Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

MasterChef : des candidats strasbourgeois dénoncent un bidonnage

Plusieurs Strasbourgeois amateurs de cuisine se sont rendus à Marseille, pour participer à la Grande Cuisine, une épreuve du jeu télévisé MasterChef, diffusé sur TF1. Mais sélectionnés ou non, tous en sont revenus amers, persuadés qu’il n’y a jamais eu de compétition.

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89 Strasbourg, abonnez-vous.

Très exposés au Mistral, les candidats ont dû dresser leurs plats dans le froid et le vent. (Photo Franck Picard)

Très exposés au Mistral, les candidats ont dû dresser leurs plats dans le froid et le vent. (Photo Franck Picard)
Très exposés au mistral, les candidats ont dû dresser leurs plats dans le froid et le vent. (Photo Franck Picard)

La diffusion n’a pas encore débuté, mais déjà la cinquième saison de Masterchef, un concours pour les amateurs de cuisine diffusé sur TF1, fait parler d’elle. Malheureusement, il n’est pas question des prouesses culinaires des chefs en devenir, mais des conditions du tournage de l’émission du mercredi 4 mars, sur le parvis du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem) à Marseille.

Car Shine France, la société de production, avait vu les choses en grand : 300 personnes devaient dresser un plat froid préparé à l’avance dans le but de séduire les papilles de trois grands chefs. Une trentaine de candidats devait sortir de cette épreuve appelée « La Grande Cuisine » et être autorisée à poursuivre l’aventure d’abord à Marseille, puis en studio à Paris.

Julie Damaso Merx a créé la page qui rassemble tous les mécontents et recoupe les informations (doc remis)
Julie Damaso Merx a créé la page qui rassemble tous les mécontents et recoupe les informations (doc remis)

Une page « Masterfake » avec 3 000 fans

Mais selon plusieurs participants, le script de cette sélection a été écrit à l’avance. Un constat partagé par quatre candidats strasbourgeois tous déjà passés par Chefs à Bord, l’émission culinaire d’Alsace 20, dont Julie Damaso Merx, nutritionniste à Strasbourg :

« Lors des présélections en régions, la production ne nous a jamais dit qu’on serait 300 pour la Grande Cuisine. Parce qu’on se serait bien douté qu’il n’était pas possible de concourir dans ces conditions. J’ai participé aux éditions précédentes et c’était déjà compliqué avec une centaine de participants ! Et effectivement, entre le mistral glacial, qui faisait voler les poussières sur le parvis du musée, les glacières congelées, les chefs indisponibles et les journalistes qui ne s’intéressaient qu’à quelques candidats, il ne s’agissait pas d’un concours mais bien de figuration. »

(Dessin Manu XYZ / NRV)
(Dessin Manu XYZ / NRV)

Ancienne judoka de haut niveau, Julie Damaso Merx n’a rien contre une défaite, mais à condition qu’elle ait le sentiment d’avoir eu sa chance. En colère, elle a créé la page « Masterfake » sur Facebook, qui comptait lundi 16 mars près de 3 000 fans. Une impressionnante collection d’articles fait état des témoignages de candidats aux ressentis similaires, furieux d’avoir été « utilisés » par Shine pour faire des images sans jamais avoir eu le sentiment de concourir. Julie Damaso Merx reprend :

« J’avais réalisé une tartelette aux poireaux restructurée avec une chantilly au lard et un crumble de cacahuètes. Un goûteur, chargé d’alerter un des chefs du jury, vient vers moi et trouve mon plat très bon, il me complimente. Il lève la main pour attirer l’attention de l’équipe de production mais personne ne vient… Il finit par se lasser d’attendre mais je le retiens en lui disant que j’étais venue de Strasbourg pour participer à Masterchef. On insiste et finalement, un cadreur vient filmer mon plat quelques secondes puis repart sans disposer d’explications sur ma cuisine. À cet instant, j’ai compris que je n’étais pas sélectionnée, quelle que soit ma cuisine. »

En finale sur Alsace 20, éliminé au premier tour sur TF1

Et encore, Julie était dans les premiers rangs, là où était la vaste majorité des candidats sélectionnés. Une chance que n’ont pas eue Alexandre Bringia et Michael Jager, qui était en finale de Chefs à Bord. Son pâté en croûte de pigeon, avec pickles (cornichons) et légumes marinés aux épices a impressionné le goûteur, qui a tout tenté pour faire venir le chef du jury de Masterchef :

« Le chef n’a goûté qu’un élément sur cinq et c’était terminé pour moi. Après des jours de trajets, de préparation et des heures à attendre dans le froid et le vent, je n’ai même pas eu le sentiment que j’aurais pu l’emporter. »

Devant la vague de protestations et d’accusations, Shine s’est défendue notamment sur Europe 1, où la directrice des programmes Angélique Sansonnetti affirme que les goûteurs et les chefs ont travaillé en toute indépendance :

Sélectionnée, Leïla Martin remet en cause la sincérité du concours

À la fin de l’interview, Angélique Sansonnetti met ces accusations sur le compte de la déception des perdants. Sauf que des gagnants partagent la même amertume, et parmi eux Leïla Martin, autre surdouée de la cuisine strasbourgeoise. Elle avait préparé un tajine de poulet aux citrons confits revisité qui a beaucoup plu. Elle est néanmoins très amère après son expérience marseillaise comme elle l’écrit sur son blog :

« Je suis surtout triste pour tous ceux qui ont pris des cours, ont beaucoup travaillé et beaucoup investi pour participer à cette émission avec le sentiment de participer à une compétition. C’était mon état d’esprit aussi avant de constater les placements avantageux des premiers rangs, le jeu des caméras, les profils télégéniques des sélectionnés… À la fin de la journée, je m’en suis voulu d’avoir été si naïve. J’ai été sélectionnée mais ma déception est identique à celle des autres candidats : ce n’était pas un concours et je ne saurai jamais si mon plat était le meilleur parmi 300 autres. »

Comme tous les autres candidats, Leïla Martin a voulu participer à Masterchef pour l’exposition médiatique que cela représente et pour gagner les 100 000€ que TF1 promet au vainqueur, une somme qui lui permettrait de financer les débuts de son entreprise. Elle souhaite devenir traiteur. Alexandre Bringia gère un restaurant, à Hirtzbach dans le Haut-Rhin. Michael Jager et Julie Damaso Merx sont en pleine reconversion vers la cuisine. Leurs petits plats ne sont pas perdus pour tous.


#Alsace 20

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles

Autres mots-clés :

Plus d'options