De plus en plus de pollutions identifiées dans l’eau du robinet des habitants et des habitantes du Bas-Rhin. C’est l’une des conclusions de l’étude publiée par l’association UFC-que-Choisir, basée sur les données 2024 de l’Agence régionale de santé (ARS). Dans le département, un peu plus de 5% du réseau d’eau potable est concerné par une pollution aux pesticides ou aux nitrates.
Un pourcentage en hausse par rapport à la précédente étude parue en 2021, où le Bas-Rhin n’apparaissait pas comme un département particulièrement concerné. Une situation « logique » selon Pierre-Jean Dessez, référent environnement pour l’UFC-Que Choisir du Bas-Rhin :
« Si le nombre de cas de pollutions explose dans le département, c’est en partie parce que les analyses de l’eau potable sont plus poussées. Davantage de pesticides sont recherchés par rapport à la fin des années 2010, ainsi que leurs métabolites [des molécules issues de la dégradation d’un pesticide, NDLR]. C’est pour cela que le nombre de pollutions identifiées dans le Bas-Rhin a connu une telle évolution en seulement quelques années. »
Des agglomérations également concernées
À l’instar des observations au niveau national, les communes rurales bas-rhinoises ne sont plus les seules concernées par ces pollutions aux pesticides. Certaines agglomérations sont également touchées, comme Rue89 Strasbourg l’a déjà évoqué pour Haguenau et ses environs, mais aussi au sud et à l’ouest de l’Eurométropole de Strasbourg.
Le point le plus critique dans le Bas-Rhin reste le secteur de Mommenheim. L’antenne locale de l’association UFC-Que-Choisir alerte : « l’eau y est déclarée “de qualité insuffisante” pour les pesticides avec un taux de conformité des analyses de 0% sur l’année 2024 ! »
À l’origine de ces pollutions, des pesticides utilisés dans l’agriculture intensive, comme l’OXA alachlore, un métabolite de l’herbicide S-Metolachlore, utilisé dans la culture intensive du maïs jusqu’en juillet 2024, avant son interdiction par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Les métabolites peuvent mettre des dizaines d’années avant de disparaître après leur interdiction.
Le principal responsable des pollutions de l’eau potable dans le Bas-Rhin reste la chloridazone-desphényl, un métabolite de la chloridazone, herbicide utilisé pour le traitement des cultures de betteraves, interdit depuis fin 2020 en France. Selon l’ARS des Hauts-de-France, cette interdiction est liée au « non renouvellement de l’autorisation de mise sur le marché [par le producteur] pour des questions de rentabilité ».
Pas de prise en compte des PFAS dans cette étude
Une des limites de cette nouvelle étude est l’absence de prise en compte des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), connues sous le nom de « polluants éternels » dans l’eau du robinet. Très persistants dans l’environnement, ces substances chimiques ont déjà été découvertes en quantité dans l’eau de nombreux habitants de l’agglomération de Saint-Louis, dans le sud de l’Alsace.
« Nous nous sommes basés sur les données en accès libre des différentes ARS de l’Hexagone, or l’obligation d’analyse des PFAS dans l’eau potable ne rentre en vigueur au niveau national qu’à partir du 1er janvier 2026. C’est pour cela que ces données ne sont pas présentes dans cette étude », justifie Pierre-Jean Dessez.
Depuis 2011, l’estimation du coût de la dépollution des pesticides et des nitrates dans les eaux souterraines en France métropolitaine n’a pas été actualisée. À l’époque, le Commissariat général au développement durable (CGDD) a chiffré le montant de « la restauration des eaux souterraines » entre 522 et 847 milliards d’euros (hors coûts d’énergie du pompage avant traitement).
Une estimation basse 15 ans plus tard, étant donné que ce calcul ne prenait pas en compte de nombreux pesticides ni leurs métabolites, ni le coût de la dépollution des PFAS. Le Forever pollution project a estimé le montant de la dépollution des « polluants éternels » entre 710 millions et 12,2 milliards d’euros en France, chaque année pendant 20 ans.



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