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Procédure collective et manifestations : les ouvriers de Clestra veulent « faire payer » les frères Jacot

Réunis en assemblée générale lundi 20 novembre, les ouvriers licenciés veulent maintenir la pression sur les repreneurs de Clestra. Le syndicat CGT organise une procédure collective pour licenciement abusif.

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Procédure collective et manifestations : les ouvriers de Clestra veulent « faire payer » les frères Jacot
À l’assemblée générale des anciens salariés de Clestra Métal, le lundi 20 novembre 2023.

La colère n’est pas retombée. Bien au contraire. Dans la matinée du lundi 20 novembre, une soixantaine d’anciens salariés de Clestra sont réunis en assemblée générale à la Maison des associations de Strasbourg. Licenciés le 23 octobre après avoir mené une grève pendant plus de trois mois, les ouvriers de la métallurgie sont tendus. « Ils n’ont pas été payés depuis juillet. Ils sont dans une extrême précarité », rappelle François Hennrich, futur ancien délégué syndical CGT de l’entreprise renommée Unterland Metal (ex-Clestra Metal). Dans la salle, les métallurgistes voudraient en découdre avec leur ancienne direction. À chaque évocation des actionnaires – les frères Jacot du groupe Jestia – ou de l’ancien directeur de Clestra – Rémi Taieb – un ouvrier explose. L’un maudit la direction de tous les noms. L’autre regrette d’avoir « été trop gentil pendant la grève… »

Au premier plan : François Hennrich, délégué syndical CGT chez Clestra Metal.Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg / cc

« Le groupe Jestia m’a dégouté »

Au fond de la salle, Olivier écoute avec attention. L’ouvrier plieur de 51 ans incarne à la fois le drame social en cours et l’opportunisme des repreneurs de Clestra. À découvert « de plus de 1 000 euros » depuis septembre, l’ancien salarié de la métallurgie a dû solliciter ses parents à plusieurs reprises « pour faire des courses ». Fin octobre, il reçoit un appel et une proposition de reclassement chez Mobidécor, une autre entreprise du groupe Jestia. Olivier raconte :

« L’appel n’a même pas duré une minute. J’ai trouvé que c’était scandaleux de m’appeler après m’avoir licencié. J’ai refusé la proposition de reclassement parce que le groupe Jestia m’a dégoûté. Avec cette grève, puis le licenciement, on a été mis à rude épreuve… »

Autre ancien ouvrier, Thierry, n’a pas été appelé pour reprendre son ancien poste de travail, transféré de Clestra à Illkirch-Graffenstaden chez Mobidécor dans la zone d’activité du Port autonome de Strasbourg. « J’ai 59 ans, je suis trop près de la retraite pour qu’ils m’appellent », explique-t-il, amer. L’ex chef d’équipe avait regardé les offres de reclassement, constatant que son poste était le même mais payé 500 euros nets de moins.

À gauche, Thierry, 59 ans, ancien chef d’équipe chez Clestra. À droite, Olivier, 51 ans, ancien plieur de l’usine d’Illkirch-Graffenstaden. Photo : Fantasio Guipont / Rue89 Strasbourg / cc

Une manifestation et des procédures prud’homales

« La reprise de Clestra, c’est l’histoire d’un hold-up, résume le secrétaire générale de l’union bas-rhinoise de la CGT Laurent Feistauer. Les frères Jacot ont piqué la marque, les brevets et les machines pour laisser ensuite les salariés sur le carreau. » Bientôt applaudi, le syndicaliste conclut en décrivant le recours juridique qui sera bientôt lancé contre la direction du groupe Jestia : « Il ne peut y avoir de licenciement économique si l’activité de production continue au sein du groupe. Ce sera donc à la justice des prud’hommes de trancher. » Selon le délégué syndical de l’entreprise et responsable régionale de la CGT Métallurgie, Amar Ladraa, « une soixantaine d’anciens ouvriers de Clestra ont signé pour initier une procédure pour licenciement abusif. »

La quasi-totalité des ouvriers présents souhaitent manifester devant l’entreprise Mobidécor au courant du mois de décembre. Pour Amar Ladraa, cette mobilisation reste utile pour les anciens grévistes :

« Le rassemblement devant Mobidécor doit nous permettre de maintenir la pression sur les dirigeants du groupe Jestia dans le cadre de la procédure aux prud’hommes. On a intérêt à poursuivre et à attaquer les frères Jacot jusqu’au bout parce que pour l’instant on a eu le strict minimum niveau indemnités de départ. Il faut faire payer les frères Jacot. »

Une manifestation à Bruxelles

La réunion se termine sur des considérations plus pratiques. Le représentant du personnel François Hennrich explique aux ouvriers la procédure à suivre pour éviter de se retrouver sans mutuelle. Puis il annonce à l’assemblée de licenciés qu’ils seront inscrits à Pôle Emploi à partir de début décembre. En attendant les prochains versements, notamment du solde de tout compte des salariés, le syndicaliste CGT préfère avertir ses camarades : « Il y aura encore une période où ça va être compliqué financièrement… »

Une manifestation des ouvriers de Clestra est prévue mardi 12 décembre à Bruxelles. La Confédération européenne des syndicats a appelé à se mobiliser pour refuser « un retour de l’austérité en Europe » et réclamer une politique plus ambitieuse en matière d’investissements publics. L’union départementale de la CGT a déjà prévu la location d’un bus qui partira de la place de l’Étoile à Strasbourg pour la capitale belge.


#Clestra

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