

Boucif et Woualid décrivent leurs amis comme de « jeunes fêtards qui croquaient la vie à pleines dents. » (Photo OG / Rue89 Strasbourg)
En décembre 2013, une dizaine de Strasbourgeois âgés d’une vingtaine d’années prenaient la route vers la Syrie. Parmi eux, Yacine et Mourad, deux frères, originaires du quartier de la Meinau, ont trouvé la mort deux jours seulement après leur arrivée. Rue89 Strasbourg a rencontré leurs amis d’enfance, qui tentent de comprendre ce qui a pu se passer.
Le point de rendez-vous est un parking de magasin situé non loin des immeubles du quartier de la Meinau. Il fait nuit et froid, mais Boucif et Woualid vont rester plus de deux heures à parler de Yacine et Mourad, leurs amis d’enfance partis faire le djihad en Syrie et morts deux jours seulement après leur arrivée en décembre 2013. Depuis le collège, ils formaient avec les deux frères une bande de 5-6 potes, inséparables.
Dans la cité, le sujet reste tabou, personne n’ose vraiment en parler à haute voix et eux-mêmes risqueraient d’être considérés comme des «balances ». Ils s’en fichent pas mal : ils souhaitent raconter «pour que ça puisse servir à d’autres ». Au fond d’eux, ils ne veulent toujours pas croire que leurs amis sont morts, à des milliers de kilomètres pour quelque chose qui n’est « pas leur problème ».
« T’es amoureux Woualid ? » Je lui ai répondu “tu craques !” »
Ce sera la dernière question posée par Mourad à Woualid, son ami de toujours. Trois jours plus tard, accompagné de Yacine, son grand frère, Mourad et une dizaine de jeunes hommes âgés d’une vingtaine d’années quittaient Strasbourg pour Francfort, direction la Turquie. Karim, Foued, Ali, Rachid*, Mohamed, Yacine, Mourad et les autres… Tous habitaient la capitale alsacienne, mais quatre d’entre eux étaient originaires de Wissembourg. Personne, au sein de leur entourage, n’avait deviné leur projet.
À l’aéroport de Francfort, l’avion de la Turkish Airlines a du retard. Un des membres du groupe, peut-être gagné par le stress et la peur, appelle ses parents. Ceux-ci le récupèrent in-extremis. Le reste du groupe embarque pour la Turquie et atterrit à Antalya, au sud du pays. Ils entament ensuite la traversée de la frontière turco-syrienne où un passeur les fait entrer en Syrie. À partir de là, ils seraient pris en charge par Mourad Farès, l’homme soupçonné de les avoir recrutés sur Internet. Le début de l’angoisse pour les familles, comme ce père, qui va se déplacer jusqu’à la frontière turque supplier son fils, Mounir*, lui aussi originaire de la Meinau, de revenir. Réponse de celui-ci : « Moi, ce que je fais c’est juste, et tout le monde devrait en faire autant ».
Ça devait être des vacances à Dubaï
Tout a commencé par une lettre que Yacine et Mourad, les deux frères de la Meinau, laissent à leur mère. Ils y écrivent leur envie de rejoindre le « cham », ce pays sacré du Levant comme ils l’appellent, et font part de leur envie de « bien agir ». Quelques jours seulement avant leur départ, ils avaient pourtant assuré à Woualid qu’ils partaient prendre des vacances à Dubaï :
« En terminant ma semaine, je suis chez rentré chez moi. Ma mère était en pleurs. Elle me demande : « pourquoi tu m’as rien dit pour Mourad ? » Je savais même pas de quoi elle parlait. Moi ils m’avaient dit qu’ils partaient à Dubaï. Mais sa mère avait reçu une lettre… C’est comme ça qu’on a appris leur départ. Par un courrier qu’ils ont laissé. »
Après la lettre, survint le coup de téléphone par satellite. Au bout du fil, une voix d’homme. C’est Mounir, un des compagnon de route des deux frères. Il annonce à la mère de Yacine et Mourad que ses fils sont morts là-bas, en Syrie, en « héros ». Pour Boucif, les explications données par Mounir sur les circonstances de la mort de ses amis sont encore trop floues :
D’après Mounir, ça ce serait passé pendant un trajet d’un point A à un point B. Ils se sont pris une balle. L’un est mort sur le coup, l’autre aurait agonisé. Mais même ça, on en est pas sûr à 100% ! »

Boucif : « Je leur en veut. On était potes dans les pires moments. Même pas un mot, pas un au-revoir. » (Photo OG / Rue89 Strasbourg)
Après avoir passé la frontière turque, le petit groupe de Strasbourg gagne la région d’Alep. S’ensuivent deux semaines d’entraînements aux combats. Ils viennent ensuite grossir les rangs de l’EIIL, l’État islamique de l’Irak et Levant. Mais début janvier, tout s’accélère et des tensions, nourries de rivalité entre factions djihadistes, apparaissent. Mourad Farès, le recruteur présumé, quitte l’EIIL pour Jabhat Al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaïda. Les frères de la Meinau eux, restent dans l’EIIL. C’est lors d’un règlement de comptes entre djihadistes que Yacine et Mourad trouvent la mort, le 10 janvier. Le lendemain, Yacine aurait eu 28 ans.
L’information a ensuite très vite circulé dans la cité. Boucif et Woualid, sous le choc, se souviennent :
« On s’est dit « eux ? Comment c’est possible ? » Quand il y a eu l’affaire Merah, c’était un cas isolé, tout le monde en avait parlé, c’était choquant. Un mec qui bute des gens pour une idéologie, c’est grave, c’est du fanatisme. Mais quand c’est des gens qui partent et que tu les connais… C’est une affaire Merah puissance dix. En plus, quand on connaît leur profil… C’était des crèmes. »
Quand le départ des Strasbourgeois est révélé par Europe 1 en janvier 2013, la cité de la Meinau a vite attiré l’attention des médias qui cherchaient à interroger les familles. Sami, le petit frère de Yacine et Mourad, avait d’ailleurs bousculé quelques journalistes, et refusé de témoigner. Une fois seulement, il a accepté de nous rencontrer. C’était trois mois après la mort de ses frères. Il se disait alors « choqué » mais « fier d’eux ». Yacine et Mourad étaient, d’après lui, « partis pour une bonne cause ». Depuis, il ne souhaite plus s’exprimer sur le sujet et a fermé les comptes Facebook de ses frères.
Du paintball dans la cité
Nés à Strasbourg dans une famille d’origine algérienne, Yacine et Mourad sont les aînés d’une fratrie de quatre garçons et une petite soeur. Leur père, un homme âgé d’une soixantaine d’années lorsqu’ils naissent, est marié à une femme plus jeune, et souvent absent. Les deux frères ont le profil type des garçons de leur âge : ils aiment sortir en boîtes, le rap, et « parler de nanas ». Plus jeune, Yacine avait décroché un bac professionnel en électrotechnique. Il s’était marié en septembre 2013 à une jeune femme qui ne se doutait pas de ses intentions. Son départ a d’autant plus choqué, qu’il avait le projet d’ouvrir à bar à narguilés à Brest. Mourad lui, était agent de sécurité.
Ils ne sont arrivés que tardivement à la religion. Jusque-là, ils pratiquaient l’islam par tradition, respectaient le Ramadan et se rendaient de temps à autre à la mosquée, mais guère plus. Boucif et Woualid dressent le portrait de garçons vulnérables, voire naïfs, et racontent leur lente progression vers la radicalisation :
« Ils ont le profil type des gens faibles, qui marchent à l’émotion. Yacine répétait beaucoup les choses qu’il entendait par ci ou par là, il ne cherchait pas par lui-même. C’était quelqu’un de malléable. Ils ont commencé par fréquenter la mosquée, un peu par effet de mode. Puis Mourad a commencé à se rapprocher de la religion, il en parlait tout le temps. Ensuite, il a commencé à s’intéresser à la Syrie, il parlait du djihad. Il n’en parlait pas à ses proches, mais à des gens qu’il voyait moins souvent, pour pas trop éveiller les soupçons. »
Au fur et à mesure que les souvenirs reviennent, le puzzle prend forme. Ils se souviennent des jeux de paintball entre les immeubles de la cité, l’été précédant leur départ. Ce qu’ils avaient pris pour un passe-temps était en réalité une forme d’entraînement camouflé au maniement des armes. Ils se rappellent aussi que Yacine et Mourad n’allaient plus prier à la mosquée de la Meinau, préférant aller à l’Elsau, où ils auraient rencontré leur recruteur. Et puis, juste avant leur départ, ces photos qu’ils prenaient avec leur mère, en guise de souvenir, et leurs affaires : vêtements de marque, CD, etc. qu’ils ont commencé à distribuer autour d’eux. En Syrie, ils n’en n’auraient plus besoin.
« On a un peu joué aux journalistes, la violence verbale en plus »
En avril dernier, le gouvernement lance un plan de lutte contre l’exode de Français en Syrie. Près de 500 d’entre eux se trouvent alors là-bas. Depuis, leur nombre ne cesse d’augmenter : on compte aujourd’hui plus d’un millier de Français impliqués dans le djihad, désireux de partir, ceux déjà sur place ou revenus en France.
Au même moment, une rumeur circule dans le quartier. Certains djihadistes partis en décembre avec Yacine et Mourad seraient revenus. Boucif et Woualid, qui ne supportent pas l’idée qu’ils puissent rentrer sans rendre de compte à la mère de leurs amis, forcent le destin pour les rencontrer :
« À leur retour, ils se sont faits petits. Un ami, qui savait qu’ils allaient rentrer, nous avait prévenu. Nous, on ne supportait pas qu’ils soient là, sans s’expliquer devant la mère de Yacine et Mourad. Du coup, on en a rencontré deux de la bande. À notre manière, on a enquêté et on a un peu joué aux journalistes, la violence verbale en plus. Une semaine avant la descente du RAID, on a sonné à une heure du matin chez l’un d’entre eux qui habitait à Illkirch. On l’a traîné devant la maman de nos amis. Pendant plus d’une heure, on l’a questionné, on a eu des débats religieux.
Il faisait le malin en disant qu’il avait envie d’y retourner et que sa mère était venue pleurnicher jusqu’en Turquie pour le récupérer. On lui a un peu mis la pression alors il nous a filé le contact d’un autre gars, qui lui aussi était rentré. On a été surpris de le voir en mode beau gosse, propre sur lui, et serveur dans un bar à chichas de la Plaine des Bouchers. Il bossait, comme si rien ne s’était jamais passé. Mais lui était plus sentimental, il semblait très choqué mais il nous a quand même dit que dès qu’il en aurait l’occasion, il repartirait. Et nous, on leur demandait : « pourquoi vous êtes revenus ? » Et ils nous répondaient qu’ils n’étaient pas revenus par choix mais qu’ils avaient été balancés par un passeur quand ils sont passés en Turquie pour chercher de l’argent. »
Huit mois de détention provisoire
La mort de Yacine et Mourad pourrait aussi les avoir secoués et décidés à rentrer en France. Prévenue par les autorités turques, la police antiterroriste les place sous surveillance. Arrêtés en mai, les six individus vont expliquer aux enquêteurs avoir commis une « erreur » en partant en Syrie, et invoque le caractère humanitaire de leur périple. L’un d’entre eux affirme même avoir été roué de coups et contraint de manger ses excréments après avoir refusé de combattre. Les écoutes téléphoniques révèlent pourtant qu’une fois revenus à Strasbourg, ils étaient restés très liés et tenaient des discours toujours radicaux. Les autorités craignaient qu’ils ne cherchent à monter une cellule de recrutement sur Strasbourg. Écroués depuis huit mois, l’avocat de deux d’entre eux dénonce une chasse aux sorcières :
« On juge un acte avant qu’il ne soit commis. L’État français se méfie de ces jeunes partis en Syrie mais tous ne sont pas des Mohammed Merah en puissance. Là, ils sont en détention provisoire depuis huit mois, c’est un simple principe de précaution. On ne doit pas être jugé pour ce qu’on va potentiellement faire, mais pour ce qu’on a fait. Ceux qui, en 1936, étaient partis combattre les Franquistes en Espagne, ont-ils été poursuivis ? »
Voir sur France TV Info l’interpellation en mai 2014
Au moment de leur arrestation, à 3 500 kilomètres de là, pas loin de la ville d’Alep en Syrie, Mourad Farès, le présumé recruteur, poste ce bref commentaire sur sa page Facebook : « Fallait bien que ça arrive… ». Interpellé en août en Turquie et considéré comme « particulièrement dangereux » par le ministère de l’Intérieur, il est mis en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et placé en détention provisoire.
Ce serait après visionné « Al Mahdi et le second Khilafah » une vidéo de 48 minutes inspiré d’une esthétique de jeux vidéos et de films de science-fiction, et multipliés les échanges internet avec cet homme de 30 ans, originaire de Thonon-les-Bains, que les Strasbourgeois, les ados de Nice, une lycéenne d’Avignon et bien d’autres, se seraient enrôlés. Dans une interview à VICE en février, l’homme s’en félicitait.

Mourad Farès (à gauche sur la photo) serait à l’origine de l’endoctrinement des Strasbourgeois et de nombreux autres Français (Photo tirée de son Facebook)
Le 4 novembre, un projet de loi visant à renforcer la lutte contre le terrorisme avec la création d’un dispositif d’interdiction de sortie du territoire a été adopté. Près de 50 Français sont morts en Irak et en Syrie depuis 2012.
Aujourd’hui, Boucif et Woualid restent en colère contre ceux qui partent. Ils avaient jugé violente la vidéo du petit strasbourgeois qui enjoint d’autres enfants à venir en Syrie. Ils oscillent toujours entre rancœur et tristesse et tentent de faire le deuil de leurs amis. Ils soutiennent comme ils peuvent la mère de Yacine et Mourad, qui n’a pu enterrer ses enfants mais continuent de croire que témoigner peut servir, pour d’autres.
*Les prénoms ont été modifiés
Aller plus loin
Sur Europe 1.fr :Djihad en Syrie : le voyage funèbre d’une famille strasbourgeoise
Sur Rue89 Strasbourg : « Eau Argentée », le film inoubliable que les Syriens émigrés voient tous les jours
Sinon, tu as BFMTV et Internet pour te gargariser des centaines de témoignages qui ont fait l'essentiel de leur business jusqu'à ce que quelque chose d'autre arrive, ici la COP21.
Le combat contre la dictature perd toute noblesse dès qu'il s'agit d'instaurer de nouvelles dictatures et de tuer un maximum de personnes désarmées...
Comment peut-on donc agréer un avocat pareil qui légitime ainsi publiquement le départ pour le djihad ? Pourquoi ce genre d'individu est-il encore habilité à exercer ?
Défendre la liberté et défendre la barbarie, c'est quand même pas pareil !
Ceci dit, il n'y a pas si longtemps on manifestait en France contre la déclaration universelle des Droits de l'Homme, en prétendant manifester "pour tous"... Et une certaine Pécresse a dû prêter allégeance à ces gens avant les élections (rapporté par le Figaro).
Une chose à ne pas oublier pourtant.
C'est que les religions ont toujours été des prétextes et/ou des enfumages idéologiques.
Ce qui a toujours été le vrai enjeu, a toujours été le pouvoir !
La religion, opium du peuple, n'a jamais été qu'un des moyens de se l'approprier.
La religion en tant que religere ( ce qui rassemble) n'est jamais qu'un moyen idéologique.
Alors les bons sentiments ici ne servent à rien et prendre du recul c'est d'abord comprendre qu'il y a en ce monde des intérêts, et que des gens sont prêts à défendre les leurs au détriment de ceux des autres.
Prendre du recul et aller de l'avant, c'est d'abord comprendre cela.
Que je ne peux défendre mes intérêts qu'en tenant compte de ceux de l'autre et en m'entendant avec lui sur les points d'accords et de collaborations possibles mais surtout sur les limites à ne pas franchir !
Ce que l'Occident semble avoir aujourd'hui plus que jamais oublié.
Un aveuglement dont il commence, malheureusement pour ses citoyens, déjà à payer le prix.
Maintenant disant que mes trois interventions doivent avoir un titre.
C'est du moins comme cela que je procède lorsque j'écris habituellement pour le gens qui me payent...
Donc
1/ Le contexte historique et géopolitique;
2/ l'Aller
3/ Le retour...
Tout cela donnant habituellement esquisse pour un document (livre, essai, etc... plus important)
Donc : Retour !
Premier idée : principe.
Le Djihad n'est pas une option ! C'est pas : satisfait ou remboursé/
Je lis le texte d'un avocat :
"« On juge un acte avant qu’il ne soit commis. L’État français se méfie de ces jeunes partis en Syrie mais tous ne sont pas des Mohammed Merah en puissance. Là, ils sont en détention provisoire depuis huit mois, c’est un simple principe de précaution. On ne doit pas être jugé pour ce qu’on va potentiellement faire, mais pour ce qu’on a fait. Ceux qui, en 1936, étaient partis combattre les Franquistes en Espagne, ont-ils été poursuivis ? »"
- Le rapport à la guerre d'Espagne
" Ceux qui, en 1936, étaient partis combattre les Franquistes en Espagne, ont-ils été poursuivis ? »"
est fallacieux. ET donc rhétorique !
D'un point de vue juridique la situation n'était pas la même !
La preuve il a fallu accommoder le droit pour les cas présent ce qui donnerait à votre avocat un argument qui est celui de la non rétroactivité ! Ou alors de s'attaquer à l'idée de lois d'exception concernant le terrorisme ! Ni en 36, ni en 79 ( et pour ma part j'avais la double nationalité qui n'existe plus ) on pouvait combattre ailleurs...
Que cet avocat me dise ce qu'il en est des gens de religions israélite !
Et là il aura un gros problème... De plus je suis d'accord avec cette double nationalité ! Les juifs ont payé assez de morts et de souffrance pour cela. Et si vous me dites : les Palestiniens aussi je serais d'accord !
- "L’État français se méfie de ces jeunes partis en Syrie mais tous ne sont pas des Mohammed Merah en puissance"
Je suis heureux qu'un avocat soit si perspicace !
Mais j'aimerais savoir sur quel argument il s'appuie ?
Veuillez m'excuser mais je n'ai pas souvenir que Mérah ait été au front...
"Là, ils sont en détention provisoire depuis huit mois, c’est un simple principe de précaution. On ne doit pas être jugé pour ce qu’on va potentiellement faire, mais pour ce qu’on a fait"
En tant que juriste je suis entièrement d'accord avec le Monsieur !
Il y a ce que l'on appelle la présomption d'innocence.
Sauf que vous ne pouvez pas appliquer des notions du droit pénal à des questions de "sécurité de l'Etat" !
En tant que "Démocrate" pragmatique je tiens à sauver un système y compris dans ces valeurs fondamentales comme la présomption d'innocence dont vous savez qu'elle est finalement assez récente dans le droit français...
Sauf qu'ici, dès lors que l'on appréhende un citoyen français dont on a toute s les raisons de croire qui a fait la guerre à l'étranger contre des forces où l'armée française ( aviation pour l'instant...;-) ) est impliquée, on est dans le Code Militaire et donc dans la question de la trahison !!! C'est donc le code de procédure militaire qui s'applique !
Mais pour finir, Madame la journaliste, que vos gamins regrettent, on s'en fout !
Toute ma compassion pour les mères ! Celles des enfants morts ! Celles des enfants perdus ! Une mère est une mère quelle que soit la guerre ! Et elles méritent tout notre respect ! Si vous savions aux nombres de mères que j'ai du écrire dans les années 80 !
Mais ce que j'ai fait aussi lorsque je suis devenu officier, d'écrire aux mères de "rebelles" morts que nous avons pu identifier ! J'ai même eu, des années plus tard,des réponses parfois haineuses parfois pas. Je l'ai fait beaucoup après ma démobilisation parce que j'avais gardé en dépit du règlement les références et j'envoyais au hasard...
A la vidéo des gamins ... Elle est connue ! Je ne pense pas que sont des vraies AK47 Trop lourdes pour le gamin de gauche. Mais peu importe ! Vous vous rendez compte ! Ces gamins pensent qu'ils jouent ! Ils sont manipulés par le mec qui leur parle !
Le pire Madame ! Pour un militaire ce sont des ennemis mortels !
ET croyez-moi ! J'en sais quelque chose !
Je pourrais parler de situations que je connais mieux comme par exemple il y a de jeunes tchétchènes qui se retrouvent à la fois dans le Donbass auprès pour défendre la Novorossia et en Irak et en Syrie dans divers groupes parfois rivaux. Ou d'un certain jeune homme de 17 ans qui s'est retrouver le 24 décembre 1979 à Kaboul...
Les raisons pour lesquels un jeune part à la guerre sont multiples.
Comme les raisons pour lesquels un individus fonce dans une foule lors d'un marché de Noël !
De vouloir, à partir des témoignages d'amis plus ou moins proches, tirer des conclusions, condamne à rester dans le superficiel.
Et ce d'abord parce que le jeune qui part ne sait pas lui-même pourquoi !
On pourrait parler du goût de l'aventure, qui à envoyé tant de gens "la fleur au fusil" se faire massacrer, une sorte de romantisme "guerrier" qui est propre à cet âge...
Ou de la fascination des armes qui y participe. A préciser alors que l'info qui veut qu"Ils "se souviennent des jeux de paintball entre les immeubles de la cité, l’été précédant leur départ. Ce qu’ils avaient pris pour un passe-temps était en réalité une forme d’entraînement
camouflé au maniement des armes", me paraît légèrement erronée.
La journaliste est-elle sûre de ne pas confondre paintball et airsoft ? La différence étant qu'une arme d'airsoft est souvent la réplique exacte d'une arme réelle ( et plus elle est proche du réel plus elle est chère, souvent plus chère que des armes réelles que l'on peut trouver sur les marchés de là-bas) et qu'elle permet d'en apprendre rapidement les mécanismes fondamentaux (sécurité, sélecteurs de tir, engagement du chargeur, mire, etc..) tandis que les armes de paintball sont des jouets en non des répliques.
Même pour ce qui concerne les déplacements en formations, ainsi que les systèmes de signes militaires, le paintball est une illusion dangereuse. Mais bon ...
Autres motivations : la conviction religieuse et l'endoctrinement.
- Pour ce qui est de la conviction religieuse, il faut savoir qu'elle est souvent un écran à la frustration sociale ( cette frustration n'impliquant pas forcément une misère sociale, mais simplement une absence de reconnaissance et surtout une absence de valeurs formatrices de quelque chose que l'on pourrait appeler une communauté (j'évite sciemment la notion d'identité)
- Pour ce qui est de l'endoctrinement, il faut s'étonner de l'étonnement des journalistes et des soi-disant experts qui pensent que cela se passe du jour au lendemain. Surdéterminant ainsi outrageusement les capacités de quelque idéologie que cela soit.
On le voit bien : les candidats viennent de tous les milieux, pas que de Hautepierre, mais pourquoi pas du quartier des XV. ?
Ainsi donc, et veuillez m'excuser, je dirais en simplifiant que ces départs ne peuvent s'expliquer que par une maladie ( et donc l'étude sérieuse de celle-ci ) profonde de la société occidentale.
Que dire de cette maladie ? Contre laquelle le Président Russe Vladimir Poutine et une grande partie de son peuple se battent parce qu'ils ont eu à la subir durant 90 ans...Bien que je ne pense personnellement que cela ne fut qu'un des symptôme (Celui du Dernier Homme) de cette maladie.
Et bien cette maladie, c'est que l'occident, après la Mort de Dieu; n'a rien trouvé de mieux à offrir que le consumérisme à outrance qui ne fait qu'accroître les frustrations.
La Démocratie, allez-vous me dire !
Mais regardez-là ! Exsangue ! Humiliée par toutes les multinationales ! Se moquant de ce qui devrait faire son ciment ! Les Citoyens ! Faisant la leçon au Monde entier et incapable de régler ses propres problèmes !
La Démocratie occidentale n'est pas le moins mauvais des systèmes mais le plus mou et hypocrite !
Il y a eu de grands démocrates : De Gaulle, Mendès-France, Roosevelt ! Il y en a encore, que j'ai eu pour certains l'honneur de rencontrer : Simone Veil, Badinter, Rocard (avant qu'il ne disjoncte). Et pour l'Alsace Adrien Zeller, Marcel Rudloff....
Mais dans l'ensemble, aucun n'a voulu comprendre ou avouer qu'il était venu le temps nietzschéen de la transmutation des valeurs, mais s'ils avouaient savoir que depuis 1918 au moins les américains avaient pensé la Démocratie comme manipulation des masses (E. Bernays)
Alors pourquoi ils partent ces gamins ?
Parce que la société dans laquelle ils sont ne leur donne plus d'IDEAL !
C'est aussi bête que cela !
Merci pour la précision.
Cela signifie que le choc en a été d'autant plus rude pour ces gamins.
Car les pistolets de Paintball ( à moins de disposer d'une réplique de type airsoft/paintball qui vaut dans les 300/400 euros) ont justement un caractère ludique qui les distinguent des armes réelles alors que les répliques airsoft (dont il faut rappeler qu'elles sont nées au Japon après la guerre du fait de l'interdiction totale d'armes à feu par les américains, lesquels soit dit en passant on commis des actes de barbarie culturelle comme on les vit encore aujourd'hui en détruisant(ou volant) les katanas parmi lesquels des pièces anciennes à la valeur inestimable) alors que les répliques airsoft donc cherchent à se rapprocher le plus possible du fonctionnement réel d'une arme.
Ce qui n'empêchera pas un double choc pour ces jeunes.
- Une arme véritable (et même ces sortes de jouets en plastique que sont les FAMAS) rien que de par son poids, sa matière constitue déjà une violence en soi. L'initiation à la manipulation fait immédiatement prendre conscience qu'on est là en présence d'une puissance capable de donner la mort et les gamins qui voudraient manipuler un pistolet par exemple "comme dans les films" manière rap risquent fort d'y laisser un pouce ou un doigt.
- Ensuite il y a le bruit, et l'odeur, le rapport là encore à une force brute qui peut exalter comme peut exalter la puissance à laquelle on est confronté lorsqu'on fait de la moto ou du cheval ( je préfère pour ma part le rapport naturel et noble au cheval...)
Pour beaucoup de "bleus" donc cette confrontation avec une puissance de mort constitue très vite une terrible prise de conscience de l'enfer dans lequel ils se sont engagés croyant simplement prolonger les jeux de l'été dernier.
Mais à ce moment-là, il est souvent trop tard...
- Dans la nuit du 24 au 25 décembre 1979 à 3h du matin débute ce que l'on a appelé l'opération Chtorm-333 : la prise ( à 1 contre 6) du Palais Présidentiel d'Amin à Kaboul par les unités Spetsnaz Alpha et Wympel qui ont permis l'entrée de la 40ème armée soviétique sur demande de ce qui avait été le gouvernement communiste précédemment au pouvoir. Inutile de revenir sur les détails.
- Cette "invasion a été motivée par deux raisons qui n'en faisait qu'une.
D'abord le montage par le Pakistan financé par la CIA depuis plusieurs années déjà (avec comme porteurs de valises Ben Laden et Hamid Karzaï mis en place comme président par les américains en décembre 2001 et qui vient de perdre les élections, le montage donc d'une opposition de type islamiste destinée à renverser le pouvoir pro-soviétique en place avant Amin.
Ensuite pour se faire, un soutien de plus en plus fort dans la région des groupements islamistes par le département d'Etat américain et la CIA !Ce soutien us ne visait pas seulement à affaiblir l'influence soviétique en Afghanistan, mais aussi bien la française et la britannique...qui étaient trop "amis" avec les pouvoirs traditionnels pro-occidentaux en place (Syrie, Irak, Jordanie, etc...)
Les premiers qui ont donc soutenu les mouvements islamistes dans la régions en jouant un jeu dangereux avec les pays du golfe sunnites.
- On peut dire en passant que l'aide française du retour de Khomeini au pouvoir avait été motivée par le grand ressentiment provoqué durant les années 50 par la collaboration CIA-MI6 lors de l'opération Ajax, pour éliminer un premier ministre modéré et dans la lignée d'un Nasser et doubler et les Français et les Soviétiques.
Pour faire vite, en soutenant sans cesse les mouvances islamistes les américains ont non seulement produit un grand ressentiment mais nourri les serpents dans le nid qui allaient tôt ou tard les mordre.
Je passe sur l'incroyable amateurisme non militaire dans la phase d'invasion, mais politique et militaire dans la phase d'occupation en Afghanistan et en Irak !!!
Il ne faut donc pas s'étonner de la situation actuelle !
Elle est le résultat :
1/ d'une agressivité sans discernement durant la guerre froide.
2/ de la volonté d'évincer les puissances occidentales européennes en place depuis parfois des siècles
3/ de l'usage sans discernement des rivalités religieuses existantes en les instrumentalisant sans la conscience d'en perdre de plus en plus le contrôle !
Si l'on ne tien pas compte de ce contexte historique et géo-politique, on ne comprend rien à la situation actuelle, à commencer par le 11 septembre 2001 !
Question éveil et mis en place d 'un esprit critique, on peut mieux faire !
Alors pourquoi s'étonner que le moindre prédicateur avec à sa disposition tous les outils et les moyens de com actuels pour ne pas les lâcher de jour comme de nuit, parviennent à les convaincre de ses délires !
L'accès aux savoirs, aux sciences, reste la meilleure arme pour permettre à des gamins de pointer trés rapidement les cotés délirant et absurde de ces messagers de la bêtise !
D'autant plus que l'Islam a été des siècles durant à la pointe des sciences !
"On leur demande de croire en une religion, et en un Dieu dés leur plus jeune âge, sans même se poser de question !"
Et que faites-vous des lycéens français de souche, catholiques et soit disant convertis en quelques semaines ?
Le problème avec la religion et la croyance, c'est qu'elle a tendance à déborder de la sphère privée. Si chacun croit dans son coin et laisse son voisin croire, ou ne pas croire ce qu'il veut, pas de problème. Le problème, c'est que le religieux a tendance à être intolérant. On a eu nos guerres de religion entre catholiques et protestants, les guerres "saintes", aujourd'hui on sunnites et chiites qui se foutent dessus, et chrétiens et musulmans ont cet autre point en commun qu'ils ont une fâcheuse tendance au prosélytisme, à vouloir imposer leur religion aux autres. De manière plus ou moins pacifique selon les lieux et les époques.
Bref, les deux frères ennemis issus du judaïsme se font la guerre quasiment depuis qu'ils existent.
L'autre énorme problème avec les religions, à mon humble avis, est leur nature même : La FOI.
Il faut croire aveuglément. Demander des preuves c'est mettre en doute la parole de Dieu. (La soi-disante parole de Dieu, parole que personne n'a jamais entendu, mais il faut croire certaines personnes que Dieu leur a parlé, et qu'elles nous rapportent fidèlement ses paroles...).
Donc il faut croire sans remettre en question.
Le hic, c'est qu'à partir de ce moment là, où aucune discussion raisonnable n'est possible, il n'y a pas de limite. (Un peu comme le capitalisme, tiens). Où commence et où s'arrête la croyance ?
Comment argumenter avec un croyant ?
On ne peut pas, car le croyant a le sentiment d'avoir toujours raison. (Sinon, il se fait taper sur les doigts par le curé ou son mentor qui lui demande alors s'il a bien la foi).
Et à partir du moment où une discussion raisonnable et argumenté n'est plus garantie, faut pas s'étonner que certains jeunes délaissés par la République et qui ne croient plus aux balivernes que les politiques leurs sortent, ces politiques qui n'en ont rien à faire du chômage, croient en autre chose. Certains votent au FN, d'autres partent en Syrie.
Merci d'abord pour votre si longue réponse. Je ne sais pas si mon message va passer. Je n'en suis pas sûr mais il y a une sorte de - ce sont des amis des DN qui me disent cela - difficulté à exprimer certaines choses. On m'a dit que je devrais passer au contact direct pour clarifier les choses.Mais je n'aime pas trop les rapports d'autorité...;-) Et puis tout cela n'a finalement aucune importance dans mon existence. Juste, comme disait Thomas Bernhard, une sorte d'irritation face à la complaisance de la médiocrité et à la lâcheté face à la Auseinandersetzung.
Pour le reste je demeure comme ces loups qui ne lâche pas leur proies tant qu'elle leur résiste.
A dire aussi que je suis heureux qu'existe un site d'une telle qualité journalistique. Et je pense sincèrement qu'il a toutes les chance de piquer sur la place la vedette aux DNA.
Et même si j'étais à la place des anciens employeurs du chef ici, qui a amplement réussi son pari, je ferais tout pour le récupérer d'autant plus qu'il y a derrière moi une puissance financière de première ordre. Mais enfin je ne voulais pas parler de cela ...
Pour une intervention qui plus est date un peu ( presque un an en fait)
Et il y a quelques impressions comme de l'au-delà... :-)
Dans votre premier paragraphe vous reprenez exactement la critique de Lévinas (dans Difficile Liberté) L'intolérance tient toujours à ceci que si je puis accepter que l'autre croit en un autre Dieu dans un certain œcuménisme, je ne peux pas penser que l'autre a raison; Je le tolère mais il n'en reste pas moins dans l'erreur. C'est tut le problème des gens qui adhèrent à une foi religieuse.
Il y a donc un minimum d'intolérance en toute religion.Parce que tout religion est, par la force des choses, plus ou moins dogmatique. Et j'aime bien votre manière de positionner les deux prosélytismes par rapport au judaïsme :-) Je suis d'accord avec vous mais je me souviens avoir eu de longues discussions avec un ami de la religion de Moïse qui soutenait le prosélytisme juif ;-)
La question de la religion dans la sphère publique est effectivement à se poser. J'ai beaucoup d'amis qui sont de ce point de vue là assez catégoriques : La République est laïque !
ET d'une certaine manière je les comprend.
Mais si je suis une jeune fille musulmane et dans la foi comment ôter mon foulard si ma foi me l'interdit ? Je suis sensible à se raisonnement, mais beaucoup moins à d'autres qui peuvent en découler comme de ne pas faire de sport ou de refuser des cours de biologie. Voyez les élections en Iran. Les femmes iraniennes progressent, même si honteusement lentement.Et je ne dirais pas que j'y vois un rapport avec la collaboration des Pasdaran et des Russes en Syrie. A part peut-être que les iraniens avaient (ou alors c'étaient les kurdes) à la frontière irakienne tout un régiment blindé constitué uniquement de femmes.
Pour ma part je considère que la France ne doit céder ni au communautarisme ni au fascisme !
Maintenant à venir à votre second point :La foi.
Je n'ai rien contre les gens qui ont la foi religieuse.
Et parfois même je les admire.
Vous savez cet étonnement de Zarathoustra quittant l'ermite et disant : "Il ne sont donc pas que Dieu est mort ?"
Je suis respectueux, admiratif, et même un peu envieux à l'égard des gens qui ont la foi religieuse. Je ne partage pas ses "illusions" A relier ce que Nietzsche a écrit à ce propos...
Mais la foi n'est absolument pas la même chose que le fanatisme religieux ou autre.A l'égard de ces gens je serais tenté de dire : pas de pitié.
Sauf que, un Etat démocratique doit se montrer aussi déterminé que juste.
Mais j'aimerais que nous discutions de cela :
"Et à partir du moment où une discussion raisonnable et argumenté n’est plus garantie, faut pas s’étonner que certains jeunes délaissés par la République et qui ne croient plus aux balivernes que les politiques leurs sortent, ces politiques qui n’en ont rien à faire du chômage, croient en autre chose. Certains votent au FN, d’autres partent en Syrie."
C'est sans doute là où non pas la Démocratie, ni la République françaises ont fait défaut !
Mais c'est là, manifestement, où les personnes et partis qui se sont érigés en représentants du peuple ( avec la complicité bien involontaire du peuple) ont trahi les principes fondamentaux de la France !
Alors ?
"Que faire ?"
;-)
Tout bon musulman est tenu de faire la même chose.
Avez-vous lu les textes saints ?