Laurent Furst, remuant député-maire (Les Républicains) de Molsheim, n’a pas pu attendre la rentrée pour relancer le siège politique contre la fusion des régions. Il faut aller vite, parce que le créneau de l’Alsace éternelle est sévèrement disputé, notamment par le député (LR) du Haut-Rhin, Jean-Louis Christ, le député (LR) et président du conseil départemental du Haut-Rhin Éric Straumann, le maire (LR) de Mulhouse Jean Rottner, etc.
C’est ce qui explique sans doute qu’aucun d’entre eux n’était au courant lundi après-midi du nouveau mouvement lancé par Laurent Furst, baptisé d’une manière assez directe « Rendez-nous l’Alsace ». Ce mouvement sera présenté officiellement vendredi, avec un site internet, une charte et une liste de signataires. Pour ce député du Bas-Rhin, l’Alsace n’a rien à faire dans la région « Grand Est » et devrait bénéficier des mêmes institutions que la Corse, à savoir un conseil régional et les deux conseils départementaux fusionnés en une collectivité unique.
Retour en 2013…
Oui, c’est bien ce qu’avait proposé l’actuel président de la région Grand Est, Philippe Richert (LR) aux Alsaciens, par référendum en avril 2013. Le résultat n’avait pas débouché sur un oui franc et massif comme Philippe Richert l’espérait. L’Alsace a donc laissé passer cette mini-réforme institutionnelle et la fusion des régions menée par le gouvernement est venue se superposer à tout ça ensuite.
Mais dans le processus, grâce notamment aux accents d’Alsace assassinée largement entretenus par une partie de la droite locale, le régionalisme alsacien a pris de l’ampleur, un sentiment vite capté par Unser Land. Le parti régionaliste a réalisé plus de 10% des suffrages exprimés lors des élections régionales de décembre 2015, des scores importants qui manquent à la droite notamment… dans la circonscription de Molsheim.
En 2014, le coup régionaliste de l’été était venu de Jean Rottner
Laurent Furst espère donc surfer sur ce courant régionaliste, à l’occasion des échéances électorales de 2017 qui procéderont au renouvellement de son mandat de député. Il sera suivi par une partie de la droite locale, contre celle encore fidèle à Philippe Richert, ce qui promet quelques soubresauts à l’intérieur des sections alsaciennes de Les Républicains. Ainsi Jean-Rottner, également vice-président du conseil régional, n’a pas souhaité s’exprimer sur le mouvement de Laurent Furst. L’an dernier, à peu près à la même époque, le maire de Mulhouse avait lancé une « pétition pour l’Alsace » mais il est devenu beaucoup plus discret depuis…
En revanche, Jean-Louis Christ « soutient totalement » Laurent Furst :
« Les Alsaciens ont été trahis par Philippe Richert, qui est même allé jusqu’à créer une nouvelle taxe avec la gauche. Il pense à sa carrière avant tout. L’Alsace n’est plus défendue depuis la disparition d’Adrien Zeller (ancien président du conseil régional d’Alsace, ndlr). Donc je vais suivre avec intérêt la démarche de Laurent Furst, notamment comment il compte inscrire ça vis à vis de Nicolas Sarkozy… Mais je suis d’accord avec l’objectif affiché et je suis prêt à le rejoindre. »
Réactions enthousiaste dans le Haut-Rhin, prudente dans le Bas-Rhin
Même discours, chez Éric Straumann :
« Je suis sur la même longueur d’onde que Laurent Furst. Nous devons fusionner les compétences des départements et de la région dans une collectivité unique alsacienne, c’est ma conviction depuis longtemps et je l’ai maintes fois exprimée. Je suis content que Laurent Furst porte ce combat un cran plus loin. »
Frédéric Bierry, président (LR) du conseil départemental du Bas-Rhin, est plus prudent. Il ne parle pas de « conseil unique » mais préfère pointer ses « coopérations renforcées avec le Haut-Rhin » et les efforts des départements pour défendre ce qu’il appelle « l’excellence alsacienne. » Mais a-t-il peur lui aussi de perdre l’Alsace, veut-il qu’on lui rende sa région ? Frédéric Bierry ne répond pas.
Unser Land voit son positionnement « validé »
Ceux qui se frottent les mains, ce sont les régionalistes d’Unser Land. Depuis 2013, ils se posent en uniques défenseurs de l’alsacianité, du drapeau Rot und Wiss, du dialecte, du régime local d’assurance maladie, du Concordat et de tout ce qui peut être considéré comme faisant partie du patrimoine culturel alsacien. Après avoir bénéficié des replis identitaires exprimés par la droite contre la réforme territoriale, ils surfent désormais sur l’installation chaotique de la région « Grand Est », présentée comme distante et sans âme.
Présidente d’Unser Land, Andrée Munchenbach insiste :
« On est très heureux d’apprendre que M. Furst reprend notre combat pour une collectivité locale alsacienne. Mais on peut douter de sa sincérité, lui qui s’inscrit dans la ligne de Nicolas Sarkozy, peu favorable à la décentralisation. Et puis, une fois qu’on nous aura rendu l’Alsace, il faudra encore discuter des compétences et de l’autonomie fiscale. Et là dessus, je doute que Laurent Furst veuille aller contre le gouvernement de droite, s’il est élu. »
Philippe Richert reste silencieux
Directement visé par cette démarche, Philippe Richert est resté silencieux, bercé par les spectacles, en partie financés par la Région, en Avignon. Son entourage indique que Philippe Richert est « président de tout le Grand Est » et qu’il n’a pas à commenter les initiatives de tel ou tel député. Fut-il alsacien, fut-il parmi ses anciens soutiens, fut-il sur sa route dans le paysage politique qui se dessine à droite…
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