La société de promotion immobilière colmarienne ACTA, dirigée par Marc Rinaldi, a acquis des terrains autrefois utilisés par la papeterie LANA, dans le quartier de la Robertsau à Strasbourg. Actuellement occupés par des friches industrielles, Marc Rinaldi prévoit d’y construire un ensemble de six immeubles, dont trois tours de plus de 15 étages pour atteindre 250 à 280 logements. À titre de comparaison, les trois tours Black Swans qui doivent s’élever dans le quartier Deux-Rives représentent un programme à 180 logements.
Lancé il y a plus de 3 ans, le projet à la Robertsau, entièrement financé par des fonds privés, est bloqué par l’Eurométropole de Strasbourg qui n’entend pas déclasser le terrain industriel en zone constructible et à le rendre public pour l’intégrer dans les schémas d’urbanisme à venir (PLU).
Le promoteur à la rescousse de l’entreprise
Pour comprendre d’où vient ce projet, il est nécessaire de faire un peu d’histoire. Fin 2005, l’entreprise de papeterie LANA traverse une grave crise. Les caisses sont vides et elle n’a même plus les moyens de financer le plan social. Ses dirigeants se tournent alors vers le promoteur colmarien Marc Rinaldi et sa société ACTA, qui achète les terrains et le foncier de l’entreprise, ce qui abonde la trésorerie de l’entreprise. Un premier projet de plus de 250 logements est imaginé avec l’architecte Claude Vasconi, à qui les Strasbourgeois doivent déjà le Nouvel Hôpital Civil ou l’hôtel du Département.
En octobre 2013 : le danois Lasse Brinck rachète l’entreprise, les marques et les machines dans un montage imaginé par l’Adira et soutenu par l’Eurométropole. Il ne reste que 59 employés. Deux mois plus tard un accord est signé entre LANA et ACTA pour que ce dernier puisse récupérer les terrains entre la rive gauche du Mulhwasser et la rue de l’Anguille et y réaliser une opération immobilière.
Mais le terrain de 15 000 m² est toujours, selon le plan d’occupation des sols (POS) de Strasbourg en zone industrielle, donc inapte à recevoir autre chose qu’une usine ou des entrepôts. Depuis presque trois ans pourtant, ACTA rencontre les élus de la Ville et de l’Eurométropole pour faire avancer son projet… en vain. Plus inquiétant pour lui, le plan local d’urbanisme (PLU) qui doit remplacer le POS et qui sera bientôt soumis à enquête publique, ne comporte pas de changement.
250 à 280 logements, 6 bâtiments, des tours de 15 étages
Les réunions ont beau se succéder au centre administratif place de l’étoile, l’Eurométropole ne veut toujours pas donner son feu vert à ce projet. La collectivité n’a pourtant pas hésité pour modifier le POS en 2013 pour que la paroisse Saint-Louis puisse envisager de réaliser son nouveau foyer et ce, malgré les positions fortes et constantes dans le quartier invoquant le caractère privé de l’opération et la participation de la Robertsau à l’effort de construction de logements.
Silence dans les schémas de transport, d’urbanisme et déplacement
De son côté, ACTA continue d’avancer, le promoteur vient de finir en octobre le diagnostic environnemental de ce projet. Dans ce volumineux document, on apprend que le terrain nécessitera une dépollution suite à son utilisation depuis 1883 pour une activité de papeterie : huiles, métaux, scories, résidus de gaz présents dans les sols… mais rien d’insurmontable, selon le cabinet d’études environnementales.
Le plus inquiétant est que le terrain envisagé se situe en zone inondable, « par débordement de l’Ill et du canal du Muhlwasser », une vulnérabilité « considérée comme acceptable » conformément au Plan de Protection contre le Risque Inondation du secteur (PPRI). La conception du projet ne prévoit pas de sous-sol mais des parkings en rez de chaussés et les logements au dessus.
Mais ACTA ne semble pas avoir les relais suffisants à l’Eurométropole pour que ce projet se réalise. À ce jour, ni le plan local de développement ni le plan local d’habitat ne prévoit de projet d’une telle ampleur à la Robertsau. Car 280 logements, c’est plus de 600 personnes, les déplacements qui vont avec et des infrastructures qu’il faut aménager comme les écoles.
Pour autant, l’Eurométropole accuse un déficit dans la construction de logements neufs par rapport à ses besoins, d’environ 1 000 logements par an selon le PLU. Le projet d’ACTA tomberait donc à pic. Pourquoi reste-t-il dans les tiroirs ? Étrangement, les élus concernés ont tous décliné de répondre à nos questions.
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : LANA à la Robertsau repris avec ses 59 emplois
Sur le Blog de la Robertsau : LANA : la reprise c’est maintenant !
Sur l’Alsace.fr : À Strasbourg, Lana joue la carte du carton de sécurité
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