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Promesses non-tenues, programmes flous… L’Elsau reste à l’écart des élections municipales

Malgré l’approche du scrutin municipal, les habitants de l’Elsau hésitent entre abstention et vote sans conviction. Depuis plus de 5 ans, le supermarché est fermé et aucune mesure propre au quartier n’a été présentée.

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Promesses non-tenues, programmes flous… L’Elsau reste à l’écart des élections municipales

« Ici, c’est comme au bled. Sauf que les politiques, ils font leurs promesses en cravate. Comme au bled en revanche, ils ne font rien une fois élus. » Maxime (le prénom a été modifié) enchaîne les clopes devant l’entrée d’un immeuble de la rue Watteau à l’Elsau.

Fin de matinée du mercredi 4 février, vers 11 heures, le marché s’approche de sa fin. Entre les étals de légumes, de fruits, de vêtements et de bijoux à 5 euros, quelques Elsauviens négocient le prix des oignons frais ou d’une casserole : « Normalement, elle est à 25 euros, pour l’Elsau, je la fais à 22 », assure un vendeur.

Bonnet, veste et jogging noir, Maxime porte un regard sombre sur les élections municipales. D’ailleurs, il n’ira pas voter. Il ne se sent pas représenté, d’autant qu’il ne connaît aucun Elsauvien sur une liste. Les habitants du quartier seraient-ils moins engagés qu’ailleurs à Strasbourg ?

« Il manque des lieux pour que les différentes générations se rencontrent ici. Les anciens pourraient alors donner les vraies valeurs de la vie aux plus jeunes, celles qui donnent envie de s’engager… »

« J’avais voté pour elle à l’époque, mais le quartier a été abandonné »

Mains jointes derrière le dos, longue barbichette grisonnante, Boudemar traverse l’allée du marché en saluant les vendeurs. Son choix n’est pas encore fait, le retraité n’a pas encore lu les programmes et attend la prochaine réunion pour les élections municipales dans le quartier. Mais à l’heure de rédiger ces lignes, aucune rencontre n’était programmée à l’Elsau avant le premier tour des élections… « Il faut voter, ça peut changer les choses », affirme le vieil homme, sans grande conviction.

Spontanément, Boudemar évoque la candidature de Catherine Trautmann (parti Socialiste). « J’avais voté pour elle à l’époque (des années 90, ndlr) », se souvient-il. Mais l’heure n’est pas à l’espoir pour Boudemar. Il estime que son quartier a été abandonné par les pouvoirs publics : « Nous, on demande pas grand chose, un peu de propreté, un peu de sécurité », résume-t-il. De l’unique réunion dédiée aux élections municipales dans le quartier, l’habitant retient surtout l’absence de plusieurs têtes de liste.

Le supermarché fermé au cœur de la défiance

La colère est bien plus sensible chez Hatice, occupée à faire ses courses dans l’une des deux seules épiceries du quartier. Si cette habitante de l’Elsau a voté aux élections municipales de 2014, elle ne se rendra pas aux urnes le 15 mars. Pour cette fille d’Elsauviens, « les personnes âgées sont laissées à l’abandon. » Le supermarché, fermé depuis plus de cinq ans, complique la vie des personnes à mobilité réduite. Cette épave de tôle, toujours couverte d’une bâche « Ici ouvre bientôt un Carrefour Express », est au cœur de la défiance elsauvienne à l’égard des responsables municipaux.

Promise par l’ancien adjoint de quartier Erik Elkouby, la réouverture du supermarché de l’Elsau intéresse surtout le gérant des épiceries Cebalim. Bayram Cebik estime avoir perdu 60% de son chiffre d’affaires depuis la fermeture de la grande surface. « On était complémentaire, explique le commerçant, les gens venaient au Leclerc pour acheter de l’alcool et du porc avant de faire quelques courses chez nous… » Le commerçant ne sait pas encore pour qui voter. « Je ne connais pas les candidats », justifie-t-il.

« Ils proposent quoi pour le quartier ? »

Midi passé, une odeur de friture et de steacks hachés émane de la roulotte de Nourdine, située entre la rue Watteau et le centre socioculturel. Le rappeur Lord Jaks vient de commander un sandwich. Originaire de Schiltigheim, le jeune traîne souvent à l’Elsau. Interrogé sur son intérêt pour les élections municipales, il répond par une autre question : « Ils proposent quoi pour le quartier concrètement ? »

« Des propositions apparaissent petit à petit pour le quartier, mais c’est parce qu’on met la pression sur les candidats », estime Marc Ferrante, habitant du côté pavillonnaire de l’Elsau. L’artiste plasticien a récemment cosigné une tribune enjoignant les têtes de liste à formuler des propositions concrètes pour le quartier. Les réponses des listes municipales seront bientôt publiées sur Rue89 Strasbourg… si elles arrivent. Mais pour Michel Witasse, également résident d’une maison elsauvienne, le désintérêt des habitants du quartier pour les élections municipales est parfaitement compréhensible : « Ça fait cinq ans qu’on se fout de notre gueule. »


#élections municipales 2020

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