Quelque chose agite les feuilles de l’avocatier à la fenêtre de Poonam Ramrichia. Elle s’approche calmement, sort la tête et aperçoit, sur l’une des branches les plus hautes, deux grands yeux jaunes. Un regard vif, inquisiteur, visiblement à peine effrayé par la présence d’un étranger. Un bras velu qui se dresse vers Poonam. « Attendez, je vais lui donner un morceau de pain, il n’en a pas eu aujourd’hui. »
Les singes vont et viennent dans le quartier de Poonam, situé en périphérie de la commune de Crève-Coeur, nichée dans l’une des vallées les plus boisées de l’île Maurice. Ici, la cohabitation avec les macaques date d’il y a 25 ans au moins, l’époque à laquelle Poonam s’est installée dans le village. « Ils descendaient déjà des montagnes pour venir chercher à manger chez les humains, se souvient Poonam alors que l’animal s’éloigne de nouveau, une miche de pain dans la bouche. Mais ils remontaient ensuite. Aujourd’hui, à cause des pièges, ils restent dans les alentours. »
Depuis 2022, de grands pièges ont été installés sur l’ensemble du secteur de Crève-Coeur, village de près de 3 000 habitants situé au centre de l’île. Des cages grillagées d’environ 30 mètres carrés (m²), sur lesquelles s’affiche un nom : Bioculture. Il s’agit de l’une des six fermes d’élevage de singes homologuées sur l’île Maurice, et de l’un des fournisseurs historiques du centre de primatologie de l’Université de Strasbourg. L’établissement alsacien est régulièrement visé par les associations de défense du droit des animaux, car il constitue un maillon de l’expérimentation animale en Europe. Silabe accueille chaque année des centaines de singes venus en grande partie de l’île Maurice. Selon nos informations, sur les 1 524 macaques à longue queue importés depuis 2021 par Silabe, 945 viennent de Maurice, soit 65% d’entre eux.
Poonam Ramchida est opposé à l’élevage et à la capture des singes sur l’île Maurice.
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