

Bernard Stalter (LR), nouveau président de la chambre des métiers d’Alsace, Lorraine Champagne Ardenne (Photo Dorothée Parent / CCI)
La majorité de Philippe Richert (LR) à la nouvelle région Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne (ALCA) est particulièrement scrutée. Élu face au FN et le PS au second tour grâce aux voix de gauche, des écologistes et d’abstentionnistes, Philippe Richert avait indiqué que ce soutien « nous oblige » et que sa liste ne devrait pas reproduire ce qui a créée tant de défiance envers la politique. Dans ce contexte, le moindre faux-pas éthique est scruté.
Ce mercredi 2 mars, c’est l’élection de Bernard Stalter (LR), ex-président de la Chambre des Métiers et de l’Artisanat d’Alsace et tout juste élu à la tête de la nouvelle Chambre d’ALCA qui a fait tiquer le groupe PS de la nouvelle région. Bernard Stalter est aussi conseiller régional délégué à l’Artisanat de la nouvelle assemblée.
« Je veillerai à prévenir et à faire cesser immédiatement tout conflit d’intérêts »
Lors de la campagne, tous les candidats avaient signé une charte de l’élu qui stipulait trois points :
- J’exercerai mes fonctions avec impartialité, diligence, dignité, probité et intégrité.
- Je poursuivrai uniquement l’intérêt général, à l’exclusion de tout intérêt particulier.
- Je veillerai à prévenir et à faire cesser immédiatement tout conflit d’intérêts, dès lors que j’en aurai connaissance.
C’est la troisième phrase qui n’est plus respectée pour les élus socialistes, qui s’en émeuvent via communiqué :
« Pour mémoire, lors de la séance plénière du 4 janvier 2016, le Président Richert, après avoir fait lecture de la charte de l’élu, a demandé aux élus de s’ « en imbiber profondément ». Aussi, le Groupe Socialiste demande au Président Richert de mettre en application ses recommandations et de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser ce conflit d’intérêts. »
Qu’est-ce qu’un conflit d’intérêt ?
La loi définit le conflit d’intérêt par « situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés, qui est de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice d’une fonction ». À noter que le conflit n’est pas un délit en soi mais seulement une situation. C’est l’éventuelle « prise illégale d’intérêt », « favoritisme » voire « corruption » qui peut être condamnée.
« Il n’a pas de pouvoir de signature »
Le directeur de cabinet de Philippe Richert, Christophe Kieffer défend ce choix :
« C’est un élu délégué, il n’a pas de pouvoir de signature comme un vice-président. Sa compétence est reconnue et il a un rôle d’animation de la politique régionale dans un secteur précis, sous l’autorité de la commission du développement économique. Si on interdit aux gens d’être compétents, comment on fait ? On s’est posé la question, mais ce n’est pas un lobbyiste, il saura faire la part des choses. En Alsace, la CMA est un partenaire de la Région sur des conventions spécifiques, mais ne reçoit pas de financement direct. »
Contacté, Bernard Stalter n’était pas joignable à l’heure d’écrire ces lignes. Plusieurs questions peuvent émerger comme celle de savoir si sa participation à la majorité régionale a favorisé son élection à la Chambre des métiers d’ALCA.
Philippe Mangin, vice-président à l’Agriculture et président d’une coopérative agricole
Autre conflit relevé quelques minutes plus tard sur les réseaux sociaux. Le vice-président à l’Agriculture, Philippe Mangin, est aussi président d’une coopérative agricole dans la Meuse au chiffre d’affaire de 443 millions d’euros en 2014.
C’est donc deux dossiers tout chaud qui devrait attendre sur le bureau du futur déontologue de l’assemblée régionale. Il devrait être intronisé au printemps. Pourra-t-il aller plus loin que les recommandations de celui de Strasbourg ?
Par ailleurs, justifier le maintien de Bernard Stalter par le fait qu'il n'est pas vice-président, fragilise d'autant plus la position de Philippe Mangin.
Nos élus ont retenu les leçons du 6 décembre. Ils y a eu d'abord les paroles, puis la charte. Reste maintenant à passer aux actes. Une formalité...
"Si on interdit aux gens d’être compétents, comment on fait ?"
Le cumul des mandats / des fonctions publiques ou parapubliques est un mal qui :
- ronge la démocratie française en diminuant la représentation réelle,
- favorise les conflits d’intérêts et les petits arrangements entre amis,
- conduit à n’exercer ses fonctions qu’à mi-temps,
- prive l’État du service de gens tout aussi compétents que lesdits cumulards.
Faut-il que j’en rajoute?
Dirigeants chéris, faites-vous une raison : ce qui passait encore dans les années 1990 n’est aujourd’hui plus acceptable. Les gens ne veulent plus qu'on leur dise "Il saura faire la part des choses".