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À Brumath, des récits détaillent les passages de la Seconde guerre mondiale

Située à vingt minutes de Strasbourg, la médiathèque Les Triboques accueille l’exposition Brumath dans la guerre, de la mobilisation à la libération jusqu’au 10 décembre. Textes, lettres, photographies, médailles, artéfacts retracent le parcours et la position de l’Alsace, en particulier de la ville de Brumath, lors de la Seconde Guerre mondiale.

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À Brumath, des récits détaillent les passages de la Seconde guerre mondiale
Deux tenues typiques de l’armée américaine et de la Croix Rouge

Depuis l’extérieur, seule une assemblée de mannequins est visible et crée un effet inattendu. Chaque tenue relève la diversité des troupes mobilisées et présentes en région : les soldats français aux tenues américaines se distinguent par leurs casques à l’emblème de la République Française tandis que les soldats américains se présentent avec des casques recouverts d’un filet. Un autre uniforme est orné de la croix d’Anjou, plus connue sous l’appellation « croix de Lorraine », symbole de la résistance affiliée à Charles de Gaulle.

Une telle entrée en matière témoigne de l’engagement collaboratif entre la Ville de Brumath, la médiathèque Les Triboques, la Société d’histoire et d’archéologie de Brumath (Shabe) et l’association du Souvenir Français (qui a parfois du mal à se souvenir). Jean-Philippe Nicolle, vice-président de la Shabe, souligne l’implication qu’a pu demander les recherches auprès des archives de la ville afin d’apporter la documentation nécessaire aux textes, spécialement rédigés pour ce projet. Pour lui, « l’objectif est avant tout de cibler un panel de thèmes variés pour que chaque visiteur profite de l’exposition progressivement et selon ses propres intérêts ». Les vingt-huit panneaux écrits posent en premier lieu un cadre historique général, qui permet de contextualiser des dates, des événements-clés lors de l’occupation allemande en Alsace, en particulier pour Brumath et ses alentours.

L’agencement des panneaux oriente néanmoins le sens de la visite : tout d’abord, lorsque que la France entre en guerre, chaque ville doit organiser sa propre défense et protéger les civils. Située en territoire frontalier, Brumath accueille la présence de l’armée française jusqu’à l’annexion de l’Alsace-Moselle dès juillet 1940. Les noms des rues, tout comme les prénoms et noms de famille aux consonances françaises sont modifiés, la langue française est interdite. Le quotidien des habitants est bouleversé par l’omniprésence de la propagande du régime nazi (affiches antisémites, photographies dégradantes, poésies idéologiques et articles de presse faisant l’éloge du parti).

Main noire, Malgrés-nous et Indigènes

En réponse à la germanisation forcée, des réseaux de résistants se développent sur l’ensemble du territoire, notamment La main noire, un groupe majoritairement composé par des jeunes brumathois et strasbourgeois. Les opposants au régime sont sévèrement punis et envoyés au camp de concentration du Natzweiler-Struthof ou au camp de redressement du Vorbruck-Schirmeck.

Une attention particulière est portée à la situation des « Malgré-Nous », ces soldats alsaciens embrigadés de force et envoyés sur les fronts défendus par la Wehrmacht. Une majorité ne reviendra jamais ou du moins, pas indemne. René Kleinmann, Charles Criqui, Robert Baumgartner : divers profils d’embrigadés sont présentés au gré de leur parcours à travers l’Europe jusqu’à leur décès. Un autre regard appuyé est posé sur le rôle capital des « Troupes indigènes » de l’Armée française en 1944, notamment la 3ᵉ Division d’infanterie algérienne. Les commémorations ont tendance à rappeler le débarquement des troupes anglo-américaines sur les côtes de la Normandie et à éclipser l’implication, le dévouement et les sacrifices des Troupes indigènes débarquées en Provence et engagées pour certaines depuis 1942. Le nord de l’Alsace a été la dernière région française libérée par les armées alliées. Brumath a constitué un lieu de rassemblement pour les alliés et un bastion contre une éventuelle contre-attaque sur Strasbourg, notamment lors de l’opération Nordwind.

Accueil par « La Rosalie »

Le parcours historique est régulièrement ponctué par des récits, des actes spontanés de résistance qui ont silencieusement contribué à la libération alsacienne. À l’occasion du vernissage du 14 novembre dernier, le camion de pompiers Mercedes-Benz 1500F “La Rosalie” était de sortie. Acquis en 1943 avec l’accord de l’administration allemande, il sera employée à multiples reprises lors de l’offensive Nordwind. Alors que les bombardements perdurent, le corps des sapeurs-pompiers de la ville se risque à porter secours aux villes voisines, en particulier Bischwiller. Les multiples actes de courage, de bravoure et de dévouement leur vaudront l’attribution d’une distinction, la fourragère tricolore, toujours portée lors des commémorations.

Le vernissage du 14 novembre 2025 est marquée par la sortie de caserne de la RosaliePhoto : Mathilde Schissele / Rue89 Strasbourg

#histoire

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