
Gérald Darmanin, avez-vous déjà rencontré ces « étrangers délinquants » que vous souhaitez expulser ? Moi oui
Présidente de la section strasbourgeoise de la Ligue des droits de l’Homme et bénévole de l’association d’aide aux réfugiés et migrants La Cimade, Ingrid Boury a découvert avec stupeur le projet de loi qui vise à faciliter l’expulsion des « étranger délinquants ». Elle a écrit cette lettre ouverte destinée à son auteur, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Monsieur Darmanin,
En me réveillant ce matin, j’ai découvert votre projet de loi « Étrangers délinquants ». Il a suscité en moi des sentiments de colère et d’incompréhension. Pourquoi ? Hier, j’ai passé mon après-midi à la maison d’arrêt de Strasbourg pour une permanence juridique en droit des étrangers. Je vous écris aujourd’hui du fait de mon expérience de bénévole au sein de La Cimade depuis plus de cinq ans. Par ce biais, j’ai rencontré des centaines d’ « étrangers délinquants » comme vous les qualifiez. Mais est-ce que vous vous les avez simplement rencontrés avant d’avoir l’idée de votre future loi ?

Avez-vous rencontré Monsieur Y ? Moi oui.
M. Y est arrivé à l’âge de 13 ans en France, seul, du Sahara occidental. Il n’a jamais été déclaré à la naissance. Il a été pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) et a fait un apprentissage dans un restaurant strasbourgeois réputé.
« Vous dites que la France est généreuse »
Mais sans papier d’identité, impossible de le régulariser. M. Y s’est retrouvé majeur, sans emploi, à vivre dans la rue. M. Y est un « ni ni » comme vous dites, « ni expulsable ni régularisable ». Il est dans un « cercle vicieux », comme il l’a compris lui-même. La préfecture envisage, encore une fois, de lui notifier une obligation de quitter le territoire français. M. Y aimerait bien avoir un papier d’identité pour faire des demandes de régularisation. Il aimerait pouvoir travailler avec sa formation, pour laquelle l’État français a investi. Il aimerait pouvoir s’occuper de son enfant français alors qu’il n’a pas eu de parents.
Vous dites que la France est généreuse. Vous trouvez cela généreux de former un jeune mineur puis de le laisser à la rue à sa majorité ? Vous trouvez cela généreux de le mettre dans une situation où il risque de devenir un « étranger délinquant » alors qu’il pourrait simplement travailler ?
Je vous invite à faire des recherches sur l’homosexualité en Biélorussie
Avez-vous vu les cicatrices de Monsieur U ? Moi oui.
M. U est biélorusse. Il a fait partie d’associations qui luttent contre le pouvoir en place. Il a été frappé par la police biélorusse. Il a des cicatrices sur le corps, les avez-vous vues ? Moi oui.
Il a été en prison en Biélorussie. Il a des séquelles qui nécessitent des soins réguliers. M. U est rejeté par sa famille car il est homosexuel. Je vous invite à faire des recherches sur l’homosexualité en Biélorussie.
Vous dites que la France est généreuse. Vous trouvez cela généreux de vouloir expulser une personne dans un pays où il trouvera des conditions de prison inhumaines pour des crimes qu’il aurait commis pour défendre la démocratie et les droits de l’Homme ?
S’ils retournent au Sénégal, leur fille risque l’excision
Avez-vous rencontré Monsieur N ? Moi oui.
M. N est sénégalais, il est arrivé en France avec sa femme et sa fille. Leur fils est né ici. M. et Mme N se sont mariés au Maroc, après avoir fui le Sénégal. Ils n’avaient pas le droit de se marier dans leur pays car ils viennent de deux ethnies différentes. Ils sont menacés par leurs propres familles et sont ici car ils parlent français et voulaient vivre leur amour librement.
S’ils retournent au Sénégal, leur fille risque de subir l’excision. M. N travaille « au noir » et sous-loue un logement pour sa famille.
Vous trouvez cela généreux de séparer une famille ?
Vous dites que la France est généreuse. Vous trouvez cela généreux de séparer une famille et de risquer l’excision de leur petite fille ? Vous trouvez cela généreux de ne pas régulariser une famille qui travaille et vit sans aucune aide de l’État ?
Avez-vous vu une personne de 20 ans être expulsée dans un pays qui lui était inconnu alors qu’elle était arrivée en France à l’âge de sept ans et que son père s’engageait à s’occuper d’elle ? Avez-vous vu des personnes en prison car elles s’étaient rebellées contre les forces de l’ordre pour ne pas monter dans un avion tellement elles avaient peur de retourner dans leur pays d’origine ? Avez-vous vu une mère, désemparée, face à son obligation de quitter le territoire alors que sa fille est en France ?
Moi oui.
Avez-vous quitté votre maison pour fuir la guerre ?
Êtes-vous partis de l’Iran, en traversant la Turquie, la Grèce, l’Italie pour arriver en France deux ans plus tard, en manquant de mourir chaque jour dans la rue ou en passant les frontières ? Avez-vous quitté votre maison et laissé votre vie derrière vous pour fuir des guerres ?
Moi non. Vous non plus. Eux si. Ils ne le font pas par plaisir.
Il serait difficile d’être exhaustive. Ce ne sont que des exemples qui représentent des milliers de situations.
Je vous souhaite de ne jamais être un « ni ni »
Je suis sortie de la maison d’arrêt de Strasbourg hier, outrée par la violence psychologique que cela engendre quand une personne sort de prison et qu’en 24 heures elle se retrouve au Kosovo. Je me suis réveillée ce matin encore plus outrée par votre projet de loi alors que je pensais à ce que j’allais faire pour aider M. Y.
Il y a quelques semaines, nous avons perdu M. S. Ce fut un choc, à Strasbourg. M. S a été retrouvé mort, victime de ce système, après des années et des années dans le cercle vicieux de la rue et de la prison, malgré toutes les personnes et associations qui se sont démenées pour l’aider. Le système avait fait de lui un « ni ni ». Je vous souhaite de ne jamais être un « ni ni ».
Je ne parlerai des violations des droits de l’Homme
Je suis juriste, vous aussi, mais je ne ferai pas de droit ici. Je ne parlerai pas des violations des droits de l’Homme, de la convention européenne, des traités internationaux, que provoque cette future loi. Je ne parlerai pas de toutes les entraves juridiques que nous rencontrons déjà et de tous les moyens abusifs que vous employez, de tout ce qui pourrait être mis en place pour améliorer plutôt la réinsertion, du système carcéral qui va mal…
Je vous parlerai seulement d’humains. Et je vous demanderai seulement d’arrêter de parler d’eux avec des statistiques dans les médias, et d’arrêter de chercher les responsables là où ils ne sont pas.
Je vous invite à venir rencontrer les « étrangers délinquants » pour connaître les parcours de ces personnes avant de juger de leur sort.
Je vous prie d’agréer, Monsieur Darmanin, mes sincères salutations.
Ingrid Boury
Darmanin n'aura pas à renvoyer "Salomon" qui était "tombé" en prison à plusieurs reprises à cause de la précarité à laquelle il était aliénée:
https://blogs.mediapart.fr/georges-yoram-federmann/blog/290622/salomon-prince-la-rue-dorigine-etrangere-ne-sera-jamais-roi-en-france
Est-ce une volonté de la mairie écolo d'écrire cette tribune ?
Je salue avec grand respect la lettre ouverte de la présidente strasbourgeoise de la CIMADE.
J'espère que les partis solidaires de la cause des migrants bougeront rapidement.
Comment lutter contre les propos et les projets de ce ministre ?
Belle lettre.
Le cas politique et intellectuel que représente le sieur Darmanin Gérald, Moussa ( de son second prénom) est psychologiquement et psychanalytiquement intéressant.
Il illustre très bien la formule "être plus royaliste que le roi".
Serait-ce parce que son grand-père maternel, Moussa Ouakid, était né en Algérie ?
C'est possible.
Serait-ce parce que son père n'était qu'un modeste gérant de bar à Valenciennes ?
C'est aussi possible.
Serait-ce parce que sa mère n'était aussi qu'une modeste femme de ménage à la Banque de France ?
C'est encore possible.
Et pourtant, tenir un bar de quartier ou faire le ménage chez les "autres" n'a rien, en soi, de déshonorant.
Comme le dit un dicton populaire, il n'y a pas de sot métier, il n'y a que de sottes gens.
Ce qui est fort probable c'est que le sieur Darmanin est à l'image de son président qui, lui, semble vouloir prouver à son papa, neurologue, et à sa maman, médecin-conseil à la Sécurité sociale, qu'il est plus fort qu'eux.
C'est vrai, Quouah!, Il y a environ 2900 neurologues en France, c'est d'un banal !
Et médecin-conseil à la Sécurité sociale, alors là, j'vous dis pas !
Ces deux cas devraient retenir l'attention des psy. Psychanalystes ou psychologues, les deux auraient certainement des choses intéressantes à nous dire sur ce type d'individu.
Comme l'explique très bien Victor Hugo, dans "Les misérables", se comporter comme le ministre de l'Intérieur, Gérald Moussa Darmanin, c'est :
...."Être ultra, c’est aller au delà. C’est attaquer le sceptre au nom du trône et la mitre au nom de l’autel ; c’est malmener la chose qu’on traîne ; c’est ruer dans l’attelage ; c’est chicaner le bûcher sur le degré de cuisson des hérétiques ; c’est reprocher à l’idole son peu d’idolâtrie ; c’est insulter par excès de respect ; c’est trouver dans le pape pas assez de papisme, dans le roi pas assez de royauté, et trop de lumière à la nuit ; c’est être mécontent de l’albâtre, de la neige, du cygne et du lys au nom de la blancheur ; c’est être partisan des choses au point d’en devenir l’ennemi ; c’est être si fort pour, qu’on est contre".....
Ce qui m'amène (moi petit-fils de migrant économique de l'intérieur, côté paternel, et petit-fils de garçon de ferme, côté maternel) à dire qu'à trop vouloir prouver qu'il est un républicain et un démocrate, ce ministre finit par démontrer qu'il en est le contraire et qu'il n'a qu'un objectif : séduire les racistes, les xénophobes, l'électorat fascisant et, bien sûr, les parvenus et les arrivistes pour être reconnu par eux (et elles) comme celui qui dit et fait ce que eux (et elles) souhaitent entendre mais sans avoir le courage de le dire.
Darmanin et son "chef" ne sont que des Rastignac de bas-étage.
Et si, comme l'écrivent certains " Une juste cause ne peut en aucun cas légitimer la violence et la délinquance ", il est bon de rappeler deux choses à ceux-là.
Primo, la délinquance en col-blanc semble "un peu trop souvent" pardonnée voire ignorée ou cachée afin de ne pas salir l'image de la bourgeoisie bien-pensante et bien propre sur elle.
Secundo, Il est (et malheureusement pour longtemps encore) préférable d'être un(e) migrant(e) blanc(he), aux yeux bleus, aux cheveux blonds, de religion chrétienne et votant pour la droite et la droite extrême dans son pays d'origine plutôt qu'être un(e) migrant(e) au teint basané (voire noir), de religion musulmane et rêvant d'une Algérie, dune Tunisie ou d'un Maroc démocratiques libérés du joug islamique ou d'un Irak, d'une Syrie, d'un Kurdistan ou d'une Palestine démocratiques et débarrassés des occupants.
Merci pour notre démocratie et pour les droits qu'elle doit engendrer et que nous devons défendre. Bravo
On peut même dire que la délinquence alimentaire peut devenir inévitable si l"on n'a pas le droit de travailler pour gagner de quoi manger. Du coup, avec Darmanin, ce ne sera pas la double peine mais la triple peine.
Trêve de cynisme (ça me démangeait de trop).
Pour empêcher toutes ces dérives qui nous feront bientôt prendre le chemin des dictatures en vogue,je souhaiterai que les médias relaient régulièrement des textes du genre ci-dessus.
Parlez de votre travail, parlez de vos résultats parce que je crois qu'ils existent.
Derrière toutes ces souffrances, que des désirs d'humanité refoulés!