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Cinq choses à savoir sur Mathieu Klein le maire de Nancy

Nancy a basculé entre les mains d’un nouveau maire avec Mathieu Klein. Entre le tram, le PS, l’insertion sociale ou l’Europe, quelques sujets de l’ancien président de Meurthe-et-Moselle ont des ramifications avec l’Alsace.

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Cinq choses à savoir sur Mathieu Klein le maire de Nancy

Vent d’alternance dans les deux grandes villes de Lorraine. À Metz, la ville est repassée à droite avec la victoire de François Grosdidier (LR) après deux mandats de Dominique Gros (PS), qui a passé la main.

Avec Mathieu Klein, 44 ans, Nancy est tombée dans les mains de la gauche pour la première fois depuis 1947. À l’époque, le PS s’appelait SFIO et le maire Henry Sirguey n’était resté que 10 mois. Voici ce qu’il faut savoir sur ce nouveau maire de gauche d’une grande ville de la grande région.

1 – Il va devoir gérer le crépuscule du tram sur pneus

« Ce n’est pas juste un changement de modèle, c’est un changement de technologie », prévient le maire de Nancy, et président de la métropole du Grand Nancy face au défi à venir. En 2000, le modèle expérimental de tram sur pneus produit par le constructeur canadien Bombardier est choisi pour la cité des Ducs. Problème, « il n’a pas ensuite été industrialisé », complète l’édile.

Nancy est la seule ville avec Caen, qui a déjà démonté ses lignes sur pneus, à avoir choisi ce modèle, amené à être remplacé par des trams sur fer. Le tram sur pneus avait été envisagé au début des années 2010 à Strasbourg pour l’extension à Koenigshoffen en 2013. Une mobilisation avait poussé la municipalité à renoncer à cette technologie. Elle a ensuite repoussé successivement la mise en service, pendant que le chantier vers Kehl avançait. Le détournement de la ligne F doit enfin être mis en service ce vendredi 29 août 2020.

Mathieu Klein a aussi promis la gratuité des transports en commun les week-ends, aux plus de 65 ans et aux moins de 18 ans.

2 – Resté fidèle au PS, ses proches sont dans l’Ouest

Le soir de sa victoire, son premier coup de fil est allé à Michaël Delafosse (PS), nouveau maire de Montpellier et ami des années militantes au syndicat étudiant l’Unef-ID. Parmi ses autres autres proches au sein du Parti socialiste, les maires réélues de Nantes et de Rennes, Johanna Rolland et Nathalie Appéré, ainsi que la présidente d’Occitannie, Carole Delga, tous quadragénaires comme lui. « Une génération qui n’est pas dans la sous-traitance des enjeux écologiques par EELV », juge Mathieu Klein dans son bureau place Stanislas.

Membre des instances nationales au PS jusqu’en 2012, ce soutien de Manuel Valls lors de la primaire de 2017 est toujours resté au parti. Là où certains préfèrent désormais le terme de « social-écologie », il se dit « à l’aise avec la définition de social-démocrate » :

« Je conteste fermement l’effacement de l’idée sociale-démocrate. Elle a manqué par exemple de porter un message européen fort distinct des libéraux. Elle a manqué à prendre le virage de la transition écologique, le rendez-vous de la mondialisation, avec un projet de protection. Je ne conteste pas son échec. Nous avons des choses à faire pour la remettre sur pied. Un archipel d’élus locaux renouvelés et innovant ne suffira pas à faire un projet politique pour le pays. »

Il a rencontré la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian (EELV), à Tours mi-juillet, lors d’une rencontre de maires socialistes et écologistes, autour d’Éric Piolle et Anne Hidalgo.

3 – Sa voix pourrait peser aux régionales

Alors que les régionales de mars 2021 se préparent dans le Grand Est, sa voix devrait peser à gauche. Aucune candidature naturelle ne se dégage. L’ancienne tête de liste PS en 2015, Jean-Pierre Masseret, qui s’était maintenu face au FN et « Les Républicains » contre l’avis du parti s’est depuis rapproché de « La République en Marche ». Comme l’ancien maire de Strasbourg Roland Ries, il rêve d’un « pôle de gauche » dans la majorité, qui n’a guère émergé avec le remaniement. À Metz, il a soutenu le candidat de droite face aux écologistes. Côté écologistes, l’ancienne candidate Sandrine Bélier s’est retirée de la politique. Comme la strasbourgeoise n’avait pas fusionné sa liste au 2è tour en 2015, il n’y a aucun élu régional écologiste sortant dans le Grand Est. Une situation pas idéale pour conduire une liste et reprendre les dossiers.

Ainsi, la partition s’annonce périlleuse, entre les alliances nationales et situations locales contrastées. Au département de Meurthe-et-Moselle, Mathieu Klein a conduit une majorité avec des Insoumis et écologistes. À Nancy, sa liste de premier tour incluait des membres du PC, puis il a réussi l’union avec les écolos au second tour. À Strasbourg au contraire, l’union entre PS et écologistes ne s’est pas faîte et les relations demeurent toujours fraîches, en dépit d’un poste d’adjointe et de conseiller délégué. Les socialistes strasbourgeois n’ont obtenu aucune fonction poste dans la coalition à l’Eurométropole. Des socialistes Strasbourgeois, notamment la conseillère régionale et première secrétaire du Bas-Rhin Pernelle Richardot, avaient préféré la candidate de droite pour la présidence.

En Champagne-Ardennes, la gauche n’a pas conquis de grande ville, ni ne compte de figure politique majeure. Ainsi, la position de Mathieu Klein, qui incarne le renouvellement dans le seul département PS de la grande région ne devrait pas être négligée lors des tractations stratégiques. Il pense qu’il sera « possible de travailler ensemble » avec les écologistes en 2022. Comme aux régionales ?

Le nouveau maire de Nancy, Mahtieu Klein (Photo Ville de Nancy)

4 – Il a beaucoup côtoyé les présidents de départements alsaciens sur l’insertion

« Je m’étais beaucoup affronté avec Éric Straumann (l’ancien président du Haut-Rhin, devenu député puis maire de Colmar ndlr) à l’époque sur le bénévolat contre le RSA », se rappelle l’ancien président du 54. « Le projet originel a été amendé par le conseil d’État, qui a supprimé le caractère obligatoire », souligne-t-il.

En 2017, Mathieu Klein, avec d’autres présidents de Départements, a pris position pour « un revenu de base », « un vrai filet là où le RSA ne répond plus pour les jeunes ou les professions agricoles, avec une application sous 8 jours car les premières semaines sans revenu sont décisives », imagine-t-il. Lors d’un remaniement en 2018, il est approché par le gouvernement Macron-Philippe pour travailler sur ce sujet. Ses proches parlent d’un « grand moment d’introspection ». Après quelques jours, « une remise à zéro des compteurs », il refuse.

« Lui et son entourage ont bien fait savoir qu’il avait eu cette proposition, ce qui a permis de recentrer son image à Nancy, alors que jusqu’ici c’était plutôt le maire radical Laurent Hénart qui était vu comme proche d’Édouard Philippe », analyse Nicolas Zaugra, journaliste à actu.fr qui couvre notamment la politique locale.

À l’été 2020, la haut-rhinoise Brigitte Klinkert, qui avait pris la suite d’Éric Straumann, a intégré le gouvernement Macron-Castex en tant que ministre déléguée charge de… l’insertion. « J’ai eu des discussions nombreuses avec elle et je sais qu’elle n’y est pas insensible. C’est une femme ouverte avec qui on peut discuter », décrit Mathieu Klein.

Il promet de retransmettre ses propositions à la nouvelle ministre, sans trop se faire d’illusions. « Je ne désespère pas que nous parvenions à convaincre le gouvernement qu’une expérimentation territoriale est nécessaire », relève-t-il, alors que l’exécutif a le mot « territoire » sans cesse à la bouche.

Quant à Frédéric Bierry (LR), Mahieu Klein l’a fréquenté au sein de l’Assemblée des départements de France (ADF). Le Bas-rhinois préside la commission des Affaires sociales dont Mathieu Klein était vice-président qui a produit plusieurs rapport sur l’insertion. « On était plus souvent en accord qu’en désaccord, même si nous avons des visions différentes de l’insertion. Il a une vraie vision et des convictions. Sa voix pesait et va manquer », estime Fréderic Bierry.

5 – Il s’est engagé sur la question européenne

Son engagement politique date de 1992 et notamment pour le « Oui » au référendum de Maastricht. Ce traité pose les bases de l’Union européenne moderne. La campagne intervient dans une période difficile pour le PS entre la fin du Mitterrandisme et l’affaire du Sang contaminé. Mathieu Klein cite « le débat Mitterrand-Seguin » comme « le plus remarquable que j’ai jamais vu en qualité intellectuelle ». Enjeu : l’euro entraînera-t-il une souveraineté de la France ? « Je rêverai de retrouver des débats comme cela dans notre pays », ajoute-t-il.

En 2003, il tente l’expérience du Nouveau Parti socialiste (NPS). « On avait toujours ce vieux débat au PS entre la majorité molle au milieu, que l’aile gauche titillait, avec la répétition à chaque congrès de cette scénographie. Le NPS voulait changer les pratiques de l’intérieur sans choisir un camp”, se rappelle-t-il, tout juste élu au Département et « séduit ». Mais en 2005, le NPS prend partie pour le « Non » au Traité européen. »Si c’était à refaire, je ne suis pas sûr que je revoterai non », admet-il désormais. « La promesse n’a pas été tenue, il n’y a pas d’itinéraire bis, de plan B en Europe. La campagne relevait surtout une construction nationale, plus qu’européenne. Alors que pour Maastricht, il y avait un débat sur la souveraineté ». Il quitte le NPS ensuite.


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