
À Strasbourg, une marche fleurie pour célébrer la culture et les lieux de convivialité, dimanche
Le collectif du 23 janvier organise une marche fleurie à Strasbourg, dimanche 9 mai. Malgré l’annonce de la réouverture progressive des lieux de la culture, le secteur appelle à rester vigilant sur les conditions sanitaires de cette reprise et demande plus de mesures de soutien.
Dimanche 9 mai, le collectif du 23 janvier appelle à arpenter les rues de Strasbourg des fleurs à la main. Ce groupe de défenseurs de l’art et de la culture dans le Grand Est annonce une marche fleurie pour « célébrer les lieux de convivialité, les lieux qui manquent, ceux où l’on a repensé le monde et qui sont maintenant fermés en y déposant des fleurs », explique la comédienne Aude Koegler.
Les manifestants iront donc fleurir les bars, les restaurants, les salles de spectacles ou encore les musées sur le parcours de la marche. La manifestation débutera à la Laiterie à 13h et se poursuivra jusqu’au musée alsacien, en passant par le musée d’art moderne et la Choucrouterie. La fin de la manifestation coïncidera avec le début de la marche pour la climat, qui partira de la place d’Austerlitz.
Associer les acteurs culturels à la prise de décision
Pour le collectif du 23 janvier, cette « marche citoyenne de vigilance et d’écoute » est un moyen de demander au gouvernement d’associer les acteurs du secteur culturel aux prises de décisions, notamment sur les conditions sanitaires de réouverture. Le 19 mai, les salles de spectacle et les cinémas pourront ouvrir avec 35% de leur jauge puis le 9 juin, la jauge pourra monter à 65% des capacités de l’établissement. La levée totale des restrictions d’accueil est prévue pour le 1er juillet.
« On va vers du mieux, mais il faut être vigilant », souligne Aude Koegler. Dans un communiqué, le collectif demande à ce que tous les acteurs du secteur « soient protégés à minima un an après la reprise normale de l’activité, notamment par des mesures spécifiques pour les plus fragiles ». Les membres du collectif espère la reconduite de l’année blanche, accordée en mai 2020 par le Président de la République et permettant la prolongation de l’indemnisation chômage jusqu’au 31 août 2021 pour les intermittents du spectacle sans activité depuis plus d’un an.

« La santé ne se limite pas à être en forme »
Dimanche 9 mai, cela fera deux mois que le Théâtre National de Strasbourg est occupé par les étudiants de l’École supérieure d’art dramatique, qui réclament entre autres le retrait de la réforme de l’assurance chômage et des mesures de soutien aux intermittents et aux travailleurs précaires du secteur. « Quelque chose doit changer dans la façon dont on regarde la culture », ajoute Aude Koegler, heurtée par la scission des activité « essentielles » et « non-essentielles » depuis le début de la crise sanitaire. Antonia de Rendinger, comédienne, humoriste et membre du collectif du 23 janvier déplore la classification de l’art dans le deuxième groupe :
« La santé ne se limite pas à être en forme et à avoir des bonnes analyses sanguines. On a tous besoin que notre vie se résume à autre chose que manger, regarder Netflix et recevoir de l’argent. L’art, la beauté et le dépassement de soi sont des choses qui donnent du sens à la vie ».
Y aller
Marche fleurie : dimanche 9 mai à 13h, départ de la Laiterie Artefact, rue du Hohwald, à Strasbourg
Même pas peur du virus du conformisme !
MARS 2020 | PAR YAKANA
Yakana vient de nous quitter. Dessinateur historique du Ravi, découvert par le grand public dans 28 Minutes sur Arte, il bataillait avec sa seule arme - l'humour - depuis un an contre un maudit cancer. En pleine crise du Coronavirus, il n'a pas lâché ses crayons et, inquiet de la santé fragile du mensuel régional pas pareil, il appelle à défendre la presse libre pour éviter "une épidémie ravageuse de conformavirus"... Nous republions une tribune libre, écrite par Yakana lors des attentats de 2016, d'une saisissante actualité. Brillante définition de l'art - aussi futile qu'indispensable - du dessin de presse en toutes circonstances. Chapeau l'ami et l'artiste !
"Parmi les nombreux effets désastreux et pervers des attentats à répétition sur nos démocraties, il y a le blast émotionnel sur le dessin de presse.
Le dessin de presse est un art futile, fragile, compliqué, éphémère, périssable. A la charnière de l’idée et de l’image, du sens et de l’humour, jamais tout l’un ni tout l’autre. Il est pratiqué par des vagabonds casaniers, des poètes ricaneurs. Des alcooliques, des drogués, des mystiques contemplatifs et solitaires. De solides libertaires. Des écrivains liquides. Des punks aristocrates. Des sales gosses, de mauvais esprits. En tout cas des désaxés, des marginaux, des pirates. Les plus fortunés sont corsaires du Roy. Des sans-dents, des traine-savate, des moins-que-rien. En voilà un qui flambe à la lumière, pendant que les autres se brûlent les ailes. Pour un dessin qui tue, combien de dessinateurs qui vivotent, mais meurent à l’économie.
Ils sont aujourd’hui tués une deuxième fois. Par le dessin d’attentat. Répétitif, massif, uniforme, obligatoire, puéril, graphique, circulatoire. Viral. Et dans 99 % des cas, d’une mièvrerie abominable. A faire se retourner les victimes dans leurs tombes encore fraîches.
Pratiqué par le « fantassin de la démocratie » chevronné comme par le fragile collégien traumatisé par son exposition aux médias, lesquels sont notamment pleins de dessins d’attentats, le dessin d’attentat déboule comme un rhinocéros qui charge en pleurant. Il écrase tout sur son passage. Le sens comme l’image. En inondant le terrain de larmes et de cris guerriers.
Il y avait une petite maison dans la prairie sauvage où poussaient les iconoclastes. Le rhinocéros iconovore à peau dure piétine tout cet écosystème en poussant le mugissement bouleversé du « Je suis…! », au coup de clairon des réseaux sociaux.
Les personnes traumatisées par des chocs graves sont « prises en charge » par des psychologues. Encore un ou deux attentats graves, et ils seront « pris en charge » par des dessinateurs…
Emotion oblige, dira-t-on, et en ces moments où l’humour doit se faire tout petit devant l’Histoire, légitime réaction du groupe blessé qui se serre les coudes, qui serre les rangs.
Sauf que les dessinateurs de presse ont besoin d’air et d’espace pour dire « J’ai …! ». J’ai une idée intéressante, par exemple. Originale. Poétique. Ou politique, ou philosophique. Ou stupide. Mais différente.
Et c’est ainsi qu’on n’aurait même pas peur.
Nous savons bien que les terroristes ont l’intention de nous pomper l’air, mais c’est dans l’émotion médiatique étouffante qui suit leurs forfaits que nous suffoquons. Le crime est presque parfait.
Le dessin d’attentat viral déboulera encore, hélas. Pourvu qu’il ne soit pas le virus qui tue définitivement le dessin de presse lui-même. Et la démocratie avec.
Yakana"
pour favoriser la "Start-up nation".
Nous aurons chacun notre ordinateur pour ne plus communiquer qu' avec la part sombre de nous-mêmes...
Noir désir...