Un car plein de touristes allemands vient de quitter la place de l’Etoile. Mardi 17 décembre, 8h30, le temps presse. Dans huit heures, les visiteurs seront déjà sur le trajet du retour pour l’Ouest de l’Allemagne, entre Bonn et Cologne. La visite commence par une heure de bus avec guide touristique. L’homme au micro rappelle l’histoire de Strasbourg et de l’Alsace, entre appartenance à la France et annexion allemande : « Imaginez un Pierre Maître né en 1865 a dû s’appeler Peter Meister dès 1870 et il a encore changé de nom trois fois jusqu’en 1945. »
France et Allemagne se mélangent
Tout au long de la visite, la France et l’Allemagne se mélangent à Strasbourg, aussi bien dans son Histoire, que dans son architecture. Le port de Strasbourg est le deuxième plus important sur le Rhin… après celui de Duisburg. Après un bref passage devant l’Orangerie et les institutions européennes, le bus traverse la Neustadt et ses édifices construits sous l’empereur allemand Wilhelm II. Vers 10h, les touristes allemands sortent du bus au niveau des ponts couverts.
Marché de Noël et décorations
La septuagénaire Gabrielle adore le marché de Noël strasbourgeois : « Ce n’est pas comme à Cologne, où tout tourne autour de la nourriture et de la boisson. Ici, il y a de belles décorations », explique-t-elle. Les fouilles des sacs, les policiers et les militaires en patrouille ne la gênent pas… bien au contraire : « En Allemagne, il n’y a pas de fouille. Ici, c’est super, on se sent en sécurité. »
« L’impression d’être chez moi »
Au cœur de la Petite-France, Bernhard admire les vieilles maisons de tanneurs : « Ça me donne l’impression d’être chez moi », dit-il en souriant. Interrogé sur les manifestations contre la réforme des retraites, l’ancien conseiller fiscal affiche son incompréhension : « Comment est-ce possible d’avoir autant de régimes spéciaux ? Et à quel âge partez-vous en retraite ? Nous, nous avons la retraite à 67 ans. » Bernhard en a 68. Il a arrêté de travailler il y a 8 ans déjà « mais j’ai eu une décote importante ! », ajoute-t-il.
À qui est Gutenberg ?
La visite guidée est une ode à la grandeur de Strasbourg… souvent contredite par les visiteurs allemands. « Jusqu’au XIXe siècle, la cathédrale de Strasbourg était la plus haute du monde », explique le guide. Un touriste termine la phrase : « Maintenant, les cathédrales de Cologne et d’Ulm sont plus hautes ! » Même combat sur la place Gutenberg : le guide affirme que l’imprimerie a été découverte dans la capitale alsacienne. Un homme en imper et béret gris répond : « Enfin Gutenberg, c’est quand même un nom allemand ! »
Voyage aux frais du député
11h30. Embarquement à bord du bateau-mouche. Les touristes verront le Parlement européen pour la troisième fois en deux jours, puisqu’ils l’ont visité la veille. Il faut dire qu’un eurodéputé allemand a payé le voyage des visiteurs, venus de la même circonscription de Rhénanie du Nord.
Axel Voss est membre du parti conservateur allemand de la CDU (droite) et entame son troisième mandat. L’une des rares étudiantes du groupe a fait son stage dans le cabinet de l’homme politique. Le père de Laura est aussi là. Il a visité Strasbourg deux fois grâce à Axel Voss.
Quartier libre
Vers midi trente, c’est quartier libre pour les touristes. Un groupe d’une dizaine de retraités se dirige vers la place Saint-Étienne. Sur le chemin, Wilfried, 81 ans, se souvient de son premier voyage en Alsace.
Avec nostalgie, il évoque les années 70 où les Alsaciens parlaient allemand. « On pouvait communiquer avec les gens, maintenant plus personne ne parle la langue », regrette-t-il avant de décrire la Volkswagen qu’il conduisait à l’époque.
Amours et cantine du FEC
La bande d’amis d’enfance se dirige vers la cantine du Foyer Etudiant Catholique (FEC). Ils viennent profiter d’un menu à 7,80 euros « quand le plat coûte souvent 20 euros au restaurant », grimace la femme qui mène la balade.
Devant un plateau plein, entre frites, burger, soupe et yaourt, Gerda tient à raconter son histoire d’amour française. Née en 1952, elle a échangé des lettres avec un certain Francis Grevon dans les années 60, après avoir visité son village en Normandie, Poix du Nord. Son voisin d’en face renchérit avec une autre amourette française de jeunesse. À la fin du repas, Gerda tient à nous donner son adresse postale : « Peut-être que Francis lira votre article ? J’aimerais beaucoup qu’il m’écrive ».
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