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Procès de l’affaire Maxime Walter : les experts et les plaidoiries des parties civiles

EN DIRECT. – Rue89 Strasbourg vous propose de suivre en direct le procès du Dr Raphaël Moog. Accusé d’homicide involontaire après la mort aux urgences d’un adolescent qui s’était lacéré la rate lors d’une chute à vélo, ce chirurgien de l’hôpital de Hautepierre conteste toute négligence et assure qu’il a agit dans les règles de l’art à l’époque. Cette deuxième journée est consacrée aux experts médicaux, puis aux plaidoiries des parties civiles.

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La présidente Sophie Thomann (dessin Guillaume Decaux)

Le Dr Raphaël Moog est défendu par Me Bernard Alexandre (Photo PF / Rue89 Strasbourg / cc)
Le Dr Raphaël Moog est défendu par Me Bernard Alexandre (Photo PF / Rue89 Strasbourg / cc)

Merci à tous de nous avoir suivi et à demain.
Fin de ce compte-rendu pour aujourd’hui ! Retrouvez demain notre synthèse de la journée et rendez-vous à 9h pour la suite et la fin, les réquisitions et la plaidoirie de la défense.
L’audience est levée pour la journée.
Me Renaud Bettcher se rapproche du greffe pour donner ses conclusions et précise simplement qu’il a demandé des montants importants pour ce dossier « pas simple ».
Me Renaud Bettcher : « Et en plus vous avez une morgue… Ce qu’a dit Laura Walter est vrai. Est-ce qu’il y aurait une caste qui serait au dessus des lois ? Je vous confie mon fils vous le tuez, vous devez être viré. Parce que vous avez fait une connerie. Tout l’hôpital vous l’a dit. Le bloc était prêt. Si vous ne saviez pas faire, il fallait le donner à quelqu’un d’autre. Vous ne l’avez pas fait, vous êtes hautement coupable. Vous ne vouliez pas perdre la face, devant les infirmières, les collègues… Vous préférez maquiller votre crime. »
Me Renaud Bettcher : « Et il y a deux choses qu’ont ne peut pas occulter… Pourquoi Becmeur, qui est en train d’opérer, quitte son bloc et rejoint Moog ? On s’est posé la question. La juge d’instruction aussi, elle place le Dr Olexa (réanimatrice) en garde à vue et la met sur écoute et on apprend dans une de ses conversations, qu’elle pense que Moog n’a jamais fait de splénectomie et que vous auriez besoin de Becmeur pour vous couvrir. »
Me Renaud Bettcher : « Et cette caste qui se protège, tous ces médecins qui viennent témoigner à quel point le Dr Moog est formidable, ah oui ! Formidable, vraiment ! Et le comble du comble, cette ordure de Clavert qui vient insulter Maxime en le traitant de glandeur ! Si ça avait été mon fils, je me serais levé pour lui en mettre une ! »
Me Renaud Bettcher : « Le CHU de Strasbourg, j’en entends parler depuis si longtemps ! C’est une pétaudière. Des anciens internes qui me disent « si tu savais ce qu’il se passe, les morts qu’on maquille… »
Me Renaud Bettcher : « Au Moyen-Âge, il y avait une torture qui consistait à remplir quelqu’un. Avec 4 litres, c’était la torture ordinaire. Et vous (s’adressant au Dr Moog), combien de litres vous lui avez injecté ? 27 ! 27. 27. Ah votre famille peut être fière de vous ! »
Me Renaud Bettcher : « Vous (s’adressant au Dr Moog), vous ne savez pas opérer. Vous êtes un petit. Un médiocre. »
Me Renaud Bettcher : « Quand on m’a enlevé la rate, on m’a prévenu des risques mais je m’en foutais de mourir, tellement je souffrais. »
Me Renaud Bettcher, avocat des grands parents, intervient régulièrement dans les débats entre la présidente et le Dr Moog (Dessin Guillaume Decaux)
Me Renaud Bettcher, avocat des grands parents (Dessin Guillaume Decaux)
Me Renaud Bettcher : « Les souffrances causées par une hémorragie interne sont inhumaines. Je le sais puisque je me suis moi même fracturé la rate. Quand j’arrive à l’hôpital civil, on me dit que ce qui m’arrive est grave. On me fait des examens, on me perfuse, on me place des sondes… Il y a des alarmes partout. C’est ça la surveillance armée ! Et on me donne une pompe à morphine, car la douleur est atroce. »
Me Renaud Bettcher : « Je vous rends hommage aussi madame la présidente, vous avez dit que vous n’étiez pas médecin et pourtant, vous avez été capable de soulever les problèmes de santé et de procédure lors de l’instruction de ce procès. »
Me Renaud Bettcher : « Tout ce que j’ai entendu dans ce dossier est dégueulasse. Et il faut rendre justice à l’adjudant de la section de recherche, qui a fait un véritable travail de bénédictin pour que cette affaire arrive devant un tribunal. Et c’est ça que je trouve dégueulasse. Jusqu’à aujourd’hui, vous ne baissez pas les yeux, vous ne voulez pas reconnaître que vous êtes un fautif. »
Me Renaud Bettcher prend la parole, pour les grands-parents de Maxime Walter.
Me Nicolas Fady : « Et ensuite, ça aide à comprendre pourquoi Raphaël Moog n’arrive qu’à 18h à l’hôpital, parce que son équipe gagne et qu’il faut profiter un peu de la victoire. Maxime Walter a attendu son chirurgien toute l’après-midi. Et quand il est arrivé, il a tourné les talons, il a refusé de voir la réalité en face. »
Me Nicolas Fady : « Raphaël Moog est vice-président du FC Truchtersheim, joueur vétéran et entraineur des plus jeunes. Quand on cherche des raisons de son absence, alors qu’il aurait dû être au chevet de son patient. Il est localisé à Truchtersheim, le terrain de foot est à côté de chez lui. Lorsque son téléphone sonne à 15h30, il ne répond pas ! Il rappelle à 15h51 parce que c’est la mi-temps. »
Me Nicolas Fady : « Quand on étudie le dossier. La conclusion c’est que Raphaël Moog n’était pas à son poste. Il n’a pas répondu. Il a gravement failli à son devoir. »
Me Nicolas Fady : « C’était au Dr Moog de mettre en place la « surveillance armée » dont avait besoin Maxime à partir du moment où le TNO avait été choisi. Or, non seulement il ne met pas en place cette surveillance mais il se désintéresse du cas de son patient. »
On passe à la plaidoirie de Me Nicolas Fady, également pour les parents Walter.
Me Jean-Christophe Coubris : « Pour le préjudice moral, je demande 50 000€ pour chacun des parents. Au regard de ce qu’on leur a fait subir, ce n’est vraiment pas trop. ET je demande que soit financé le monument où repose Maxime, 23 000€. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Et le comble du comble est que lors des dernières heures de conscience de Maxime, on l’a enlevé à ses parents. On leur remet un document, les visites se terminent à 20h. Thierry Walter ne serait jamais parti. C’est la cigarette qui l’a piégé. Il est allé fumer et lorsqu’il a voulu revenir, on n’a pas ouvert la porte. On est aux urgences quand même ! On l’a mis à la porte, voilà le comportement de l’hôpital ! »
Me Jean-Christophe Coubris : « Je ne détaillerai pas mes chiffres, ils sont dans les écritures. Je vous demande un préjudice de souffrances endurées, et un préjudice de se voir mourir. Maxime, toute la journée du 21 septembre est conscient et se verra partir. A tel point qu’il demandera à ce qu’on l’achève. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Alors je sais qu’on ne peut pas ici réclamer réparation pour une faute détachable d’un service hospitalier. Mais tout de même. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Tout le service se demande ce qu’il se passe. Un médecin réanimateur s’évanouit pendant un massage cardiaque !!! Une infirmière hurle qu’on arrête cet acharnement ! »
Me Jean-Christophe Coubris : « Et puis alors après on l’opère deux fois. Alors que les analyses sanguines montrent que la vie n’est plus possible. Pour quelqu’un qu’on ne voulait pas opérer… quel intérêt ? Ces opérations ne sont effectuées que pour couvrir le Dr Moog, la seconde n’était qu’une autopsie ! »
Me Jean-Christophe Coubris : « On préfère mettre ça sur le compte du Dr Mayer alors qu’en réalité ce dernier n’a pas vu le patient. A minuit, le Dr Mayer appelle, il est vraiment inquiet. Mais le Dr Moog ne se déplace toujours pas. On fait une embolisation à la place… Mais c’est déjà trop tard. »
Me Jean-Christophe Coubris : « De l’autre côté de la barre, on nous explique que le Dr Moog a été victime d’un manque d’informations… Pauvre Dr Moog ! Qu’il ait été chez lui ou sur un terrain, on s’en moque. De toutes façons, il n’était pas là. Tout un hôpital se met en place, prépare le bloc, tout le monde est persuadé que Maxime Walter va être opéré… Mais le Dr Moog n’est pas informé. On ne l’appelle pas en réalité parce qu’il ne veut pas opérer. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Cette expertise de la CRCI conclut que c’est l’attitude du Dr Moog qui a abouti à la mort de Maxime Walter. C’est sans ambiguité. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Et pas un mot de compassion, je craignais ces excuses, six ans après les faits, un peu facile. Mais j’avais bien tort ! Quand j’entends les témoignages de la famille, je regarde Moog : rien. »
Me Jean-Christophe Coubris : « L’expertise de la chambre d’indemnisation, rédigée par d’éminents experts, est très claire. La TNO ne se discute pas dans les toutes premières heures. On sait maintenant que lorsque la stabilité s’écroule à 15h30, on aurait dû changer notre fusil d’épaule. Page 15, ils disent : « cette procédure est strictement non conforme aux règles de l’art ». En 15 ans, je n’ai jamais lu « strictement » dans un rapport d’expertise ! »
Me Jean-Christophe Coubris : « Et j’ai l’habitude des dossiers médicaux. Il est extrêmement rare de voir trois expertises qui ont toutes les mêmes conclusions ! »
Me Jean-Christophe Coubris : « Ce ne serait qu’une négligence mais c’est surtout là que le Dr Moog commet une faute. Il n’ausculte pas le patient parce qu’il comprend qu’il est allé trop loin dans le traitement non-opératoire. Et tout ce qui va suivre n’est qu’une suite de négligences coupables. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Le Dr Moog est vice-président d’un club de foot, qui joue un match important en coupe de France. Et en plus son équipe gagne… alors il faut fêter la victoire. Et il arrive seulement vers 18h. »
Me Jean-Christophe Coubris : « L’interne l’appelle à 15h30, elle l’alerte toute jeune qu’elle est. Il rappelle une dizaine de minutes après et un dialogue s’ensuit où il ne peut alors ignorer la gravité de la situation. Et là, il n’arrive qu’à 18h30 ! Que s’est-il passé entre le rappel de 15h50 et son arrivée ? »
Me Jean-Christophe Coubris : « Et malheureusement ce procès ne lèvera pas totalement le voile… Je suis aujourd’hui devant un médecin que je considère comme le chef d’orchestre. A 12h50, alerté, il décide de ne rien faire tant qu’il n’a pas le résultat du scanner. Mais même avec ces résultats : une lacération de grade 4, un blush artériel, une situation exceptionnelle qui ne se produit que tous les 2/3 ans – il ne se déplace pas ! »
Me Jean-Christophe Coubris : « Quand vous rentrez dans leur maison, Maxime est partout. Ce n’est pas un deuil pathologique, ils sont révoltés. Et je les comprends quand je vois qu’il n’y a aucune remise en question, l’attitude du Dr Moog qui referait exactement la même chose… C’est ça qui a détruit cette famille. Laura et Marine ont tenté de mettre fin à leurs jours, et Thierry également dans les jours qui ont suivi, il n’en a rien dit bien sûr. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Quand Thierry et Caroline sont venus me voir, ils m’ont raconté l’histoire qu’ils ont relatée il y a quelques minutes. Je n’y ai pas cru. Car je suis comme tout le monde. Je ne peux pas imaginer qu’un médecin puisse mentir. Je ne peux pas imaginer qu’un médecin ne fasse pas tout pour sauver son patient. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Je tiens à remercier le tribunal d’avoir accordé trois jours à cette audience, on voit à quel point c’était nécessaire. »
Me Jean-Christophe Coubris s’avance à la barre, il intervient pour les parents de Maxime.
L’audience reprend.
Reprise prévue dans 10 minutes.
Après ces témoignages qui ont fortement ébranlé le public dans la salle d’audience, la présidente propose une suspension d’audience.
Caroline Walter : « Et le Pr Clavert que je suis allé voir le lundi matin… parce que je ne savais plus où aller. Sa secrétaire m’a reconnue mais lui non évidemment, voilà le mépris de ces gens là. Quand on a finalement arrêté « ça », parce que ce n’est plus de la médecine, on est restés là, tout le monde a fui. »
Caroline Walter : « Depuis six ans, j’entends le râle de Maxime pendant ces deux jours. Alors moi contrairement à mon mari, je suis en colère. Dans la médecine, il y a des bons et des mauvais. C’est pour ça qu’on se bat, je ne souhaite à aucune mère de vivre ce que j’ai vécu. J’ai pris perpetuité… On l’a emmené à un endroit pour qu’il soit sauvé et on l’a laissé mourir. »
Caroline Walter : « Ce jour là, tout le service voyait que Maxime était en train de mourir. Tout le personnel fuyait cette chambre. Le corps de mon fils était froid et dur. Son corps était en décomposition, et l’infirmière qui nous disait que tout allait bien. Voilà ce qu’on a enduré pendant ces deux jours. »
C’est maintenant au tour de Caroline Walter, la mère de Maxime.
Thierry Walter, avec une voix très cassante : « Nous ne sommes pas là pour emmener quelqu’un en prison. On veut juste que ça change. On nous prend pour des cinglés, on change de trottoir quand on nous croise. On avait juste espéré un début de remise en question. Rien du tout. Et quand je vois que le président du conseil de l’ordre vient personnellement le défendre, ça me pose un problème moral. »
Thierry Walter : « J’ai un membre de la famille qui a un poste important à l’Etablissement français du sang (EFS). Je me suis donc lancé à la recherche des poches qui sont parties de l’EFS ce lundi. J’ai constaté que des poches avaient été attribuées à des patients qui ne les avaient jamais reçues. »
Thierry Walter : « J’ai insisté toute l’après-midi pour que Maxime soit opéré. J’ai proposé de signer une décharge et le Dr Moog me dit qu’un tel document n’existe pas. Je n’ai jamais été d’accord avec le TNO. Quand on vous dit que votre fils va mieux et que vous le voyez dans la chambre, maintenu sanglé dans un lit en oblique la tête en bas, en train de vomir du sang, est-ce que vous pensez que n’importe quel abruti ici serait d’accord avec ça ? »
Thierry Walter : « Sur le nombre de poches, le procureur de la République nous a dit qu’il y a eu beaucoup plus de poches qui sont passées que ce qui est mentionné dans le dossier, or ce dossier mentionne déjà 114 poches ! »
Thierry Walter : « Alors à 18h30, le Dr Moog passe et donne des consignes pour calmer la douleur, ce qui fonctionne effectivement à 19h. »
Thierry Walter : « Toute l’après-midi, ça n’a été que poches, après poches, après poches… On découvre notre enfant avec les yeux qui partaient dans tous les sens qui ne nous reconnaît plus, accroché au brancard et qui crie « aidez moi », « aidez moi »… Ma femme part à 17h pour revenir vers 18h30 car elle ne supportait plus les cris. »
Thierry Walter : « A l’échographie, le radiologue nous dit « vite vite au bloc plus un scanner ». Ce qui est effarant est qu’après qu’on ait mesuré sa tension à 6, ce fut le branle-bas de combat pour aller au bloc, pour qu’il soit opéré d’une ablation de la rate. On reste devant le bloc. On attend. Et on apprend qu’en fait, Maxime a été transféré par une porte-arrière au scanner, sans nous prévenir. »
Thierry Walter : « Pour vous démontrer l’organisation, le sérieux de ce service. C’est un infirmier qui a fait la régulation, qui a classé le cas de Maxime en « non critique ». Bon classement ou pas ce n’est pas la question, c’est simplement que ce n’est pas la réglementation ! Même chose lorsqu’une interne a posé la voie veineuse. »
Thierry Walter : « Ce que je constate aujourd’hui, c’est qu’il n’y a aucune remise en question. Et d’ailleurs, tous les médecins viennent le soutenir aujourd’hui, parce que lorsqu’on pointe des dysfonctionnements, comme la différence entre la garde ou l’astreinte… Mais alors, ils ne répondent pas à la même justice que nous les médecins ? »
Thierry Walter : « Quand on était au chevet de notre fils, j’ai compté les poches de sang. Il en a reçu quinze. Et au final, il en restait quatre ? Alors j’ai cherché, je suis allé les chercher jusqu’à l’établissement français du sang et j’ai fini par les retrouver. »  
Thierry Walter : « Entendre dire que j’aurai dopé mon fils pour qu’il fasse de la compétition… Moi j’ai arrêté justement parce que je ne voulais pas entrer dans le système. Quand Maxime a déclaré qu’il voulait faire de la compétition, ça a été un choc pour moi et je lui ai constamment rappelé qu’il pouvait en sortir. »
Laura Walter est en larmes et s’exprime avec beaucoup d’émotion. Elle cède la barre à Thierry Walter, le père de Maxime.
Laura Walter, en pleurs : « Je ne pense pas qu’on en serait là aujourd’hui si le Dr Moog nous avait dit : « j’ai essayé, j’ai fait une erreur ». Je ne veux pas qu’il aille en prison. Quand je le vois aujourd’hui, je me dis qu’on va peut-être détruire la vie de quelqu’un, je ne veux pas ça. Je voudrais juste qu’on soit sûr qu’il se remette en question. »
Laura Walter, soeur de Maxime, 25 ans, prend la parole : « ça fait deux jours qu’on parle de chiffres. J’aimerais qu’on ait un peu plus un côté humain. Je ne demande pas que les médecins pleurent avec nous pour quelqu’un qu’ils ne connaissent pas. Mais à l’hôpital, on a dû pratiquement forcer la porte de la chambre de Maxime pour le voir. Je voudrais qu’on remette un peu d’ordre dans ce système parce qu’il y a un sacré bordel, ça ne devrait pas se passer comme ça dans les hôpitaux aujourd’hui. »
Claude Ostertag : « Je ne suis pas médecin mais il n’y a pas une seule publication qui dit qu’il faut laisser une hémorragie continuer. A ce stade, sauver la rate n’avait plus d’importance. »
Claude Ostertag : « Je ne m’explique pas comment l’équipe a pu ne pas se rendre compte de l’instabilité hémodynamique de Maxime durant l’après-midi. A 15h30, le coeur de Maxime bat à 120 p/mn, c’est à dire 150 pour une personnes normale, il a déjà reçu 1,5 litres de produits divers en transfusion. Il était en choc hémorragique. Et que dit le Dr Moog ? De continuer les transfusions. »
M. Ostertag : « Sur la stabilité hémodynamique… On parle d’instabilité pour un rythme cardiaque supérieur à 110 pulsations par minute mais pour une personnes normale, qui bat autour de 70. Maxime battait autour de 40 pulsations / mn, donc il aurait fallu rajouter 30 aux mesures pour constater que son coeur battait trop vite. »
M. Claude Ostertag : « Sur la pédiatrie… Tous les hôpitaux français limitent la pédiatrie à 15 ans, voire 16. Et en plus Maxime, athlète, n’avait plus rien d’un enfant. L’ordre des médecins dit que la pédiatrie est la médecine pour les patients de 1 an à la puberté. Le Dr Olexa a même noté qu’elle avait un patient adulte, auquel on appliquait une thérapie pédiatrique. »
M. Ostertag : « Le Dr Moog nous a expliqué qu’il mettra une pression dans l’abdomen pour comprimer l’artère splénique. Mais évidemment, il y a la pression sur les vaisseaux sanguins, qui seront comprimés bien avant l’artère ! »
M. Ostertag : « Sur la présence du Dr Moog, il est noté que le Dr Moog était sur le tableau de garde, signé par le Pr Becmeur, pas seulement d’astreinte. »
M. Ostertag : « Je voudrais rappeler que ça fait six ans qu’on nous a privé de notre petit fils. »
M. Ostertag, grand-père de Maxime Walter, se dirige vers la barre pour prendre la parole.
L’audience reprend.
Contrairement à ce que nous avons écrit, le procès n’entendra pas la troisième équipe d’experts. On passera directement à l’audition de la famille, puis aux plaidoiries de la partie civile.
Ce compte-rendu est suspendu mais restez avec nous, nous sommes de retour à 14h30 pour la suite de cette audience passionnante.
Plus de question aux experts. L’audience est suspendue jusqu’à 14h30. Elle reprendra avec l’audition des derniers experts, puis on procédera aux premières plaidoiries.
Les experts indiquent que le réanimateur aurait dû prendre le chirurgien par le col en disant « il faut l’opérer ». Pr Gouillat : « Ca traduit un problème de culture. Le réanimateur n’avait pas le poids et l’expérience suffisants pour s’imposer face au chirurgien. »
Me Alexandre décortique le circuit qui a abouti au fait que le Dr Moog n’ait pas été informé de l’état du patient en fin de soirée.
Me Bernard Alexandre reprend la démonstration selon laquelle l’interne de garde était plutôt rassurante à 21h. Les experts répondent que ce qui manque, c’est un point entre les médecins à la fin de la journée.
La discussion porte sur l’astreinte, et sur la nécessité de la présence du Dr Moog. Les experts répondent que lorsqu’il y a une astreinte, l’équipe sur place doit être en mesure de répondre aux complications.
– Me Bernard Alexandre : « Le journal of pediatrics indique un taux de mortalité de 2,45% sur plus d’une centaine de traumas spléniques traités en TNO. Avez-vous un commentaire ? » – Pr Mure : « Je ne commente pas un article sur lequel je n’ai pas fait une lecture critique. »
– Me Bernard Alexandre : « Alors qui doit gérer ces questions ? » – Pr Gouillat : « Tout dépend de ce qu’on veut faire. Avec 35% de taux de protrombine, on ne va pas en mourir mais s’il s’agit d’opérer, évidemment il faut le corriger avant. » – « Est-ce un risque d’opérer sans corriger ? » – « Aucune équipe médicale n’opérerait avec un tel taux. » – La présidente : « Ca se corrige en combien de temps ? » – Pr Mure : « Il faut commander des plaquettes, du sang, etc. Il faut se préparer et le réanimateur, l’anesthésiste, le chirurgien se sont mis en commun et se préparent à toute éventualité. »
Le Pr Gouillat : « On fait fausse route avec ces remarques. Ce n’est pas inhabituel, c’est assez normal même qu’un patient victime d’un traumatisme consomme ses facteurs de coagulation. »
– Me Bernard Alexandre : « Que dire de la chute du taux de protrombine ? » – Pr Mure : « Le taux de protrombine qui chutait montrait bien qu’il consommait ses facteurs de coagulation. »
– Me Bernard Alexandre : « Vous vous souvenez de l’issue de ces 3 cas ? » – Pr Mure : « Une est décédée, les deux autres ne sont pas décédés des complications hémorragiques. »
– Me Bernard Alexandre : « Combien de splénectomie d’urgence avez vous faites ? » – Pr Mure répond en hésitant : « 3, 4… Il y a eu une réorganisation. »
La présidente Sophie Thomann (dessin Guillaume Decaux)
La présidente Sophie Thomann (dessin Guillaume Decaux)
– La procureure Morgane Robitaillie : « Est-ce que ce traitement non-opératoire, même justifié, était risqué ? » – Pr Mure : « Il y avait des facteurs de risque. » – « Importants ou faibles ? » – « Il est difficile de répondre de manière précise. »
Me Coubris précise : « On nous dit que l’instabilité est un critère pour continuer le remplissage, c’est pour ça qu’on vérifie. Une autre question : dans votre rapport, vous indiquez qu’il y a une mortalité de 1,7% après une ablation de la rate. Vous parliez de 10% tout à l’heure. » – Pr Gouillat : « On parlait des risques liés à l’opération en urgence. Les chiffres que vous citez concernent la mortalité à long terme, exception faite des risques post-opératoires. »
Me Coubris pour les parties civiles demande si dans les limites des 2 litres acceptables en transfusion pour Maxime Walter, il faut prendre en compte les autres fluides, comme la gelofusine. Le Pr Mure répond que ces limites sont à prendre en compte, mais ne sont pas les seuls éléments : « ce qui compte, c’est l’état de l’enfant. »
Me Bettcher pour les parties civiles demande aux experts de se prononcer sur le non-déplacement du Dr Moog. Ils indiquent qu’ils ont déjà répondu.
La présidente demande si les experts ont déjà pratiqué des splénectomies en urgence. Les experts répondent que oui mais que la chirurgie d’urgence est évidemment à risques. Le Dr Moog rappelle que dans ses auditions, il a entendu le Pr Mure indiquer qu’il avait opéré deux fois en urgence des enfants pour un trauma splénique et que ces deux enfants étaient morts.
La présidente : « Si la décision d’opérer n’avait été prise que vers 21h, quelles auraient été les chances de Maxime ? » – Pr Gouillat : « Difficile à dire, mais plus la décision d’opérer était reculée, plus ses chances diminuaient. Mais il y avait une chance que Maxime s’en sorte s’il avait été opérée à 21h. »
Pr Mure : « L’arrivée de l’insuffisance rénale aurait dû alerter l’équipe médicale. »
– La présidente : « Vous situez entre 16h et 18h l’heure où la réévaluation aurait dû être faite ? » – Pr Gouillat : « Au vu des paramètres, de l’état clinique général de l’enfant, pour nous, on a du mal à considérer que le TNO restait valide après cet horaire. »
Pr Mure : « Pour conclure, le maintien d’un TNO en fin d’après-midi s’est conclu par une perte de chance, qu’il est difficile d’évaluer. Une organisation mieux appropriée des urgences aurait pu réduire cette perte de chance. »
Pr Mure : « Si Maxime avait été opéré à l’arrivée, il aurait pu faire ce syndrome compartimental tout autant, et il aurait même pu en être victime après l’opération. On ne peut pas affirmer qu’une prise en charge plus appropriée aurait permis d’éviter le décès. »
Pr Mure : « La conséquence directe est que les gestes appropriés ont été effectués trop tard. La rupture de rate est une affection rare et grave, le pronostic vital est toujours engagé surtout en présence d’un blush artérielle, témoin d’une hémorragie sévère. Si la prise en charge n’est pas rapide, le décès est quasi-constant. »
Pr Mure : « Le chirurgien est très expérimenté. Mais il n’a pas vu les clignotants orange puis rouges qui lui indiquait qu’il faisait fausse route. On connait bien ce problème. Normalement, ça ne va pas jusqu’au décès puisqu’il y a des gardes fous. Normalement, d’autres médecins par exemple. Est-ce que le senior de réanimation était à même de faire valoir ses arguments au Dr Moog ? Manifestement, c’est passé inaperçu. »
Pr Mure : « L’origine de cette erreur d’appréciation réside dans l’absence d’un examen initial. Le Dr Moog s’est privé d’un outil d’appréciation utile. La seconde origine, c’est l’absence de collégialité dans la décision. On ne trouve pas de trace d’une discussion collégiale pour fixer la conduite à tenir. On peut regretter également l’absence d’une feuille de route, qui aurait fixé le calendrier de la surveillance et les délais à surveiller. »
Pr Mure : « Manifestement le Dr Moog a mal évalué l’état réel du patient. D’une part la persistance d’une hémorragie active, des micros perfusions issus du syndrome compartimentale, et ceci au regard de la gravité des lésions constatées. Il y a donc une erreur d’appréciation. »
Pr Gouillat : « Donc finalement, la décision de maintien du TNO en fin d’après-midi n’était pas justifiée. »
Pr Mure : « Sur l’évolution du patient, en fin d’après-midi, il existait des signes cliniques d’une dégradation. A ce stade, il apparaissait indiqué de faire un vidage du péritoine puis une splénectomie. Ces décisions ont été prises trop tard dans la nuit. »
Selon ces experts, le choix de ne pas opérer était une option valide au moment de la prise en charge.
Les deux médecins projettent des documents sur les écrans placés dans la salle d’audience. Ils reviennent sur la chronologie.
L’audience reprend, avec les experts de Lyon. Pr Christian Gouillat et Pr Mure.
C’est terminé pour les questions à ces premiers experts. La présidente fait une suspension de séance pour une dizaine de minutes.
– Me Bernard Alexandre : « On a passé 8 culots de sang, jusqu’à 21h. Est-ce que le chirurgien d’astreinte doit rester ? » – Pr Grosdidier : « Quand on est d’astreinte, on est corvéable à merci. Il n’y a pas de discussion là dessus. »
– Me Bernard Alexandre : « Quelle est votre analyse face aux évolutions du taux d’hémoglobine ? » – Pr Grosdidier : « Il répond au traitement, à 11g d’hémoglobine, on peut considérer qu’il est stabilisé. » – Me Bernard Alexandre : « A 21h30 il est stabilisé donc. » – La présidente : « avec une tension à 6 » – Pr Grosdidier : « Il faut regarder le reste du tableau. »
– Me Bernard Alexandre : « Le Dr Olexa (réanimatrice de garde) à 21h30 dit qu’elle a eu le sentiment à cette heure là que le patient avait été stabilisé et que le traitement avait fonctionné. Personne ne l’appelle avant 0h06. Est-ce que c’est cohérent ou contraire avec les règles de l’art pour le Dr Moog ? » – Pr Grosdidier : « C’est difficile de répondre. Ca dépend des relations entre la réanimatrice et le Dr Moog. On peut donc se demander ce qu’il se passe entre 18h et minuit. On n’a aucun problème avec le traitement conservateur… Le seul problème avec ce traitement est qu’il faut le surveiller. »
– La présidente : « Donc il fallait bien qu’il se déplace ! » – Me Bernard Alexandre : « Mais madame la présidente, ne reprenez pas la question ! Je cherche le lien de causalité. Aucun expert n’a remis en cause le choix TNO, et donc, si ce choix TNO avait été fait quelques heures avant, est-ce que ça aurait changé quelque chose ? Non. »
– Me Bernard Alexandre : « Sur le déplacement du Dr Moog entre 16h30 et 18h, le grief est formulé qu’il ne s’est pas déplacé assez tôt (diagnostic posé à 14h). En même temps, vous situez la problématique plus tard, dans la soirée. Si le Dr Moog s’était déplacé plus tôt, est-ce que ça aurait changé quelque chose ? » – Dr Grosdidier : « Non, ça ne change rien puisqu’il a pris cette option du traitement non-opératoire, s’il l’a prise plus tôt ça ne change rien, ce n’est toujours pas la bonne décision à prendre. » – Me Bernard Alexandre : « Notons le. »
– Me Bernard Alexandre : « Est-ce qu’on peut parler d’une « perte de chance » dans le cas présent ? » – Pr Coudane : « Nous n’avons jamais utilisé ce terme. Nous ne nous prononçons pas sur la culpabilité. Le terme de « perte de chance » n’est pas un qualificatif pénal. » – « Mais d’autres experts parlent d’une « perte de chance » de 90% » – « Ils font comme ils veulent, mais il y a toujours un risque. »
– Me Bernard Alexandre : « Est-ce que vous admettez que le travail d’expert est différent du travail quotidien dans l’urgence ? » – Pr Grosdidier : « Nous travaillons toujours dans nos services, j’étais de garde cette nuit. Nous avons travaillé sur dossier, mais on connait la situation parfaitement, on connait les difficultés. Et à notre avis, les décisions prises ne sont pas conformes aux règles de l’art. »
– Me Bernard Alexandre : « Est-ce que vous confirmez qu’il y a une faute lors de la laparotomie à 6h du matin ? » – Pr Grosdidier : « Notre position est qu’il fallait opérer plus tôt. Mais clairement, si j’avais eu ce cas, à 6h du matin, j’aurais fait la splénectomie à ce moment là. »
La procureure Morgane Robitaillie : « Sur l’embolisation, votre rapport indique qu’elle ne vous parait pas entièrement justifiée. Or vous avez dit ce matin que vous n’aviez pas de problème avec ça… Alors qu’en est-il ? » – Dr Grosdidier : « Encore une fois, nous sommes partis sur une hypothèse de chirurgie d’emblée. Dans cette optique, l’embolisation à ce stade nous apparaît injustifiée. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Alors il y a une spirale qui s’enclenche, le chirurgien court après, ok. Mais vous indiquez que la laparotomie devait s’accompagner d’une splénectomie, alors qu’en est-il ? » Pr Grosdidier : « A mon sens, à 6h, lorsqu’il y a une laparotomie à ce stade, il fallait faire la splénectomie. »
Me Jean-Christophe Coubris : « On nous a dit qu’une tension à 9, dans un cas général, n’était pas problématique. » Pr Coudane : « C’est quand même un peu bas. »
Me Jean-Christophe Coubris : « Qu’est ce qui peut expliquer que cet enfant vomissait du sang vers 15h ? » Pr Coudane : « Il n’y a pas de communication entre l’estomac et la rate… Donc c’est du sang qu’il avait ingéré lors de sa chute, et qu’il a rendu étant donné ses blessures. »
Dr Coudane : « Le chirurgien a fait ce qu’il a pu à ce moment là, on ne peut pas lui apporter de griefs à ce stade… »
Me Bettcher : « Quelle est cette blague d’une opération à 4h30 du matin ? » – Dr Grosdidier : « Ce n’est pas une blague. Le chirurgien est confronté à une situation inextricable. A ce stade, le chirurgien fait de la chirurgie de sauvetage. »
– Me Bettcher repose la question : « Fallait-il se déplacer pour voir le patient ? » – Dr Coudane : « Nous avons déjà répondu à cette question. Il faut se déplacer pour discuter avec les médecins et voir le patient. »
Dr Coudane : « Sur le dopage éventuel de Maxime, je suis président de la commission d’appel du dopage dans le football, il n’y a pas de littérature sur des CIVD dans les cas de dopage. »
La présidente demande quels sont les facteurs qui ont compliqué l’opération, notamment la coagulation défaillante de Maxime Walter. Les experts répondent que lorsque l’opération survient, c’est trop tard avec le syndrome compartimental et la CIVD : « Dans ce cas particulier, on a discuté sur la prise en charge, pas sur la fin. »
Dr Grosdidier : « On a estimé que la laparotomie aurait dû être faite plus tôt, donc on conclut que l’opération a été faite trop tard et que c’est ce qui a causé la mort de Maxime Walter. Mais le risque post-opératoire d’une splénectomie est sérieux, surtout dans le cas d’un patient avec des troubles d’hémostase… »
Sur l’embollisation, les experts indiquent que c’est une pratique acceptable, car lorsque l’hémopéritoine est là, avec le syndrome compartimental, l’opération est compliquée.
La présidente poursuit la chronologie, et revient sur les signes de la défaillance multi-viscérale : « Est-ce que vous rappelez vos internes quand vous êtes d’astreinte dans un cas difficile ? » Dr Coudane : « on demande à l’interne de communiquer ce genre de choses. Si l’interne ne rappelle pas, le lendemain au staff, ça va mal se passer… Il ne le refera pas. Chez les polytraumatismes, le seniors se déplace et l’interne est tenu de prévenir, sinon c’est un dysfonctionnement. » La présidente : « Mais si l’interne n’appelle pas ? » Dr Coudane : « Si l’interne n’est pas sérieux, on reste sur place. »
La présidente interroge les experts sur la décision d’opérer. Dr Grosdidier : « La décision se prend en collégialité, entre médecins seniors et les internes. Et elle doit être réévaluée régulièrement, ce sont des patients compliqués. »
La présidente reprend : « Donc pour poser le diagnostic, il faut que le chirurgien soit sur place ? » Dr Coudane : « oui »
La présidente interroge les experts sur la possibilité d’une CIVD (coagulation intravasculaire disséminée). Le Dr Coudane répond : « Là en l’état, je ne peux pas répondre à cette question. »
Un échange a lieu entre les experts et la présidente sur l’état hémodynamique de Maxime Walter l’après-midi, et notamment sa capacité à coaguler.
La présidente : « Donc est-ce que le traitement non-opératoire était justifié ? » Dr Grosdidier : « Alors… On peut avoir des traitements opératoires qui ne comprennent pas le geste éradicateur de la rate. » La présidente : « Donc là… ? » Dr Grosdidier : « Ca dépend des équipes car… » La présidente : « Non mais là vous êtes entendus comme experts, vous connaissez le dossier ! Dans ce cas précis, qu’est-ce qu’il fallait faire ? » Dr Grosdidier : « Compte-tenu de l’état hémodynamique, il fallait faire une laparotomie et une splénectomie, le plus rapidement possible. »
La présidente : « Est-ce que Maxime Walter était stable hémodynamiquement ? » Le Dr Grosdidier : « Non, sur les examens communiqués, il n’est pas stable. »
La présidente : « Quels sont les critères d’un traitement non-opératoire d’un trauma d’une rate ? » Le Dr Grosdidier répond : « La sensibilité des chirurgiens d’adultes et infantiles sont différentes, les critères ne sont pas les mêmes. » La présidente : « Alors, chez un enfant, quels sont les critères ? » Dr Grosdidier : « Il s’agit de pousser le traitement non opératoire le plus loin possible. La splénectomie a des risques post-opératoire sérieux, infectieux notamment. Mais là, il y a l’instabilité hémodynamique… » La présidente : « Ah voilà, tous les experts nous disent qu’il s’agit là du critère déterminant… »
La présidente demande : « est-ce une pratique habituelle de ne pas se déplacer lorsqu’on est d’astreinte et qu’on a les éléments qu’avait le Dr Moog à l’arrivée de Maxime Walter aux urgences ? » Les Drs Coudane et Grosdidier répondent évasivement, puis pressés de préciser, admettent que le chirurgien senior doit se déplacer, dans ce cas.
La présidente reprend brièvement les faits…
Premiers experts : les Drs Coudane et Grosdidier, qui ont conclu que la mort de Maxime Walter était imputable à une splénectomie effectuée trop tardivement.
On passe désormais aux experts.
– Dr Jean-Marie Letzelrer : « Peut-être que le Dr Moog n’a pas pris la bonne décision. Mais s’il avait opéré, on lui aurait probablement reproché d’avoir réalisé l’ablation de la rate alors qu’il pouvait la sauver. On accuse souvent les médecins d’être corporatistes. Mais les médecins doivent prendre des décisions que seuls d’autres médecins peuvent comprendre… Les témoignages unanimes apportés ici le montrent, on ne peut pas accuser tous ces médecins de parjure. Le Dr Moog a probablement commis des erreurs de jugement mais il n’y a pas à condamner pénalement un praticien dont la pratique est exemplaire. »  
– Dr Jean-Marie Letzelrer : « Je voudrais témoigner de notre sollicitude face à la douleur incommensurable face à la douleur de la perte d’un enfant. J’ai entendu hier que de nombreuses rumeurs avaient circulé sur cette affaire, sur la présence de l’accusé à un match de foot, sur le dopage de Maxime qui l’aurait empêché de coaguler… »
On appelle à présent le président du conseil de l’ordre des médecins, le Dr Jean-Marie Letzelter. Il a demandé lui-même à prendre la parole.
On appelle le Dr Grandadam, qui a été interne sous les ordres du Dr Moog : – « Le Dr Moog était taciturne mais c’était un grand professionnel, qui n’a jamais hésité une seule minute à m’apporter son aide. »
Me Renaud Bettcher montre une photo de Maxime Walter sur son lit de douleur et invective le Pr Clavert : « comment vous appelez ça, c’est de la boucherie ! » Le Pr Clavert répond que non, et qu’il rappelle qu’il a déjà vu Maxime Walter en consultation auparavant, qu’il l’a déjà reçu 23 fois en consultation : « Maxime Walter était un garçon glandeur. Il n’avait aucune envie d’être un champion. » Cette sortie fait sortir de ses gonds Me Bettcher, qui hurle sur le Pr Clavert : « Il faut respecter les morts ! »
– Me Renaud Bettcher : « De quoi est mort Maxime Walter ? » – Pr Clavert : « Il est mort d’une hémorragie interne. » – Me Renaud Bettcher : « Il est mort de ne pas avoir été opéré. » – Pr Clavert : « Il aurait pu avoir été opéré et mourir également. » – Me Renaud Bettcher : « Hier, ils ont dit qu’ils ne savaient pas faire une splénectomie ! » – La présidente : « Ils ont dit qu’ils n’avaient eu à le faire en urgence. » – Pr Clavert : « L’équipe de Hautepierre est l’une des meilleures du monde. Je ne vous permets pas. »
– Me Renaud Bettcher : « On a bien compris que le traitement non opératoire était privilégié. Mais quand il faut opérer, il faut le faire non ? » – Pr Clavert : « La décision d’opérer est toujours difficile à prendre. Elle doit être prise en collégialité. » – Me Bettcher s’énerve : « C’est encore les mêmes réponses qu’hier ! »
Interrogé par Me Bernard Alexandre sur les évolutions de la médecine, il explique que les traumatismes de la rate étaient opérés systématiquement auparavant, avec une mortalité élevée de 5%, et des complications aussi fréquentes ensuite : « Au niveau pédiatrique, la médecine a évolué pour tout faire pour ne pas enlever la rate. Le monde entier fait comme ça. »
Le Pr Clavert n’est pas expert, mais témoin cité par la défense du Dr Moog. Il est président de la CME, une commission médicale d’étude sur les problèmes médicaux. Il témoigne que le Dr Moog est un collaborateur de qualité qui n’a jamais eu aucun problème de relation avec les usagers du CHU.
On appelle le Pr Jean-Michel Clavert, professeur de chirurgie infantile au CHU de Strasbourg. Il fait de l’orthopédie pédiatrique.
LE tribunal entre dans la salle, l’audience reprend…
On s’installe dans la salle…
L’audience doit reprendre vers 9h.

Aller plus loin

Sur Rue89 Strasbourg : Au procès de l’affaire Walter, comment juger de la médecine ?

Sur Rue89 Strasbourg : l’audition des témoins (compte-rendu minute par minute de la première journée)

Sur Rue89 Strasbourg : Accusé d’homicide involontaire, un médecin de Strasbourg a-t-il été négligent ?


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