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Reprise du Roller Derby : des cris, des larmes, des bleus et des patins

En 2010, elles démarraient à trois dans un parking. Aujourd’hui, elles sont une quarantaine et elles organisent ce samedi une triple rencontre à Strasbourg, devant près de 150 personnes. Rencontre avec les « culs d’enfer », ou les Hell’s ass derby girls, nos filles punk sur roulettes.

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Reprise du Roller Derby : des cris, des larmes, des bleus et des patins

Les Hell’s Ass lors d’un match à Kaiserlautern le 19 mai 2012 (Photo Denis Stempher)

Mardi soir, 20h. Une vingtaine de jeunes femmes patientent devant la porte du gymnase Saint-Florent, avec, à la main, une paire de rollers. Ce sont les Hell’s Ass Derby Girls (les « Culs d’enfer »). L’unique équipe strasbourgeoise de roller derby vient s’entraîner une dernière fois avant un triple match ce samedi, contre les équipes de Besançon et de Dijon, au gymnase du Hohberg.

Un sport de contact et du théâtre

Le roller derby est un sport de contact monté sur roues, venu des États-Unis. On vous explique. Deux « jammeuses » doivent faire le tour de la piste et traverser un groupe de huit « bloqueuses » pour marquer des points. « C’est un vrai sport de contact, c’est ce qui m’a donné envie d’en faire », explique Céline alias Hell O’Junkitty, l’une des fondatrices de l’équipe. Elle fait une distinction que nombre de joueuses reprennent :  « C’est un sport brutal, mais pas violent ».

Les membres de l’équipe arrivent de tous horizons. Céline est responsable d’une médiathèque, Hanane est professeure d’EPS, Cécile est ingénieure-chimiste, Lili fait des piercings… Les looks rock’n roll, avec force tatouages et anneaux, sont peu nombreux (trois ou quatre sur la vingtaine de filles présentes). De toutes façons, les différences finissent par s’estomper. Patins aux pieds, les jeunes femmes deviennent toutes des guerrières, aux noms fleuris de « Flagada Slut », « Bandyd’Ass » ou « Lii U Dallas ».

Car le roller derby contient une bonne part de spectacle. En plus des noms, les jours de matchs, les filles se maquillent et se costument. L’évènement de samedi s’intitule « Cupidon ton cul« . En plus des collants, on parle de boa rose et de paillettes. Pour Céline, « ce qui m’a attiré, c’est l’aspect sportif », tandis que pour Cécile, « le spectacle est très important, ça fait partie du truc. Si les gens payent cinq euros pour venir, c’est aussi pour voir le show ». Barbara alias « Sweety Poison » arbitre :

« Nos pseudos sont proches des noms de scène. C’est une manière de s’assurer qu’une fois sur la piste, on est une joueuse et rien qu’une joueuse. Dans le même temps, c’est vrai qu’en tant qu’aidante aux personnes en difficulté, je ne serais pas perçue de la même façon si on connaissait mon nom au boulot et si j’y allais avec mon look de derby ».

Ceci dit, sa patronne est venue la voir une fois et elle a beaucoup aimé, alors…

Voir un reportage vidéo de L’Alsace sur les Hell’s Ass

Sur les deux heures d’entraînement, une bonne demi-heure est consacrée à l’échauffement, avec et sans les patins, afin d’éviter les blessures. En enfilant son casque et ses protections pour les coudes, les genoux, les poignets et les dents, « Sweety Poison » détaille :

« Il existe des « minimum skills » (aptitudes minimales) et des tests d’endurance et d’équilibre. Il faut savoir tomber mais aussi prendre et recevoir un coup ».

Sur le banc, quelques jeunes femmes ne se sont pas changées. Barbara est parmi elles. Sa jambe lui fait mal. « Si l’une d’entre nous a mal, elle ne joue pas », la rude loi du derby.

Un jeu « de contact » (Photo Dennis Stempher)

Les équipes sont solidaires entre elles

Inutile également de chercher une quelconque rivalité entre les équipes qui tourneront sur la piste samedi. Il n’existe pas de compétition officielle. Le plaisir du jeu domine et l’entraide est de mise pour la logistique. Souvent, l’équipe qui accueille loge et nourrit ses adversaires. Céline se souvient :

« On aurait eu du mal à se monter sans les filles de Paris. Créer une association, organiser les premiers entraînements… Souvent, les joueuses d’autres équipes viennent aider à arbitrer les matchs. Ceux qui seront là samedi viennent en partie de Suisse ».

Des affirmations à nuancer, la compétition peut être un peu plus féroce quand même (voir la vidéo d’Arte ci-dessous). Barbara est aussi la responsable administrative de l’équipe. Quand on l’interroge sur le temps que prend l’organisation des matchs, sa réponse fuse :

« Le derby, c’est la vie ! Quand on commence, on devient très vite membre de la « derby family », on prend un nom de derby. Le mien, « Sweety Poison », vient de « Poison Ivy », la vilaine de Batman. Je peux être douce avec les copines et leur rentrer dedans sur la piste. »

Les Hell’s Ass parvenues à maturité

Si le triple match de samedi signale quelque chose, c’est la réussite de l’équipe. Fondée en 2010 par Céline et deux amies, elles sont aujourd’hui 38 licenciées. Deux facteurs expliquent ce succès. « Sweety Poison » évoque l’expérience, « les joueuses plus anciennes expliquent mieux ». Céline se réjouit que les « Culs d’enfers » se soient associées à Strascross, l’association de promotion de street hockey :

« Avec eux, on a pu réserver des heures en gymnase. On avait commencé dans un parking… L’entraînement s’arrêtait quand les gardiens nous mettaient dehors. Aujourd’hui, on reçoit 2 000 euros par an de la mairie pour nos déplacements. Ça reste peu. »

Une session de recrutement est actuellement en cours. Autant que des joueuses, les Hell’s Ass Derby girls sont à la recherche de bénévoles pour organiser les matchs et remplir le rôle d’arbitre. Les hommes sont les bienvenus, paraît-il.

Y aller

« Cupidon ton cul », 3 « boots » de roller derby, samedi 16 février à 14h au gymnase du Hohberg, 6 rue du Hohberg à Strasbourg. Entrée : 5€.

Aller plus loin

Sur Rue89 : Pourquoi les filles sont dingues de Roller Derby

Sur Arte.tv : Reportage sur le roller derby en Allemagne

Le site web des Hell’s Ass derby girls


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