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En Alsace, Caritas aide des milliers de mères isolées touchées par l’inflation

Caritas constate une augmentation importante du nombre de personnes qui demandent de l’aide alimentaire et financière en Alsace. Près de 30% sont des mères isolées.

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En Alsace, Caritas aide des milliers de mères isolées touchées par l’inflation

Olivier Coupry, directeur de Caritas Alsace, décrit méticuleusement l’augmentation de la pauvreté que son association observe en 2022 et 2023, lors d’une conférence de presse mercredi 15 novembre. L’association a fourni des denrées alimentaires, réglé des factures impayées ou accompagné socialement 10 000 ménages en 2022, soit 25 000 personnes dont un tiers d’enfants. « C’est 20% de plus qu’en 2021 », s’alarme Olivier Coupry :

« En 2023, même si l’année n’est pas terminée, nous avons une nouvelle augmentation de 10% de notre fréquentation avec des pics dans certains lieux, comme la permanence de l’Arc-en-ciel au centre-ville de Strasbourg, où l’on constate une hausse de 57% par rapport à 2022. C’est évidemment lié à l’inflation sur les produits alimentaires, sur l’énergie, et à la sortie de la pandémie. »

AvatarOlivier Coupry, directeur de Caritas Alsace

Surtout, 60% des personnes aidées dans les 83 lieux d’accueil alsaciens (épiceries solidaires, permanences) de Caritas sont des femmes, contre 50% en 1989. « Cette proportion augmente lentement, mais de manière constante », précise le directeur de l’association. En 2022, 27% des ménages bénéficiaires de l’association étaient des mères isolées, soit près de 3 000, ce qui en fait le profil le plus représenté. Parmi elles, deux tiers ont un niveau de ressource en dessous du seuil d’extrême pauvreté, fixé à 800 euros par mois.

L’impossible cumul de la garde des enfants et d’un emploi

« Elles assument, dans neuf cas sur dix, la charge financière et mentale de leurs enfants. Et les problématiques de garde d’enfants empêchent l’accès à l’emploi », résume Olivier Coupry. Pour dénoncer cette situation, quatre de ces mères isolées sont présentes lors la conférence de presse. Toutes racontent, avec émotion, les difficultés inhérentes à leur condition de mère isolée.

Angélique cherche un emploi d’Atsem, mais ne trouve rien de compatible avec la garde de ses six enfants. Elle vit avec le RSA, des aides au logement et 100 euros de pension de son ancien conjoint. La Mulhousienne de 41 ans va désormais tenter de « faire des ménages » : « Mon rêve, c’est de travailler, au moins à mi-temps. » En attendant, elle dépend d’une épicerie solidaire de Caritas où elle peut acheter des produits à prix très bas.

Isolée, Angélique a besoin de l’épicerie solidaire pour nourrir sa famille.Photo : TV / Rue89 Strasbourg

Parfois, c’est un événement inattendu qui fait basculer dans la grande précarité. Marie (prénom d’emprunt), qui habite dans le Kochersberg, ne peut plus exercer en tant qu’auxiliaire de vie depuis qu’elle s’est cassée le genou et qu’elle est atteinte d’une algodystrophie. Tina a dû arrêter de travailler dans la restauration collective depuis une rupture de tendons de l’épaule. Des problèmes de santé que les deux femmes attribuent en partie à la fatigue que provoque le fait d’élever des enfants seules tout en travaillant. Certaines mères isolées ont subi des violences ou le départ soudain de leur mari, et composent avec des traumatismes psychologiques.

Caritas appelle aux dons

Tina se dit en colère contre « ceux qui critiquent sur les réseaux sociaux » les personnes en difficulté financière : « J’ai travaillé toute ma vie et j’ai élevé mes enfants, je n’ai pas arrêté. Ce qui m’arrive peut arriver à tout le monde. » Toutes s’accordent à dire que le soutien de Caritas est très précieux. « Quand j’ai rencontré ces bénévoles, enfin on m’a écouté. C’est comme une famille », témoigne Sophie (prénom modifié), les larmes aux yeux.

Outre les mères célibataires, 25% des ménages soutenus par Caritas en 2022 étaient des couples avec enfants. 17% étaient des femmes seules et 21% étaient des hommes seuls. Les 10% restants concernent d’autres profils, plus rares, comme des couples sans enfants ou des pères célibataires. L’association fonctionne grâce à 1 800 bénévoles en Alsace, dont « 350 doivent être remplacés tous les ans », explique Olivier Coupry :

« Nous avons un budget de 4 à 5 millions d’euros par an, dont 80% de dons et legs, 15% de subventions et 5% de revenus générés par des actions comme des tombolas. »

Olivier Coupry, directeur de Caritas Alsace.Photo : TV / Rue89 Strasbourg

En 2022, Caritas Alsace a dépensé 5,3 millions d’euros et avait reçu 6,8 millions d’euros. L’association fini donc avec un résultat positif qui permet de faire face, en 2023, à l’augmentation du prix des denrées et de l’énergie. « Avec l’augmentation de notre activité, nous appelons aux dons, qui sont censés venir en majorité dans les trois derniers mois de l’année. C’est vraiment important pour qu’on puisse continuer », souffle Olivier Coupry.


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