il retirer systématiquement toutes les prothèses PIP des Françaises ? Encore une fois, notre pays a cédé à la panique générale sans aucune précaution et ce, d’autant plus facilement que c’est la Sécu qui paie… Donc personne apparemment ? Hélas non… Mais puisque ce sera aux suivants d’honorer la facture…

Les faits: Poly-Implant-Prothèse (PIP), société française basée dans le Var, fabricant d’un dispositif médical implantable (DMI) (une prothèse mammaire en silicone), est attaquée pour avoir substitué le gel de silicone médical par du gel de silicone industriel. J’aimerais connaître la différence sur le plan médical puisqu’il est accusé d’être responsable de huit cancers du sein dont un décès en France. Mais cette incidence du cancer du sein par prothèse reste largement inférieure au taux constaté dans la population générale. De plus le taux de rupture des prothèses PIP n’est pas supérieur au taux de rupture des autres prothèses (autre source).

Juridiquement, un DMI est différent d’un médicament. Alors qu’un médicament a besoin d’une autorisation de mise sur le marché (AMM), les DMI exploitaient un vide juridique. Pour démontrer la conformité d’un DMI, le fabricant choisit lui-même un organisme notifié dans la liste des organismes désignés par les autorités compétentes de l’Union Européenne (UE). C’est cet organisme qui sera à l’origine du marquage CE du DMI. PIP a choisi TUV Rheinland, un organisme allemand, pour obtenir le marquage CE de toutes leurs prothèses. Mais ces organismes préviennent systématiquement les fabricants avant leurs visites de contrôle de la chaîne de fabrication. On peut donc dès lors se poser la question de la valeur de ces contrôles.

Environ 30 000 françaises (soit une femme sur 1000 en France) ont reçu des prothèses PIP sur 500 000 femmes implantées. Soit 16 femmes sur 1 000 en France ont été invitées à consulter leur chirurgien pour une « explantation préventive », tel est le mot d’ordre du ministre de la santé depuis le 23 decembre 2011. Beau cadeau de Noël ! Une de mes patientes, implantée avec deux prothèses PIP depuis plus de 10 ans, avait dépassé la date de réimplantation nécessaire. Grâce à cette affaire, elle n’a eu à payer que ses nouvelles prothèses (580€) et le dépassement exceptionnel du chirurgien (variable de 1000 à 3000€). Le reste, l’acte hors-nomenclature est pour la Sécu, après entente préalable.

Cette dépense de la collectivité n’est basée à ce jour sur aucune démonstration scientifique !

Une réaction nationale dictée par l’émotion

La France est le seul pays du monde à prôner l’explantation de toutes les prothèses PIP sans signes de rupture ou fissure. Depuis l’affaire du sang contaminé, notre pays réagit à l’émotion à chaque scandale sanitaire et écarte toute raison. Juste avant une élection présidentielle, mieux vaut être prudent et ouvrir le parapluie, et tant pis pour les comptes publics.

Une prothèse mammaire fini tôt ou tard par se rompre selon mes confrères chirurgiens plasticiens, PIP ou non. Pourquoi n’a-t-on pas appliquée une simple surveillance échographique régulière (41,48€ par session), certainement moins chère que l’explantation systématique et n’explanter alors que les prothèses abîmées ? Pourquoi la Cnam (Caisse nationale d’assurance maladie) indemnise-t’elle entièrement l’explantation, même lorsqu’il s’agit d’un acte esthétique et non médical au départ ?

Tout le monde attaque tout le monde

Et bonne chance ensuite à la Cnam pour récupérer ses billes ! Elle porte plainte contre PIP, qui n’existe plus, pour escroquerie et tromperie aggravée et contre son fondateur, devenu subitement sans ressource. Le dernier assureur connu de PIP, Allianz, a aussi porté plainte contre PIP. Je doute qu’on puisse compter sur Allianz pour régler la facture. Même TUV Rheinland ira devant le tribunal contre PIP, et accuse la société gardoise de l’avoir trompé sur la composition du gel de silicone.

Certains avocats proposent à leur clientes de porter plainte contre leur chirurgien pour défaut d’information. Les fournisseurs en gel de silicone industriel se défendent en assurant qu’ils ignoraient tout de l’usage médical que faisait PIP du gel. Bref, les avocats vont connaître une croissance de leur chiffre d’affaire mais le monde de la santé, lui, sera du côté des débiteurs.

Entre temps, la société PIP est rachetée par deux sociétés luxembourgeoises, dont les administrateurs sont décédés : un suicide et une mort par overdose dans le même appartement. Puis la société est rachetée par un fond de pension américain, basé dans un paradis fiscal et dont l’administrateur vit dans les Îles Vierges, lequel se tue plus tard accidentellement à moto sur les routes varoises…

Heureusement que je blogue anonymement !


#Santé

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