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Un millier dans les rues de Strasbourg, contre un gouvernement jugé trop libéral

Il faisait frais mardi matin, voire froid. Mais gants et bonnets chaussés, prêts à en découdre, environ 1 000 personnes se sont rassemblées pour manifester contre la « politique libérale du gouvernement » et les ordonnances réformant le Code du travail. Il s’agissait de la quatrième manifestation depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron.

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Un millier dans les rues de Strasbourg, contre un gouvernement jugé trop libéral

Est-ce que la mobilisation contre la politique économique du gouvernement s’essouffle ou est-ce que la fraîche météo a découragé les militants ? Le 12 septembre, les opposants étaient entre 3 200 (selon la CGT) et 2 600 (selon la police) à manifester à Strasbourg. Après des manifestations les 21 septembre et le 19 octobre, une quatrième marche mardi matin a mobilisé 1 200 personnes selon les syndicats et 900 selon la police. L’appel de la CGT était pourtant rejoint par FO, FSU, Solidaires, l’Unef et la CNT.

Elle portait toujours le même message : contre les politiques économiques du gouvernement, jugées trop libérales et favorables au patronat. La hausse prévue de la CSG est sur toutes les lèvres ainsi que la réforme à venir de l’assurance chômage. À Strasbourg, Jacky Wagner, secrétaire général de la CGT du Bas-Rhin, est toujours là, à chaque manifestation. Pour lui c’est clair :

« Nous ne sommes toujours pas d’accord avec la loi Macron et la politique générale du gouvernement au niveau social. Ce qui nous scandalise le plus c’est la remise en cause de certains droits qui existent depuis 1968 voire même avant. De revenir à une époque qui est révolue où le patronat a le droit de licencier les gens sans justification. Notre revendication est de revenir sur les « ordonnances travail, » pour le bien des chômeurs, de la Sécurité sociale et de notre futur en général. C’est le Medef qui tire tous les bénéfices de cette politique. Les salariés sont laissés pour compte. »

En plus des représentants de la fonction publique, des salariés du privé, des retraités et de membres des partis politiques de gauche, des Allemands manifestaient parmi les Strasbourgeois. Des membres du syndicat Verdi, une poignée à avoir fait le déplacement. Verdi, est le deuxième syndicat en Allemagne, derrière IG Metall. Force ouvrière (FO) a également affirmé un soutien national pour cette manifestation, mais à Strasbourg, ils étaient beaucoup plus discrets que les membres de la CGT.

La CGT plus mobilisée que FO à Strasbourg. (Photo CM / Rue89 Strasbourg / cc)

Selon les organisateurs, le parcours est un peu plus court que les précédentes manifestations. Au départ de la place Kléber, le cortège est allé place de l’Homme de fer jusqu’à la rue du Vieux-Marché-aux-vins, puis rue du Vingt-Deux Novembre, rue des Francs-Bourgeois puis et de la Division Leclerc. Ensuite le cortège s’est dirigé vers la place du Corbeau, après avoir passé le pont, ils ont emprunté la rue du Vieux-Marché-aux-Poissons avant de revenir place Kléber par la rue des Grandes Arcades. Une boucle pour interpeler les Strasbourgeois.

« C’est pas les salariés, c’est pas les retraités, c’est les financiers qu’il faut taxer »

Les manifestants ont appelé à taxer les financiers plutôt que les retraités, et ont scandé « Ma-cron président-des patrons ». Jean-Paul a 73 ans est là pour manifester contre la réforme des retraites mais aussi pour soutenir les étudiants, largement touchés selon lui dans ces réformes :

« Je suis contre l’augmentation de la CSG également, dont le taux représentera 8,3% des retraites. Après, c’est soit disant parce qu’il faut faire des économies pour financer la Sécurité sociale. Qu’est ce que ça veut dire, qu’on va être moins bien remboursé ? »

En effet, le projet de loi de finances pour 2018 prévoit une hausse de 1,7 point du taux affectant les revenus d’activité et les pensions de retraite. Une mesure particulièrement controversée du budget 2018 de la Sécurité sociale. Cependant, mardi 14 novembre, le Sénat a supprimé la hausse de la CSG applicable aux retraites. Pour que ce retrait soit définitif, les députés doivent se prononcer en ce sens. Le gouvernement disposant d’une majorité confortable à l’Assemblée, un vote dans les même termes que le Sénat semble peu probable.

Monique a 69 ans. Adhérente à la CGT des retraités, elle est présente pour soutenir les chômeurs, comme son fils. Selon elle, ce sont les plus affaiblis, les étudiants et les chômeurs qui vont pâtir des réformes menées par le gouvernement. Elle est également contre la réforme des retraites :

« De mon temps, on travaillait pour payer les retraites de personnes qui n’avaient pas forcément beaucoup cotisé, qui ne pouvaient pas. Maintenant en temps que retraité, on nous dit que nous sommes un poids pour la société. On est traité comme des vaches à lait, c’est honteux. »

Pour Monique et Jean-Paul, les retraités ne doivent plus être les cibles du gouvernement. (Photo CM / Rue89 Strasbourg / cc)

Jean-Paul est présent pour défendre les intérêts des salariés des secteurs privé et public. Pour lui, on demande toujours plus aux salariés :

« Le changement, ça ne se fera pas en claquant des doigts ! Les avantages aujourd’hui de cette politique, ils vont aux plus fortunés avec la suppression de l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) notamment. Les ordonnances, ça profite aux grosses entreprises. Elles pourront licencier et se payer des machines. Il y aura de plus en plus d’intelligence artificielle dans les entreprises, au détriment des employés. »

Un peu plus loin, Bernard a 42 ans, il est étudiant à Strasbourg. Pour lui c’est clair :

Ordonnances, réformes sociales, la politique du gouvernement est jugée trop libérale. (Photo CM / Rue89 Strasbourg / cc)

« C’est vrai qu’aujourd’hui il fait un peu frais mais c’est important d’être là. Je viens contre les ordonnances. Aujourd’hui, est mis à mal tous ce qu’on avait. Je remets en cause la convention 66 qui charge le salarié de négocier avec le patronat. Mon autre message c’est de dire que l’Union européenne nous coûte bien trop cher, c’est 50 milliards qui manquent au budget de l’État parce qu’ils vont à l’UE. »

Un autre étudiant, Cem, 21 ans semble déçu par le cheminement que prend le gouvernement. En deuxième année d’Histoire, il participe à la manifestation avec plusieurs amis :

« Je suis contre la Loi travail, la précarisation du service public, la sélection dans les universités. Je ne suis pas juste étudiant, je suis parfois intérimaire. La politique de Macron st contre les droits des étudiants et des travailleurs. »

Kian est également de la partie. Il a 19 ans, étudiant en première année d’histoire de l’art à Strasbourg. Lui n’est pas là pour manifester forcément contre Macron et son gouvernement mais pour soutenir une unité mondiale :

« Pour beaucoup ça semble utopique. Finalement tous les syndicats, l’Unef, le NPA, la CGT les mouvements alternatifs ou LGBT, on a tous le même combat. On souhaite que le monde soit meilleur. »

Le sourire aux lèvres, il se satisfait de l’ambiance de cette manifestation, malgré le froid :

« Il y a une bonne ambiance, de la bonne musique, on fait de belles rencontres. Les gens de n’importe quel horizon se rassemblent. »

De nouvelles manifestations à venir

Pour Jacky Wagner, la mobilisation « ne va pas s’arrêter là » :

« Le but, c’est d’insuffler la lutte dans les entreprises. C’est là que ça peut bouger, ça peut plus paralyser qu’une manifestation interprofessionnelle. La difficulté, c’est de faire comprendre aux salariés et aux étudiants qu’il y a un problème. On veut dire aux gens pourquoi on est là et que pour lutter il faut nous rejoindre ! Ce qui est en train de se passer ça concerne tout le monde. »

La prochaine manifestation ne pourra cependant pas se tenir avant janvier, en raison des restrictions de sécurité liées au Marché de Noël. Avant cela, Jacky Wagner prévoit des actions qui pourraient se mettre en place à Hautepierre ou à Cronenbourg.

Le cortège de la manifestation du 16 novembre, rue du Vieux-Marché-aux-Vins. (Photo CM / Rue89 Strasbourg / cc)

Les ordonnances doivent encore être ratifiées par l’Assemblée nationale du 21 au 24 novembre avant un vote le 28, un rendez-vous qui mobilisera de nouveau les syndicats. La CFDT et la CGT ont déposé des recours devant le Conseil d’État, afin de contester certaines mesures.


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