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Pourquoi nous sommes pour le droit de vote des étrangers aux élections locales

Plusieurs socialistes de Strasbourg, dont Paul Meyer et Syamak Agha Babaei, signent une tribune en faveur du droit de vote des étrangers aux élections locales. Ils répondent à André Reichardt, responsable de l’UMP dans le Bas-Rhin, qui avait publié un texte contre cette proposition de François Hollande dans les DNA.

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Pourquoi nous sommes pour le droit de vote des étrangers aux élections locales

(Photo Banlon 1964 / FlickR / CC)

L'info à trois voixDans une tribune publiée dans les DNA, M. Reichardt, sénateur UMP du Bas-Rhin et président de l’UMP 67, nous exposait les raisons qui guidaient son choix « républicain » contre le droit de vote des étrangers en utilisant des arguments qui sont pour le moins discutables.

Si une majorité de Français, selon les dernières enquêtes d’opinion, considère positivement ce droit désormais, il est légitime que cela puisse soulever des questions, et il est tout aussi légitime d’y apporter des réponses dans le cadre d’un débat républicain.

Mais avant d’aborder le fond même de ce débat, il faut évacuer toutes les insinuations nauséabondes qui surfent sur la haine de l’étranger et de l’autre, devenues monnaies courantes ces dernières années, et qui ne sont pas dignes du débat républicain. Il ne s’agit que de la participation aux élections locales, pour des résidents habitant depuis plus de 5 ans en France. Si le résident étranger peut se présenter aux élections sur une liste, il ne peut occuper de fonctions exécutives.

L’utilisation régulière de ce débat par une certaine droite comme un chiffon rouge, est destinée à inquiéter, et à caractériser ceux qui portent cette proposition comme les tenants du « parti de l’étranger », « en recherche d’un électorat nouveau faute d’avoir perdu celui des Français », est insupportable et fait mal à la démocratie.

Quels que soient les auteurs de ces discours, ils oublient que la première responsabilité des élus reste la cohésion d’une société, d’une ville en l’occurrence, autour de valeurs communes, sur un territoire commun, pour former une communauté de destins. Ils oublient aussi que les évolutions sociologiques rendent les électorats moins figés que jamais. Les arrière-pensées liées à ce débat se construisent donc souvent sur des fantasmes qui ne tiennent comptent ni de la réalité, ni de l’idéal.

Les choses sont pourtant simples, nous voulons que les citoyens de résidence prennent toute leur part dans la vie locale, c’est un enjeu majeur de cohésion et de vivre ensemble. Les résidents étrangers vivent dans notre ville et contribuent à son rayonnement et son développement. Nombre d’entre eux souhaitent prolonger cette contribution économique, sociale et culturelle par une participation à la vie de la cité. N’est-ce pas là une volonté que l’ensemble des Républicains devraient saluer ?

Comment refuser à ces citoyens-résidents qui habitent souvent depuis de nombreuses années dans notre ville de participer aux débats qui concernent la vie quotidienne de la cité ? Comment refuser à un résident d’origine maghrébine ou d’Afrique noire habitant depuis 20 ou 30 ans à Strasbourg, un droit qu’un étranger communautaire tout juste arrivé à Strasbourg exerce automatiquement ?

Obtenir la nationalité est devenu impossible

Alors arrive un autre argument souvent développé, s’ils souhaitent participer aux élections, les étrangers n’ont qu’à demander la nationalité française. Les porteurs de cet argument, comme Monsieur Reichardt, ne connaissent probablement pas le parcours de combattant qu’est devenu l’accès à la nationalité, notamment après dix ans de politique de stigmatisation de l’étranger (souvent considéré comme maghrébin ou africain et musulman). Car s’il savait le nombre de refus essuyés par des résidents strasbourgeois, sous des arguments divers et variés, alors qu’ils résident depuis plus de dix ans et sont insérés socialement et actifs dans la vie associative et publique strasbourgeoise, ils modéreraient nettement leurs propos.

Le plus souvent le refus à peine motivé reprend des arguments économiques. Aussi, comme nous l’avons vu ces dernières années, il vaut parfois mieux être un riche Qatari et résider dans les palaces de luxe pour profiter des largesses de la République plutôt qu’être une citoyen engagé dans la vie de sa cité.

L’argument d’acquisition de la nationalité est donc en porte-à-faux par rapport à la réalité des politiques pratiquées par l’administration de la République. Nous souhaitons fortement que le changement incarné par François Hollande puisse ici également se traduire par un changement de pratique, passant d’une politique d’exclusion et de stigmatisation au développement de l’insertion sociale des résidents étrangers.

Enfin, l’Alsace comme la France sont des terres d’accueil, et s’il est une question que nous devons nous poser c’est si cette mesure participe à l’amélioration de notre vivre ensemble ? Dans des villes où le brassage des cultures et des pratiques amène à connaître et fréquenter l’autre, nous devons choisir la solution qui permet l’insertion, le respect et la participation de tous les résidents, quelle que soit leur origine, à la vie de la cité. C’est en tout cas le modèle de développement que nous souhaitons pour notre cité.

Syamak Agha Babaei, conseiller municipal et communautaire (PS)
Paul Meyer, conseiller municipal délégué à la vie étudiante et vie numérique (PS) 
Thomas Risser, trésorier adjoint de la section PS Victor Schoelcher
Jean-Baptiste Gernet, bureau national du MJS, section PS Pierre Bérégovoy


#André Reichardt

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