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Manifestation des salariés d’Alstom-Aptis : « Il vaut mieux un bon plan social qu’une mauvaise reprise »

Environ 70 salariés d’Alstom-Aptis, filiale située à Hangenbieten et dédiée à la fabrication de bus électriques, se sont rassemblés place de la République, ce jeudi 14 octobre. Ils manifestaient leur désaccord avec l’offre de reprise de Punch Motive International. Pour eux, le projet du groupe belge reproduit, « en pire », les erreurs commises par Alstom lors de la création de la filiale Aptis en 2018.

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Manifestation des salariés d’Alstom-Aptis : « Il vaut mieux un bon plan social qu’une mauvaise reprise »

« Accepter un repreneur sans projet viable c’est sacrifier l’avenir des salariés », « Punch : une histoire belge qui ne fait pas rire », « La folie c’est refaire la même chose et s’attendre à un résultat différent »… Les slogans des 16 pancartes dressées autour du jardin de la place de la République résument bien l’état d’esprit des 70 salariés d’Aptis, filiale d’Alstom dédiée à la fabrication de bus électriques. Réunis ce jeudi 14 octobre à Strasbourg, ils manifestent leur mécontentement face à la proposition de reprise de Punch Motive International, groupe belge de pièces automobiles. Pour rappel, la fermeture d’Aptis est annoncée depuis le 4 mai 2021.

Un salarié d’Aptis, filiale d’Alstom dédiée à la fabrication de bus électriques, prend en photo les slogans dressés le long du jardin de la place de la République, à Strasbourg. (Photo MB / Rue89 Strasbourg / cc)

Le PSE négocié par l’intersyndicale satisfait les salariés

Si les salariés d’Aptis plébiscitent le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), le nouveau nom d’un plan social, négocié par l’intersyndicale (CFDT, CGT, CFE CGC) avec la direction, c’est qu’il donne davantage de garanties que l’offre de reprise de Punch. Florian Bouché, secrétaire du Comité social et économique (CSE) et représentant syndical de la CFDT détaille :

« On a tendance à penser qu’un PSE c’est des licenciements. Ce n’est pas vrai. C’est un ensemble de moyens donnés aux salariés pour retrouver un emploi. Dans celui que nous avons négocié, il y a des aides à la mobilité interne – c’est-à-dire au sein d’autres sites d’Alstom –, et externe avec des aides au déménagement (double logement payé pendant 6 mois, frais de déménagement pris en charge) ou des formations. Des aides à la création d’entreprise, financières et organisationnelles, sont également prévues. Un accompagnement pour faire un bilan de compétences… Le tout, sur une période de 14 à 20 mois. Un temps pendant lequel le salarié est indemnisé par Alstom à hauteur de 99% de son salaire. Il faut bien comprendre qu’avec cette solution, les salariés se mobiliseront pour retrouver un emploi. Personne ne compte se tourner les pouces. Il vaut mieux un bon PSE qu’une mauvaise reprise ».

Un des slogans affiché le long du jardin de la place de la République, à Strasbourg. (Photo MB / Rue89 Strasbourg / cc)

« Le projet de reprise de Punch reproduit les erreurs du passé, mais en pire »

Éparpillés en face de la bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, les salariés ne sont pas opposés à l’idée d’une reprise de l’usine de bus électriques Aptis d’Alstom à Hangenbieten. « Nous ne sommes pas contre Punch ou contre le fait d’être repris, mais contre ce projet qui n’est pas pérenne », précise Florian Bouché.

Le projet de Punch prévoit notamment, côté salariés, une reprise de l’activité dès janvier 2022, après les livraisons des derniers bus Aptis à la RATP, 141 employés repris (soit la totalité) mais 15% seront mis en chômage partiel dès le rachat, et 22% reclassés dans le groupe Punch. Côté production, le repreneur souhaite passer d’un bus électrique à hydrogène, table sur une croissance de 7 à 9% avec plus de 200 bus après 2027, soit 14% du marché européen. Des prévisions de parts de marché « bien trop optimistes » au vu des moyens de Punch, selon Olivier et Jean (prénoms modifiés), responsable chez Aptis :

« Ce projet est aussi ambitieux que la création de la filiale Aptis en 2018 et manque autant de moyens. Et le tout est mené par une entreprise bien moins puissante qu’Alstom. Cela pose plusieurs questions, dont la principale est de savoir comment une entreprise peut arriver à relancer une société dans cet état ? Punch souhaite développer des bus à hydrogène, ce qui nécessite des compétences qui ne sont plus aujourd’hui dans l’entreprise. La matière grise est déjà partie. Aptis est une pyramide qui n’a plus de base. Forcément, ça s’écroule. Le projet de reprise de Punch reproduit les erreurs du passé, mais en pire. Donc on le refuse. On préfère ce qui a été négocié avec le PSE« .

La manifestation des Alptis a été couverte par de nombre médias, dont France 3 Alsace. Photo : MB / Rue89 Strasbourg / cc

Une situation crispante pour les salariés

Reprise ? PSE ? La situation d’Aptis inquiète ses salariés. Pierre (prénom modifié), 19 années d’ancienneté en tant qu’opérateur sur une ligne de production, raconte :

« On s’est beaucoup investi dans la création de la filiale dédiée à la fabrication de bus électriques. Ça se compte en heures supplémentaires. Et on y croyait. C’est triste d’en arriver là. Nous sommes en train de terminer la commande de la RATP (50 bus électriques). J’ai commencé le 43ème bus il n’y a pas longtemps. À chaque bus, on se rapproche un peu plus de la fin. Ça fait mal au moral. J’espère qu’on y verra vite plus clair. Je suis le seul à ramener de l’argent dans mon foyer. J’ai deux enfants, ma femme est au chômage et j’ai le prêt de la maison à rembourser. Je dois assurer la suite ».

Les salariés étaient éparpillés en face de la bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg. (Photo MB / Rue89 Strasbourg / cc)

La direction devrait prendre sa décision d’ici le 15 octobre

Les échanges entre la direction d’Alstom-Aptis et Punch Motive International sont toujours en cours. La reprise – ou non – de l’usine de bus Aptis d’Alstom à Hangenbieten par le groupe Belge devrait être décidée lors d’une réunion interne au groupe Alstom, qui doit se dérouler entre le 14 et le 15 octobre. Les salariés espèrent être informés au plus tard le lundi 18 octobre. À l’issue de la manifestation, une délégation a été reçue par le cabinet de la préfète. Une manière de passer les positions des employés à l’administration d’État, qui devra superviser une éventuelle reprise.


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