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Deux professeurs de Strasbourg vont débattre de la maladie de Lyme devant l’Académie de médecine

La maladie de Lyme sera le sujet d’une session de la très sérieuse Académie de médecine, à Paris mardi 20 septembre. Deux professeurs des Hôpitaux de Strasbourg, centre national de référence, feront le déplacement, les Pr Daniel Christmann et Benoît Jaulhac. Ils seront face au Pr Christian Perronne, qui tente de faire évoluer le consensus autour de la détection et de la prise en charge de cette maladie infectieuse, transmise par les tiques.

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Une tique pleine de bactéries de type Borrellia (Photo université de l'Oregon / FlickR / cc)

La détection et le traitement de la maladie de Lyme va-t-elle bientôt évoluer en France ? Alors qu’aux États-Unis et au Canada, la prise en charge de cette maladie infectieuse a progressé au gré de la prévalence des infections, la France reste attachée aux conclusions de la conférence de consensus de 2006. Or c’est lors de cette conférence qu’a été mis en place le protocole de détection par un test ELISA, puis Western-Blot si le résultat est positif avec des seuils de détection adaptés aux maladies rares (voir nos précédents articles).

Fin juin, le gouvernement a présenté un plan de lutte national contre la maladie, suite aux demandes répétées d’associations de victimes et d’un appel d’une centaine de médecins relayé dans la presse. La question de la détection et du traitement de la maladie de Lyme est régulièrement posée par ces associations, qui assurent qu’elle est bien plus fréquente qu’elle n’est diagnostiquée. Une prise en charge tardive se traduit par de sérieuses complications, souvent après un parcours de soins cauchemardesque.

Deux pharmaciens strasbourgeois condamnés

À Strasbourg, Viviane Schaller, qui dirigeait un laboratoire d’analyses, a été condamnée en 2015 pour « escroquerie » à l’assurance maladie. Le tribunal correctionnel l’a déclarée coupable d’avoir abaissé le seuil de détection du test ELISA et réalisé des tests Western-Blot systématiques. Promoteur du Tic-Tox, présenté comme un remède contre les effets de la maladie de Lyme, Bernard Christophe a été condamné lors du même procès pour « exercice illégal de la profession de pharmacien ». Ils ont tous les deux fait appel de leur condamnation, un nouveau procès doit se tenir en octobre devant la Cour d’appel à Colmar.

C’est dans ce contexte tendu que l’Académie de médecine a choisi de tenir une session consacrée à la maladie de Lyme, mardi 20 septembre à Paris. L’initiative vient du Pr François Bricaire, infectiologue à la Pitié-Salpêtrière :

« La maladie de Lyme est dans l’actualité, l’Académie de médecine a vocation à éclairer le débat par des arguments scientifiques. Les polémiques alimentées par des débordements ont toujours des effets néfastes en matière de santé publique. »

Une tique pleine de bactéries de type Borrellia (Photo université de l'Oregon / FlickR / cc)
Une tique pleine de bactéries de type Borrellia (Photo université de l’Oregon / FlickR / cc)

Le centre de référence à Strasbourg, tenant d’une ligne conservatrice

Deux professeurs des Hôpitaux universitaires de Strasbourg feront le déplacement. Le Pr Daniel Christmann, longtemps responsable du service des maladies infectieuses au Nouvel hôpital civil et principal rédacteur du consensus de 2006, rappellera « comment poser un diagnostic de maladie de Lyme ». Le Pr Benoît Jaulhac, responsable lui du laboratoire de bactériologie de Strasbourg, où est basé le centre national de référence des Borrellia, le nom de famille de la maladie de Lyme, traitera de la « performance des méthodes biologiques dans le diagnostic et le suivi de la maladie de Lyme ».

Les deux professeurs strasbourgeois considèrent que la détection d’une maladie de Lyme ne pose pas de difficultés particulières et que c’est l’utilisation des tests qui est inadaptée, pas les tests eux-mêmes. Les Pr Christmann et Jaulhac prescrivent un traitement antibiotique simple contre l’infection, et refusent de voir dans la maladie de Lyme une pathologie chronique.

Pour la première fois dans une enceinte scientifique, ils seront face au Pr Christian Péronne, responsable du service des maladies infectieuses de l’hôpital de Garches, qui pense exactement l’inverse :

« Cette session est importante, car la littérature scientifique sur la maladie de Lyme a beaucoup évolué après des années d’obscurantisme. Sauf en France malheureusement, où on reste attaché à une fable qui devient chaque année plus ridicule. Il est urgent que les états d’esprit évoluent, les infectiologues sont en attente de positions officielles claires. Mais surtout, de nombreux patients sont en errance et ce ne sont pas trois semaines d’antibiotiques qui peuvent les soigner… »

La question divise les médecins, dont une partie sont aussi attachés à freiner les résistances aux antibiotiques, ce qui implique de moins les utiliser. Habituellement, les sessions de l’Académie de médecine donnent lieu à des compte-rendus, rédigés par les organisateurs. La désignation du centre national de référence des Borrellia doit être renouvelé dans les mois qui viennent, Strasbourg est à nouveau candidat. L’Alsace est la région de France la plus touchée par la maladie de Lyme.

 


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